• Qu’il soit chevronné ou novice, l’écrivain travaille avec ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur de lui. C’est par ces constants allers-retours qu’il découvre les multiples façons d’être au monde, qu’il en perçoit les séductions et les empêchements, qu’il peut se confronter à l’irrésistible pouvoir des idées reçues et qu’il déploie une somme énorme d’efforts conscients et inconscients pour être à la hauteur d’une vie qu’il voudrait à la fois exaltante, libérée des contraintes et sous contrôle.

    Avec Passages rebelles, il ne s’agissait pas de prendre les armes ou de les déposer mais d’être à l’écoute de ce qui ébranle et de ce qui est à l’œuvre quand l’envie de rompre pointe le bout de son nez. Pour cette septième édition, bon nombre d’auteurs ont dépassé le cap de la distraction littéraire pour se saisir de cette question de la rupture et, tout en se laissant aller à dire quelque chose de leur propre histoire, à soutenir, au-delà de la fiction, une vision singulière de leur époque. Publiés ou non, qu’ils soient ici tous remerciés.



    Au sommaire : Bernard Jacquot, Yvonne Le Meur-Rollet, Joël Hamm, Laurence Marconi, Désirée Boillot, Philippe Arnaud, Patrick Denys, Sylvette Heurtel, Anna Raapoto

     

    Comme pour les précédentes publications, ce recueil des nouvelles primées au concours Calipso 2008 est proposé à prix coûtant ce qui équivaut cette année à 5,50€ l’exemplaire et une participation aux frais d’expédition de 1€ en sus. (Ces frais sont offerts pour une commande à partir de 6 exemplaires).

    Commande à  assocalipso@free.fr


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  • Sylvette Heurtel, primée au dernier concours Calipso "Passages rebelles" pour sa nouvelle "La peau du loup" nous propose pour la soirée "Nouvelles en fête" du 18 octobre une illustration de son texte avec des images glanées dans les rues de Buenos Aires...


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même.

    Nous poursuivons la série avec Jean-Claude Touray et sa nouvelle " Rébellion sauce Boccace ".

     

     

    - Frère Caracol vous avez encore un colimaçon sur la tonsure et on voit, à partir du bas de votre froc de bure, la trace argentée de sa bave desséchée. A raison de trois pieds au quart d’heure, le voyage lui a pris une trentaine de minutes. Et vous ne vous êtes rendu compte de rien ? Vous étiez encore en train de dormir dans la cabane à outils du frère jardinier ! Vous êtes trop familier avec ces escargots dont vous avez la charge, ils finiront par vous dévorer tout cru. Vous avez failli être en retard pour les vêpres.

    Ainsi parlait en ce mercredi d’été le prieur de l'abbaye de La Pierre Qui Roule. Il s’adressait à un moine de six pieds de haut qui, sous le feu de la mercuriale, se recroquevillait dans son habit tout en marchant  vers l’église.  La scène ne se déroulait pas au vingt et unième siècle, mais à une époque où l’entente cordiale restait à inventer. En ce temps-là, pauvre France, les cochons d’Anglois occupaient de belles parties du pays, dont la région où cette histoire se déroule, car on était en pleine Guerre de Cent ans.

    L’abbaye aux hommes de La Pierre Qui Roule était célèbre dans toute la chrétienté par sa fameuse relique : la langue de Sainte Commère, qui attirait pèlerins et pèlerines, provenant de divers pays de la future communauté européenne. On les reconnaissait à leur pas traînant et leur goût pour le colportage des ragots.

    Le moine interpelé est le brave frère Caracol. Il répond humblement et avec obéissance à son supérieur qu’il fait l’impossible, aidé de Dieu et de Sainte Commère, pour arriver à l’heure. Mais avant d’aller chanter vêpres, il doit passer les bataillons d’hélicidés de l’élevage en revue, dans le carré de salades où ils manœuvrent … Il y a toujours un petit malin pour lui faire une blague et le mettre en retard. Il y a aussi des pèlerins qui le dérangent avant les offices, pour acheter une douzaine de petits gris " souvenir ", et qui ne font pas l’appoint, alors, avec le temps qu’il faut pour chercher la monnaie chez le frère Tirelire, pas étonnant qu’il ait parfois un peu de retard…

    Frère Caracol est d’origine modeste. C’est un vilain qui a pris du galon. Il ne trouve pas toujours les mots justes pour s’exprimer avec les humains mais il sait parler aux bêtes. Avec lui, les oies cacardent, les dromadaires de passage blatèrent et les souris, qui ne cliquaient pas encore à l’époque, chicotent. Le moine comprend parfaitement le langage des escargots et son cœur saigne quand il entend le cri de l’Hélix, sur le pied duquel un étourdi a marché. Il a une passion pour ces mollusques discrets qui ne mordent pas quand on les agace mais rentrent leurs cornes avec dignité. Si l’on peut appeler cornes les quatre tentacules érectiles qu’ils portent sur la tête. 

