• Voici la 10e et dernière nuit blanche de Corinne Jeanson.

    Elle met au ralenti son blog " Histoires d’écrire " et sa collaboration au café pour travailler à un projet d'écriture plus ambitieux qui lui prend du temps. Elle nous offre comme pot de départ cette magnifique ode à l’amour.

    On peut également la retrouver sur le site " Bonnes Nouvelles " interprétée par Nicole Amann sur une musique d’Hervé Jeanson ( ici ).

     



    Lisa, Lisa. Elle s'appelait Lisa. Blonde, de la tête aux pieds. Avec des duvets inavoués au creux des genoux et des manières de rire qui n'étaient que blondeur. Lisa-Lisa.

    La sirène du bateau agitait le départ. Les passagers se pressaient contre la balustrade blanche, luisante des mains engourdies, potelées, grandes, rouges. Et Lisa, Lisa, Lisa dans ma tête. J'avais rejoint la foule que je dépassais d'une tête. Lisa-Lisa. J'avais peint Lisa, toutes ces nuits à Berlin. Lisa en manteau noir, Lisa dansant sous les feux blancs, Lisa dans le bain, Lisa après l'amour. Lisa, là, proche, à demi pliée sur moi, Lisa loin, loin, si loin.

    L'air était frais, le vent déjà brisait l'écume et le bateau s'éloignait, lentement, pesamment et si docilement, sans frôlement, sans trace de violence, là sur les flots bleu noir. Avec l'écume tout autour, l'écume aux bords des lèvres de Lisa, que j'avais tant peintes, tant murmurées. Mon dernier crayon je l'avais jeté à Paris, au fond de la Seine verte. Jamais plus, je le jurai, je ne regarderais la vie pour la peindre.

    Le bateau pour l'Amérique engloutissait Lisa. Un océan atlantique me séparait de Lisa. Lisa que je pianotais sur la balustrade blanche. Lisa qui m'abandonnait pour chanter et danser dans les nuits de Berlin.


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  • Une dernière nuit blanche en compagnie de Corinne Jeanson avant la pause estivale…


    Mante cannibale


    Même quand tu oublies
    Dans tes détours
    De me dire je pars
    Je prends plaisir
    A te deviner ailleurs

    J'aime quand tu déposes
    Tes secrets sur ma bouche
    D'un simple doigt
    Les soirées s'allongent
    Je déroule nos instants
    Je les déplie
    Comme des cornets
    D'oublies

    Absent de toi, je range ton boudoir
    Tes bas abandonnés
    Ta jupe fendue
    Et ton parfum
    Traînant
    Je pourrais parcourir les rues
    Te retrouver
    Accoudée nonchalante
    Dans les bars d'étuve

    Je tourne en rond
    Dans le couloir vide
    Je déplie une carte
    Pour dessiner tes voyages
    Impossible de me détacher
    De tes fantaisies
    Les pinceaux sur la toile
    Te grimacent des poses
    De mante cannibale
    Je croque le baiser
    Que tu donnes à des inconnus

    Quand tu réapparaîtras
    Dans mon antre
    Avec ton sourire esquissé
    N'oublie pas
    Mes morsures de bête
    Te saisiront.


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  • Une huitième Nuit Blanche orchestrée par Corinne Jeanson et un éloge du désir qui ne trompera pas les couche-tard…


    J'avoue, j'avoue
    Tes mensonges
    Nourrissent mes songes
    J'écoute tes fables
    Tes artifices me font craquer
    J'aime les serments que tu sèmes
    Judas je consens à tes baisers
    Tes boniments me gréent
    A ton mat de bateau
    Tes mirages dorent mon désert
    Ton bourrage enfume mes romans
    Tes contes hantent mes sommeils
    Ma vie s'illusionne à tes inventions
    Je fonds à tes tromperies
    Tes non-dits s'accordent à mes imaginaires
    Tes trahisons me délivrent du néant
    Mystifie-moi
    Laisse-moi croire que tu me mens
    J'avoue, j'avoue
    Je triche bien plus que toi
    Tant que tu m'échappes je te désire.



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  • Corinne Jeanson a fait disparaître la dernière lettre de la série Transit mais ce n’est que pour prendre le train à sa façon…



    Je n’ai as pris ce train, ce matin de mars. Pourtant nous avions fixé notre rendez-vous à 11h33 précise en gare de V***. J’ai hésité. Je savais que ma vie serait imprégnée à jamais de ce rendez-vous. L’intranquillité me laissait là sur ce bord de quai, en gare de L***. Impossible de poser mon pied gauche sur la première marche du wagon. Les autres passagers se pressaient vers leur destination. Derniers sourires, derniers baisers avant le départ. Un jeune homme me bouscula. S’excusa. J’ai reculé. J’ai attendu que le train s’éloignât. J’ai entendu les portes se refermer, je restais à regarder le lent échappement du convoi jusqu’aux tampons arrondis du dernier wagon et les voies qui reprenaient leur densité métallique.