    Frère Caracol est le Grand Maître de l’approvisionnement des cuisines de l’abbaye en chair d'escargot. Une viande tendre et ferme à la fois, à la base de maintes préparations pour l’écuelle des moines ou des pèlerins. Les frères copistes, ouvriers besogneux, qui reproduisent pour la énième fois à la plume d’oie et au pinceau de poil de martre, des images pieuses à glisser dans les livres d’heures, ont grand appétit. Pour les nourrir, il faut de temps à autre agrémenter leur bouillie de blé quotidienne avec un légume ou une viande. L’escargot, en ces temps d’occupation et de restrictions, remplace avantageusement l’entrecôte, devenue presque impossible à trouver sur les marchés de campagne, car les occupants Anglois  en font grande consommation.

    Ce n’est pas rien de nourrir les moines résidents et d’alimenter les pèlerins de passage. Autrefois pour y parvenir et même faire un peu d’export, une armée de serfs, cultivaient les céréales, entretenaient vignes et vergers et élevaient veaux, vaches, cochons, couvées sur l’immense domaine de l’abbaye de La Pierre Qui Roule. Mais depuis belle lurette, les caves, les granges et les greniers, les étables et les écuries, les bergeries et les porcheries, les clapiers et les poulaillers, étaient régulièrement pillés par les Anglois. Les godons, comme on les appelait, n’hésitaient pas à ravager les terres de l’Eglise. Découragés, les moines de La Pierre Qui Roule avaient abandonné les activités agricoles intensives. Ils préféraient jeûner plutôt que nourrir des parasites, faisaient leur blé au plus juste et ne mangeaient plus, comme viande, que de la grenouille de temps en temps et de l’escargot un peu plus souvent.

    " Frogs and snails ", une nourriture tout juste bonne pour les François et qui dégoûtait les Grand-Bretons qui ne venaient pas leur chiper. Voilà pourquoi, entre deux offices, un moinillon grenouillait. Armé d’une épuisette, il sautillait derrière les bondissantes rainettes vertes pour les capturer et il en attrapait au vol quelques unes dont les cuisses faisaient les beaux jours du prieur. Voilà pourquoi aussi, entre deux prières, le frère Caracol récoltait des Bourgogne, alias " gros blancs " et des petits gris pour en faire l’élevage.

    Le ramassage des escargots remonte, comme la capture des grenouilles, à ces périodes reculées de la préhistoire où l’homme se nourrissait de baies sauvages et de toutes les bestioles qu’il pouvait attraper. Le Français moyen du moment exerçait la profession de chasseur-cueilleur. Frère Caracol, un peu plus évolué, était chasseur-éleveur. Il parcourait la campagne à la belle saison à la recherche d’escargots, et les mettait à pâturer et à pondre dans son potager, où ils étaient engraissés à la salade verte et parfumés au serpolet. Il régnait ainsi sur un immense troupeau de plusieurs centaines de milliers de bêtes, dont il devait régulièrement sacrifier les plus grasses pour se plier aux exigences de frère Cuistot. Celui-ci avait, tout au long de l’année liturgique, à satisfaire les appétits de tous. Il cuisait les savoureux gastéropodes au bain Marie et les accommodait en soupe de cagouille  aux orties pour les temps de pénitence, en cassolette de petit-gris  servis dans un jus de framboises et fraises des bois pour les beaux dimanches de saison et, à Noël et pour la Sainte Commère, en terrine d’hélicidé aux bolets de bouvier.

    Quand il fait sa sieste estivale avant les vêpres, bien caché dans la cabane à outils du frère jardinier, Frère Caracol rêve. Le plus souvent il est escargot sauvage. Dans les songes préférés du moine, ceux qui se déroulent au printemps, c’est la grande bouffe : scarole, laitue, pissenlit et chlorophylles en tous genres. Caracol jubile dans son sommeil. Attention, le festin est accompagné de rencontres coquines. Chacun sait que l’escargot, à la saison du renouveau est en émoi et recherche " pour petits jeux, et plus si affinités ", un autre " monsieurdame " de sa race. Frère Caracol est troublé dans ses rêves, par l’évocation du baiser pénétrant à double entrée, pratiqué tête-bêche par ces mollusques gastéropodes, d’autant qu’il dure une éternité. En amour comme dans la marche à pied, l’escargot n’est pas un véloce… Arrivé à ce point de son rêve, Frère Caracol qui a fait vœu de chasteté, ne laisse pas son esprit vagabonder dans les bosquets de la licence, mais tout en dormant, il récite un psaume pour chasser les mauvaises pensées.

    Un jour où l’été a l’haleine particulièrement chaude, frère Caracol fait pendant sa sieste un rêve tout à fait nouveau. Il est toujours escargot sauvage mais bizarrement il n’est plus monsieurdame, seulement monsieur. Il appartient au genre masculin. Il reçoit la visite d’une blonde cagouillette qui n’est pas non plus un monsieurdame, mais une belle, du sexe féminin. "Chéri nous ne sommes pas comme les autres, donne moi tes lèvres, nous sommes des rebelles … ". A ces mots, Frère Caracol s’éveille en un brusque sursaut : Sœur Pattemouille, debout devant lui, le regarde avec un sourire complice. C’est une accorte nonette, encore novice, qui aide aux cuisines du couvent de femmes jouxtant les terres de l’abbaye. Elle vient tous les mercredis à  la cabane à outils, hors de la clôture monastique de La Pierre Qui Roule, échanger contre six douzaines d’escargots deux fromages de lait d’ânesse. Chez les moniales, il y a longtemps que le lait de vache ou de chèvre a disparu des rations: toujours à cause de ces cochons d’Anglois. Ils ont l’habitude d’en mettre un nuage dans leur tasse de tisane.

    - Mais que faites vous là si tôt, ma sœur ? Vous êtes en avance ! 

    - Que Nenni, depuis deux mois que je viens le mercredi après-midi, et aujourd’hui ne fait pas exception, vous êtes, à mon arrivée, en pleine sieste, mon frère. Vous ronflez, tout recroquevillé dans votre habit, votre coquille de bure. On dirait un énorme escargot qui n’aurait qu’un tentacule érectile au lieu de quatre. Et pas sur la tête… .D’habitude, j’hésite et finalement je renonce. Je me retire en attendant votre éveil. Mais aujourd’hui, j’ai osé. J’ai déposé un baiser sur votre front. Je sais que je serai damnée pour ce péché mais je n’ai pas pu me retenir. Vous en avez rajouté. Vous avez grogné dans votre sommeil, puis me serrant dans vos bras, vous avez basculé. La Nature et l’absence de sous-vêtements dans nos tenues monastiques ont fait le reste. Je sais que je serai damnée mais c’était trop bon.

    Elle ajoute avec un rire de gorge:    

    - Il m’a semblé que cela ne vous déplaisait pas ! … Serez-vous donc, vous aussi, privé de paradis pour infraction caractérisée?… Comment saurez-vous, ici-bas, donner le change, cacher cet écart de vie, ce passage rebelle, ce croc en jambe aux vœux prononcés ? 

    - Il me suffira simplement de garder un comportement tout à fait normal, sans chercher à sortir de la routine !

    Frère Caracol se dresse alors sur les pieds, époussète son froc de bure et met les deux fromages dans sa poche. Il ramasse rapidement soixante douze petit-gris, qu’il donne à sœur Pattemouille en lui disant avec un clin d’œil appuyé :

    - A mercredi prochain. N’hésitez pas à me baiser le front et les lèvres, si vous me trouvez endormi. Je vous laisse, sinon je serai trop en retard aux vêpres. J’entends déjà l’engueulade du prieur…

    Caracol se précipite en courant vers l’église, le cœur léger. Tout est normal, il a vérifié, en passant la main, qu’il avait bien un escargot collé sur le crâne, le fameux " colimaçon sur la tonsure "…

    Jean-Claude Touray


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même.

    Nous poursuivons la série avec Stéphanie Cornu et sa nouvelle " A vos risques et périls ".

     

    La chute sera mortelle. Inutile d’esquiver, vous êtes déjà en ligne de mire.

    Le mal de tête me reprend. Surtout ne rien montrer, ils observent peut-être. Discrètement, je prends la boîte de comprimés restée dans mon sac. Je fais mine de réfléchir en pinçant ma lèvre et j’avale discrètement les deux cachets coincés entre le pouce et l’index, sans eau…

    Je les sens, là, en travers de la gorge. Un peu de salive les fera sûrement glisser. C’est pénible mais je suis assez contente de moi. Ils n’y voient que du feu. Je vais même sourire un peu, ça fera plus naturel.

    En ce moment, je suis sous contrôle permanent. Ç’est dur mais le résultat en vaut la peine. Je ne me fais pas de souci pour ceux d’ici parce qu’ils savent qui je suis et puis je connais bien leurs petites manies.

    Mais les autres ; ceux qui vont décider, je les crains parce que je ne les connais pas et je sais qu’ils m’évaluent en permanence.

    Oh, inutile de faire les étonnés ! Je sais très bien qu’ils m’observent avec la webcam et les caméras planquées partout, y compris dans la chambre et jusque dans la salle de bains. Mais ils ne m’auront pas. Je ne me lave plus depuis une semaine.

    D’un côté, ça m’arrange ; j’ai toujours détesté l’eau. Ça remonte à la mort de mon père ; hydrocuté dans la baignoire. J’ai tout expliqué aux policiers : j’ai échappé le sèche-cheveux par mégarde et ensuite … Il m’avait tellement énervée ce jour-là que je ne savais plus ce que je faisais.

    Paix à son âme, le pauvre. C’était vraiment une mort con, je ne suis pas très fière de moi. Enfin, depuis je me suis bien améliorée : les idées sont meilleures et parfois même franchement géniales mais ce sont les occasions qui manquent.