    Je suis revenu à la gare, j’ai acheté des Pall-Mall et j’ai pris un café dans le premier bar en face du parvis. Je me suis souvenu de notre premier voyage en train. Nous avions quitté la France de nuit, nous nous étions éveillés en Italie : Venise. Le parvis de la gare Santa Lucia de Venise, ses marches qui plongent dans les canaux. Nous étions des enfants, nous découvrions la vie ensemble, à peine vingt ans. La joie nous appartenait. La joie de découvrir à deux la vie, son monde, ses sensations. Je devinais que ce voyage symboliserait à jamais tous mes voyages. Je sentais ta main dans ma main.

    Depuis d’autres trains m’ont capturé, depuis d’autres compartiments m’ont accompagné le temps d’un voyage à la découverte de nouveaux continents. Tant d’autres trains, tant d’autres continents. Ces transits passagers, mouvants, absurdes à force de tentations, de tentatives, de nouvelles joies aussi.

    Comment au bord des mes cinquante ans, aurais-je pu reprendre le même chemin qui me guide incessamment vers toi jamais oubliée, jamais abandonnée au fond de mes tripes ? Il m’aurait fallu détacher toutes mes peaux cramoisies, tatouées, pour retrouver la chair transie, je ne sentais que mon vieux squelette broyé par mes déambulations, tous ces lieux de passage, tous ces visages, ces corps qui avaient accompagné ma propre vie, ma vie de vagabond. Vagabond depuis ton départ, éloigné de mon âme, de mon identité. Je connaissais à peine mon prénom, mon visage dans les reflets des vitrines comment l’aurais-tu reconnu ? Et dans ces reflets à côté de ma silhouette sombre j’ai perçu ton visage, comme un mirage.

    J’ai refait le trajet, depuis le bar jusqu’à la gare, je l’ai traversé, j’étais sur le quai, un second train m’attendait. Les grèves de mars embrouillaient les pistes. Le contrôleur me demanda de me hâter, c’était le dernier train en partance, oui il s’arrêtait à V***. J’étais essoufflé, ce n’était pas ma course, c’était toi que je rejoignais. Je suis descendu sur le quai, tu étais resté à m’attendre. Tu m’as souri. Nous avons pris un café ensemble et nos doigts se sont croisés par-dessus nos tasses fumantes, nous avions retrouvé le chemin, rien n’avait changé, ni nos visages, ni nos cœurs, nous étions en terrain connu et dans le tourbillon de la vie il nous restait un long voyage à poursuivre. En aurais-je la force ?


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  • par Corinne Jeanson


    Je n'ai pas de souvenir
    Ce dernier baiser
    L'as-tu réellement déposé ?
    J'appartiens à ton monde intérieur
    Je suis veuve de toi
    Tu es sous terre et tu n'es pas sous terre
    Tu me tenais par la main
    Dans le froid de janvier
    Le ciel était bleu je crois
    Le souvenir est resté
    Le dernier, l'unique
    Je ne me suis pas retournée
    Tu n'étais déjà plus là
    Les portes du tramway ont grincé
    Il m'a éloignée de l'ultime sensation
    Ta main chaude dans la mienne
    L'enfer s'est dressé
    Des pans de murs dans la vie à jamais
    Toutes ces murailles érigées
    M'exilent de jour en jour de ta trace effacée
    Cette femme en robe noire qui me suit
    Pourquoi me chuchote-t-elle dans la nuque
    Le nom que tu me donnais
    Quel nouveau jeu inventes-tu
    Pour me rappeler à toi ?

     


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  • Une nouvelle nuit blanche égayée par Corinne Jeanson, en hommage à William Butler Yeats.

     

    Depuis longtemps elle marche
    Sur mes rêves

    Mes sombres ombres tanguaient
    En absence
    De mes amours enfuies
    Essoufflées
    La nuit d'avant hostile
    A cessé
    S'argentent des clairs de lune
    A l'antique

    Son regard de lumière
    S'est lové
    Dans mes livres et déroule
    Mes tapis
    Elle m'attend et m'approche
    Reconnue
    Mes doutes usés défaillent
    A son âme

    Elle ne sait rien de moi
    S'abandonne
    Pleinement et confiante
    Etourdi
    J'ôte mon masque fané
    Je l'embrasse
    Pour m'unir absolument
    A son rêve.




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  • Sur la route de la vie, les histoires d'amour n'ont pas de fin

    par Corinne Jeanson



    Come on baby
    Ta main effleura mon coude à l'entrée du bar
    " La route m'attend, suis-moi, lâche les amarres
    Come on baby tu connaîtras le paradis "
    Je n'ai pas fléchi, le cœur abasourdi
    Nous avons parcouru le trouble de l'amour
    Dans les nuits blanches en absence des jours

    Good bye baby
    Tu as poursuivi seul tes chemins de traverse
    Mes pleurs inassouvis imitaient les averses
    Esseulé tu as goûté les baies des buissons
    Esseulé tu as roulé dans les sombres limons
    Esseulé tu as bu le blanc brouillard des étuves
    L'enchantement touche à sa fin la nuit arrive

    I love you baby
    Aimer, dans quelle langue vive te l'écrire
    Chuinter en allemand ou de l'anglais dire
    Viens lover ton corps dans ma tanière
    Tes nuits fauves se mêleront à mes lumières
    Pour te chérir je choisirai l'italien
    Je t'attends au seuil de notre rêve aérien

    Baby come back
    Les routes ont séparé nos sillons d'âme
    Détache tes souffles grisés du macadam
    Notre jardin d'hiver guette ton vrai retour
    Du fond de ma vie je ne crains pas tes détours
    Dépêche-toi le soleil a quitté le Sud
    Je ne t'attendrai plus longtemps finis ta ronde.