    Coincée entre ces quatre murs, je ne peux rien faire. Censurée, je le dis tout net, je suis censurée dans l’indifférence générale. Alors, pardonnez-moi messieurs, mais il n’est pas question que je me taise. Je dois m’exprimer, on n’est pas en Chine !

    Il faut que j’aille me recoiffer. Je présenterai mieux, surtout qu’avec la webcam on est déformés. Une horreur.

    Mes cheveux, mes beaux cheveux … Des effets secondaires, soi-disant. Je les peigne des heures, je les lisse et il en vient toujours, par poignées. C’est à cause du traitement il paraît. Déjà que j’ai perdu des dents …

    Ah, ils ne font pas de cadeau cette année. Il faut faire la meilleure impression mais on ne vous donne aucun moyen. Bien au contraire.

    Ils ont drôlement corsé la sélection. Mais je m’accroche, je suis une battante. Et puis, je crois avoir mes chances. Pour ma première participation, j’ai été trop naïve. C’est tout moi ça ! J’ai suivi la procédure normale, respecté toutes les règles de présentation mais niet ! Recalée. Alors cette fois ils ne m’auront pas. Je me suis fait finaude et j’ai pigé le truc.

    En fait, ils nous surveillent à partir du moment où on décide de faire partie des candidats. Ah pas fous, il y a trop de monde pour seulement une dizaine de places, alors ils mettent la pression.

    Mais je fais un beau parcours, sans fautes jusqu’à présent.

    Je vais à la bibliothèque deux fois par jour. Deux fois par jour ! J’insiste parce que je m’y emmerde assez pour que ça ne passe pas inaperçu.

    Et je lis. Des romans. Je demande les plus intellectuels à Bernadette, une autre pensionnaire qui s’y connaît. Je me suis tapé l’intégrale de Danielle Steel. Ouais môssieur. Et puis du San Antonio à en vomir. Mais Bernadette me les donne en cachette parce que la surveillante dit que c’est mauvais pour mon équilibre. La censure… toujours la censure. Il faut dire qu’il me donnait tellement la migraine que j’avais fini par me taper la tête contre les murs. Enfin, il paraît que je ne suis pas la seule. Les effets secondaires sûrement.

    Il faut que je me recoiffe. Ca fait partie des critères.

    Je me maquille aussi. Ah ça, j’en fais des efforts. J’ai ma maquilleuse, Corinne, une pro. Il faut dire qu’avec mes mains qui tremblent je n’étais pas beaucoup aidée. Elle te fait ça avec une facilité et, jamais rien à redire. En tous cas, elle ne plaint pas les quantités. Je ne regrette pas tous les desserts que je lui refile aux repas. Midi et soir quand même, depuis une semaine. Sauf hier.

    Elle n’est pas descendue en salle à manger. Madame n’arrivait pas à mâcher à cause de sa mâchoire cassée. Tout un cirque pour trois fois rien. La surveillante était folle de rage.

    Moi, j’ai pas pipé mot. Vous comprenez, on est gentils, on fait des compliments et le travail se relâche. Moi, comme j’ai dit à Corinne, j’aime le travail bien fait.

    C’est pour çà qu’aujourd’hui je suis " consignée dans ma chambre " comme ils disent. Tant mieux, j’ai du boulot.

    Ma coiffure ? Ca va ? Je vais me faire la raie à droite, c’est mieux. Mince, trop court, ils commencent juste à repousser de ce côté.

    Non, mais sinon j’avance bien. La surveillante m’a convoquée pour m’encourager dans " mon projet personnel ". Ca ne peut me faire que du bien. Je l’ai convaincue, je crois.

    Je lui sors des grandes phrases avec des mots que j’apprends par cœur dans le dictionnaire.

    Accorte, palindrome, pâmoison, palinodie, palilalie (super palilalie : c’est le préféré du Dr Vaillant), palicinésie …

    J’en connais aussi commençant par B, C , A comme … bref, j’en sais plein mais je préfère ceux de la page 776, les P. Mon côté poète sans doute. P comme poète. Ouh la, mais c’est qu’il y en a là-dedans. C’est en fusion per-pé-tu-elle. Pas mal aussi, perpétuelle ? Bernadette, elle sait pas ce que ça veut dire. Je suis sûre qu’elle a été pistonnée pour la bibliothèque.

    Flûte.

    J’ai bien failli dire autre chose… Attention au faux-pas, sous contrôle en permanence, ne pas oublier qu’on nous regarde et qu’on nous entend !

    Et bien sûr, ça saigne. Je vais encore en mettre plein l’ordi… et qui c’est qui va nettoyer parce qu’il faut bien présenter ? C’est bibi !

    J’en ai marre de ces croûtes. Et vas-y qu’on désinfecte et vas-y qu’on y met de la pommade. Et j’en ai toujours autant. Elles se déplacent, c’est tout. Quelle galère. Bon, aux grands mots les grands remèdes (sic Shakespeare, enfin je crois) : je lèche.

    Non mais j’en ai marre du chimique. Rien ne vaut les méthodes naturelles. Ah, si j’avais toujours mon chien, il y a belle lurette que je serais guérie.

    Encore un coup de peigne. Il me faudrait peut-être une retouche maquillage mais vu que Corinne est en invalidité …

    Tous ces efforts que je fais ! Je m’épate. Vraiment, je crois que je mérite que mon dossier passe. Sinon, c’est vrai que je le prendrais mal. Et quand je suis contrariée, on sait ce qui arrive…

    Enfin, n’envisageons pas le pire tout de suite. Je fais des efforts. Tiens, ce matin. J’ai écrit à ma mère.

    Alors là, j’ai été grandiose. Tout en vers. Si, si.

    " Ma mère

    Si tu me lis,

    Sache

    Que je suis

    Sur l’ordi. "

    Impressionnés ?

    Et ce n’est que de la correspondance personnelle.

    Je vais changer de profil. C’est vrai, toujours de face, ça va les lasser à force. Un trois quarts comme ceci, si je mets l’écran plus à gauche et que je déplace un peu mon fauteuil roulant… c’est pas mal. Un peu plus à droite, oui c’est bien.

    Un peu inconfortable à cause de mon strabisme mais comme je ne plains pas ma peine, hein ?

    J’en étais où. Oui, la lettre à ma mère. Maman !

    Une sainte !

    Une patience … J’en souhaite une comme la mienne à tous les enfants, surtout aux petits Africains. (Ils verront que je suis sensible aux grandes causes humanitaires)

    Et si j’échouais ?

    C’est vrai, l’échec est possible, ce ne serait pas la première fois.

    Aurai-je la force de négocier une nouvelle permission de sortie, avec tout ce que cela comporte d’efforts supplémentaires ? Aurai-je l’énergie, une fois encore, de régler leur compte aux membres récalcitrants du jury ?

    J’y suis parvenue à deux reprises auparavant, mais quel chantier ! Un mois de travail en amont, et une perm’ d’une semaine qui n’avait rien de sabbatique, croyez-moi. N’empêche, je les ai presque tous eus. Un vrai carnage et une forme de réussite car il fallait du cran, de la méthode et un certain talent pour trouver ces chutes mortelles. Et… sans me faire pincer !

    Bon, allez ! Assez d’idées noires. J’ai confiance, cette fois-ci. Toutes les chances sont de mon côté et je crois qu’ils ont parfaitement compris le message…

    L’infirmière ne va pas tarder à arriver pour mes médicaments, je mets la touche finale et je me recoiffe.

    Bon, je garde mon sang-froid dans la dernière ligne droite. Je respire, je m’étire.

    Où est le règlement ?

    Le voilà.

    Il faut cinq exemplaires. OK. Anonymes. Zut, j’ai mis mon nom à toutes les pages. J’efface. Un code. OK. AZ99 me paraît convenir.

    Ensuite, envoyer à, quoi ?

    Calipso. Calipso ! Calipso ?

    On l’écrit comme ça ? Tiens ! Personnellement, j’aurais mis deux " L ". Enfin bref.

    Un dernier clic sur "enregistrer sous " et pour finir mon titre :

    " A vos risques et périls "

    Ils ne pourront pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus !

    Quitter.



    Stéphanie Cornu
      : l’équipe de Calipso nous propose Passages Rebelles comme thème de concours et me voilà à 41 ans, moi, sage mère de famille avec 2 enfants - un chat - un âne, dans la peau d’une parano schizophrène aux pulsions meurtrières. Ça fait peur, non ?

    Oui, mais qu’est-ce qu’on s’amuse !


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même.

    Nous poursuivons la série avec Danielle Akakpo et sa nouvelle " Il fallait qu’il le fasse "

     

    Il fallait qu’il le fasse. Chez lui, pas question. Avec sa mère toujours derrière lui, à le couver comme un gamin de dix ans :

    - Tu es là, Lolo ? Tu fais quoi ? 

    Pas moyen de fermer la porte de sa chambre pour être tranquille. Il l’aimait bien sa mère, mais ce qu’elle pouvait être chiante ! Son père, lui, bien que passant son temps à errer d’une pièce à l’autre dans son fauteuil roulant, entre deux stations devant la télévision, respectait son intimité. Depuis l’accident qui l’avait privé de l’usage de ses jambes et livré aux soins jaloux de sa compagne, il avait cessé de parler. " Ta mère parle pour deux " avait-il murmuré un jour à Laurent adolescent. Depuis, des clins d’œil discrets, des sourires complices suffisaient à manifester leur tendresse mutuelle.

    Bref, la maison n’était assurément pas le lieu approprié au genre d’opération qu’il projetait.