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  • C’est sur un air de tango que Corinne Jeanson nous invite pour sa prochaine nuit blanche…

     


    Quand tu dis : cette nuit sur la colline
    Je file pour une grande envolée,
    Moi, ton homme à femme, je goûte au spleen.
    Quand tu t'évades pour tes chevauchées
    Je me damne à toi ma douce sauvage.
    Tu te glisses sur les pierres qui roulent
    Avec quoi, avec qui ? Dis ! Ça m'enrage,
    Pour quoi, avec qui tu tangues, ma poule ?

    Quand tu fous le camp rejoindre les loups,
    Ca m'obsède, savoir qui te possède,
    Y faut que je sache ou je deviens fou.
    Quand tu t'éclates, je crie pas à l'aide
    Je préfère, mon bel amour, mourir
    Ou pourrir là sous tes fenêtres closes.
    Au-dessus des lois, au-dessus des rires,
    Monte à ma gorge un goût d'apothéose.

    Ce n'est pas ma faute quand tu m'oublies
    Je me perds au milieu de tes délires.
    Je sanglote quand tu ris à la vie.
    Sous les mille étoiles de tes désirs,
    Mes songes voyagent à la dérive
    Pour toi, j'suis prêt à flirter au-delà,
    A quitter le droit chemin pour tes rives.
    Je garde en moi le parfum de tes pas.




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  •  

    Il arrive que Corinne Jeanson vienne au café passer une partie de la nuit. Elle en profite pour effleurer quelques souvenirs et nous faire partager quelques belles pages avant de nous dire bonsoir…

     


    Yvonne,
    Pourquoi m'as-tu adressé toutes ces lettres ? Tu as attendu trop longtemps. Depuis ton départ je me suis grisé à tant d'autres vies, à tant de goulots, aux enfers aussi. Le temps a passé. Il fallait bien passer le temps, ce faux guérisseur. Rompre les espaces éternels. Comment pourrais-je aujourd'hui écouter tes lettres ? Entendre le bruit froissé de leur papier entre mes doigts qui tremblent. Ecoute mon cœur, il se brise, il est en verre blanc. Ne me donne plus à lire tes lettres, elles me font trop mal aux yeux, aux joues, à la bouche, aux tripes, aux genoux, mes pieds fuient sur le sol qui se dérobe. Cette dernière rue où nous avons marché main dans la main, ce dernier matin où nous avons perdu notre langage. Oh Yvonne, qu'avons-nous fait de nos vies l'un sans l'autre ? Le jardin est dévasté, tu ne le reconnaîtrais plus. Tes lettres me sont venues trop tard. Et je suppose que tu ne m'en écriras plus maintenant, trop d'étoiles ont cessé de briller depuis ton départ. Dis-moi. Ma voix s'est éteinte. Je t'ai perdue, mon âme est perdue. J'ai peur.
    Ton vieil époux, Geoffrey

    Ps. Je prie pour que tu reviennes, ne serait-ce qu'un jour...


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  • Le jour ou la nuit, Corinne Jeanson aime bien passer au café. Elle a maintenant sa table réservée pour lire, écrire et partager poèmes ou courts récits. Pour la retrouver facilement parmi la foule des visiteurs, il vous suffit de cliquer sur le menu " Nuits blanches "

     

    Prière des espoirs


    J'ai pour vous
    Ce que personne ne peut atteindre

    Jusqu'à mon dernier souffle
    Ce quelque chose qui vous appartient
    Me retient à vous
    Ce quelque chose que j'ai déposé
    A vos pieds
    Que je ne sais nommer
    Ame ou identité
    Je vous l'ai offert
    Pour l'éternité

    À l'écho de vos pas
    Renaissent incessantes
    Les traces de cette attraction
    Ni amour ni désir
    Vivace effarement
    Qui monte de vos reins
    À vos paumes
    Creux dénudés d'oubli
    Courbes habitées
    De tous mes égarements

    À votre dernier regard
    Est éclos un souffle au cœur
    Ma vie depuis s'est dilatée
    De vous
    Jour après jour
    S'effacent mes contours
    Se drapent mes inspirations
    Trou noir stellaire
    Vous attirez mes mouvements
    De corps démembré et d'esprit consumé

    A l'ombre de vos lumières
    S'allonge ma tête noire
    J'ai fait de ma vie un souffle
    Au croisement de nos routes
    Ni crucifixion, ni abandon.
    J'ai pour vous
    Ce que personne ne peut atteindre,
    Pas même moi.

    Corinne Jeanson


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