    Il y avait un moment que l’idée folle avait germé dans son esprit. L’endroit idéal, il n’avait pas eu de peine à le trouver : la forêt touffue de la Bérarde, à la sortie du bourg, où personne n’allait jamais se promener en cette saison. Il avait décidé que ce serait aujourd’hui, en fin de matinée. Ce que ça pinçait ce lundi-là ! Pas le moindre petit rayon de soleil. Ses mains étaient glacées à l’intérieur des gants de laine.

    Un raté ! C’est ce qu’il voyait dans le miroir de la salle de bains en se rasant le matin. Les deux mots lui montaient sans cesse aux lèvres pour exprimer en sourdine la tristesse de son quotidien. Vingt ans. Rien fait de bien, enfin à peine le centième de ce qu’il aurait vraiment aimé faire. C’était maman qui décidait, de tout, pour lui, pour tout le monde. Une seule fois, il avait eu gain de cause, lorsqu’en fin de troisième, on lui avait vivement conseillé d’aller voir du côté d’un lycée professionnel alors que maman Dubois aurait aimé pousser le petit jusqu’au baccalauréat, plus loin même.

    - Le temps que je le décroche, ce bac, m’man, j’aurai des cheveux blancs et une barbe d’un mètre de long. Pas la peine de jeter l’argent par les fenêtres. Avec mon BEP, au bout de deux ans, j’aurai un boulot et je te ramènerai des sous à chaque fin de mois ! 

    En grommelant, elle avait cédé, lui faisant jurer toutefois qu’il ne partirait pas aux cinq cents diables !

    Tout ce qui s’était présenté, pas trop loin de chez lui, c’était une place en BEP vente. Il n’avait pas d’idée bien précise, il avait accepté. C’est au cours des stages obligatoires que son intérêt s’était éveillé, avait grandi jusqu’à devenir une véritable passion. Au supermarché Casina, il avait passé la plus grande partie de son temps à déballer des caisses et des cartons, à ranger des produits dans les rayons. Mais c’était avec plaisir qu’il avait endossé chaque matin la blouse verte du magasin.

    Chez Brize, il avait pendant six semaines classé des tee-shirts et des pulls par tailles et par couleurs. Mais c’était à Conforhome que sa vocation s’était révélée. Conforhome, il en avait plein la bouche lorsqu’il rentrait le soir. Affecté au rayon électroménager, il devint incollable sur les mérites comparés des diverses marques de réfrigérateurs congélateurs, les avantages du dernier modèle de sèche-linge qui loin d’abîmer vos textiles, madame, vous facilitera le repassage.  Son enthousiasme plut à la direction qui fit appel à lui pour un remplacement de trois mois dès la fin de ses études.

    - En juillet et août, tu vas t’ennuyer mon Lolo, gémit maman, tu ferais mieux de profiter du soleil. 

    Il ne s’ennuya pas un seul instant. Il n’y avait pas la foule des grands jours à Conforhome, mais il n’y avait pas non plus pléthore de vendeurs si bien que Laurent se démena d’un rayon à un autre et eut de multiples occasions de déployer ses talents.

    - Ce matelas-là, madame, monsieur, un bonheur pour le dos, croyez-moi ! Votre médecin, votre kiné lui-même vous le recommanderait !

     

    Au pas de course, il  rejoignait un couple hésitant devant un téléviseur : 

    - Je vois que ce modèle d’écran plat vous intéresse. Un choix très judicieux, excellente qualité d’image. Deux ou trois enjambées, et on le retrouvait au milieu des lampadaires et lampes de chevet. Une glissade et il vantait les mérites d’une chambre d’enfant en bois blanc.

    Durant ces trois mois-là, il ne vendit pas grand-chose mais il se démena, renseigna, conseilla, exulta. Les journées lui paraissaient trop courtes. Il allait prendre son autocar à 19h l’œil brillant, l’esprit bouillonnant. Il avait trouvé sa voie. Il serait vendeur, mais pas n’importe où. Les boutiques de vêtements, les hypermarchés, en fin de compte ça ne lui disait plus rien. Le magasin idéal, le top du top pour lui, c’était Conforhome. C’était là qu’il trouverait son bonheur, il en était persuadé. Il avait déposé sa demande d’embauche. Il espérait de toutes ses forces qu’on l’engagerait définitivement.

    - Tu ne manges pas, tu es dans la lune, Lolo ?  lui demandait parfois sa mère au dîner.

    Non, il n’était pas dans la lune, Lolo, il se voyait franchir chaque matin, le front haut, le cœur débordant d’enthousiasme, les portes de Conforhome, portant son beau gilet rouge et la cravate assortie. Une étincelle s’allumait aussi dans l’œil du père, comme s’il partageait le rêve de son fils.

    Octobre le vit attendre fébrilement la lettre, le coup de fil promis par le directeur. Le temps passa. On ne lui fit pas signe. Il galéra de petit boulot en petit boulot, traîna dans la maison, choyé par sa mère qui croyait le réconforter en cuisinant ses plats préférés, en répétant à longueur de journée :

    - Te fais pas de souci, mon Lolo, tu verras, on va te trouver quelque chose de bien. 

    Elle finit par lui trouver quelque chose qui lui paraissait très bien à elle. Grâce au boucher dont elle était fidèle cliente, dont la soeur était allée en classe avec la femme de monsieur Brochet le responsable du bureau de poste ! Léon, le facteur du bourg allait devoir subir une délicate opération qui le tiendrait éloigné de son travail pendant plusieurs mois. Monsieur Brochet n’avait rien contre le fait de recruter un remplaçant qui connaîtrait bien le coin. C’est ainsi qu’un beau matin, Laurent endossa le K way bleu de Léon, un peu trop grand pour lui et enfourcha la vieille bicyclette à sacoches du préposé alité. D’emblée, il détesta ce travail qu’il trouvait inintéressant et tellement éloigné du but qu’il s’était fixé. Le vélo, mal entretenu, lui donnait des sueurs froides au freinage. Et certaines étapes de sa tournée viraient au cauchemar. Vers dix heures, c’était Francine Grangier, accorte quadragénaire en mal de mâle qui le guettait sur le pas de sa porte en déshabillé transparent, quel que soit le temps. Elle se précipitait vers lui, toutes voiles aux vents :

    - Quelque chose pour moi, mon chou ? Tu entres prendre un petit café ? 

    Il avait eu la politesse d’accepter, une seule fois et avait à grand-peine échappé aux assauts de la dame en chaleur. Mais elle ne désarmait pas ! Deux portes plus loin , c’était la mère Loubier, soixante-quinze ans, qui n’avait plus toute sa tête et s’obstinait à lui proposer un biscuit, une sucette, comme lorsqu’il avait six ans. Le pire arrivait avec la fin de la tournée, vers 11h30, dans sa rue, devant chez lui :

    - Te voilà, Lolo ? Fais donc voir ce que tu m’apportes de beau aujourd’hui : une facture de téléphone, une lettre de la cousine Marie… À tout de suite ! Y a du ragoût aujourd’hui, Lolo ! braillait sa mère à la porte du jardin sans oublier de lui plaquer un baiser sonore sur chaque joue.

    En général, sa halte devant la maison familiale coïncidait avec la sortie de l’école primaire située juste en face. Les gamins s’en donnaient à cœur joie.

    - Il va manger du ragoût le facteur Lolo ! 

    Et la mère qui ne cessait de répéter que monsieur Brochet était très content de ses services, qu’il ne manquerait pas de dire un mot pour lui à la direction départementale.

    Plus le temps passait et plus son aversion pour son emploi de facteur lui pesait. S’aventurer à grincer " sale pute " entre ses dents en passant devant la Grangier, à traiter la mère Loubier de vieille cinglée en lui tirant la langue et les gamins de l’école d’enfoirés de petits cons lui apportèrent un bien maigre soulagement. La mesure fut à son comble lorsque monsieur Brochet lui annonça que la convalescence de Léon se passait moins bien que prévu et que son congé allait être prolongé de deux mois, voire plus. Le contrat de Laurent allait lui aussi être prolongé d’autant, s’il n’avait rien d’autre en vue, bien évidemment. Il avait eu beau prier pour qu’un miracle se produise, rien de nouveau ne se profilait à l’horizon. Maman mit le champagne au frais le samedi soir pour fêter l’évènement. Lolo descendit la bouteille presque à lui tout seul pour fêter son désespoir. Une ombre de tristesse voila le regard du père qui gagna sa chambre en pressant au passage le bras de son fils. Après une nuit peuplée de cauchemars, Laurent dormit jusqu’à midi, passa l’après-midi l’air absent devant la télévision. En réalité, son plan mûrissait dans son esprit fatigué. Le lundi matin, étrangement serein, sa décision prise, il embrassa sa mère, son père, enfourcha sa bicyclette et fila en sifflotant.

    11h30 le trouva à la sortie du village, à genoux entre deux gros chênes, au coeur de la forêt de la Barbade. Il y avait bien longtemps qu’il avait cessé de siffloter. Le regard brûlant de colère et de chagrin, il contemplait la pile de lettres qu’il venait de déverser en tremblant de ses sacoches. Il avait dû faire l’effort d’en distribuer quelques unes, de traîner en chemin, pour ne pas attirer l’attention si bien que la tournée lui avait paru durer une éternité. Il se débarrassa de ses gants, craqua une allumette. En quelques minutes, la pyramide de courrier s’embrasa. Laurent, hagard, regarda les flammes grignoter le bas de la pile, dévorer goulûment le papier. Secoué de hoquets de sanglots, il tendit les mains vers la gerbe rutilante, laissant le feu lécher le bout de ses doigts engourdis. S’envolaient en fumée le symbole d’une tâche abhorrée et le bel idéal qu’il avait perdu tout espoir de voir se réaliser. Partir lui aussi, se laisser emporter par ces flammes crépitantes… Il lui suffisait d’approcher ses vêtements du brasier…

    - Non mais, tu as perdu la tête, Laurent Dubois ? Déclencher les feux de forêt, c’est devenu ton nouveau passe-temps ?

    Une main ferme venait de l’agripper par l’épaule. Il n’avait pas prévu que ce jour-là, l’idée saugrenue de couper à travers bois pour aller déjeuner chez son frère traverserait l’esprit du maire.

    Chez les Dubois, après un quart d’heure passé à crier, à faire répéter son interlocuteur en levant les yeux au ciel, la mère reposa le combiné du téléphone dans l’entrée et rejoignit le père dans la salle à manger. Son regard las fixé sur l’écran de la télévision, il demeurait muet, comme à son habitude.

    - Quel tintamarre, mon pauvre Auguste! On dirait la sirène des pompiers, ou celle de la police. Sûrement un accident de la route. Au fait, tu sais qui j’avais au bout du fil ? Conforhome, pour Lolo ! Ils auraient besoin de lui dans une quinzaine de jours. Je lui en parlerai pour qu’il rappelle, par politesse. Mais de toute façon, ça ne l’intéressera pas.

    - Pas si sûr !  scanda le père d’un ton sec devant sa femme médusée.



    Danielle Akakpo  : cadre administratif à la retraite, si j’ai toujours eu un penchant pour l’écriture, j’ai attendu très longtemps avant d’oser montrer mes productions à qui que ce soit. Le Net m’y a aidée. Après avoir adhéré (timidement) à une association d’auteurs amateurs dont je suis finalement devenue présidente (Le Cercle Maux d’Auteurs pour ne pas le nommer), reçu avis, conseils et encouragements, j’ai déployé mes ailes. (J’en ai deux, que diable : DanieLLe et j’y tiens !) Peu importe si elles ne m’emmènent pas au firmament : j’écris pour me sentir bien, me faire plaisir et si je peux faire plaisir à d’autres, cela suffit à mon bonheur. Rien de plus triste que de se prendre trop au sérieux. ! J’oubliais : ma préférence va à la nouvelle et au texte court.

    J’ai eu la chance de franchir le barrage de l’édition avec :

    Elles et Eux (Éditions Écriture et Partage) 2006 Recueil de nouvelles

    Un Homme de Trôo, roman coécrit avec Jean-Noël Lewandowski (PLE Editions) 2006

    Quelle comédie la vie ! (PLE Éditions) septembre 2008 Recueil de nouvelles

    Mon blog :  http://danielle.nipox.com

     


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  • Bien connu des habitués du café pour sa rubrique " A propos de… " Gilbert Marquès s’est risqué au concours Calipso et sa nouvelle " Le gueulard " a fait partie de la première série des textes finalistes. Elle a donc sa place au menu du jour.

    A noter que cette nouvelle a obtenu en 2005 le 2° prix Scriborêve " organisé par la Société SCRIBO – 58500 – Clamecy ; en 2007, parution dans le numéro 25 de "La Gazette des Amis de Thalie" - 87100 Limoges ainsi que dans le numéro 9 de la revue "Au fil des Pages" - 01600 Trevoux ; en 2008, parution sur le site http://www.laguerredesmots.com

     

     

     

    Dans l’après-midi finissant d’un automne frissonnant, un mec gueulait dans la rue presque vide.

    - Libérez les peuples opprimés, les taulards et tous les marginaux qui n’en peuvent plus de crever d’envie à vous voir étaler vos richesses de merde !

    Immanquablement, son cri s’achevait dans un hoquet. Chaque dix pas, il recommençait sa rengaine sans écho. Il ne savait probablement pas où aller puisque, depuis le matin, il suivait le même invariable itinéraire : il montait la rue par le trottoir de droite, traversait au feu devant le café, descendait par celui de gauche et traversait de nouveau au rond-point. Réglé comme une horloge, il bouclait son périple en un petit quart d’heure en s’arrêtant régulièrement pour débiter ses conneries presque devant chaque porte d’immeuble ou sur le seuil des magasins.

    Au début, les commerçants avaient rigolé de sa tronche de traviole aux yeux presque fermés tant ils étaient bouffis, de son visage enflé et rouge comme s’il venait de prendre une branlée. Du reste, ce personnage venu on ne sait d’où prêtait vraiment à rire. Il était mal foutu ; pas nain mais presque, pas vraiment bossu mais tout courbé, fringué à la va com’j’te pousse. Une espèce de clown… triste et crade.

    A force de tourner comme un lion en cage, les autres, les habitants du quartier, avaient fini par ne plus faire attention à lui. Il s’était fondu dans le décor et même sa litanie ne dérangeait plus.

    Le soir venu, les quelques rares passants rentrant de leur boulot le découvraient en ne lui accordant qu’un vague regard. La tête baissée sous le poids d’une rude journée, peut-être se sentaient-ils coupables de ne pas prendre le temps de l’écouter… Ils évitaient ce nabot de crainte qu’il ne les accoste pour les retenir par ses propos avinés.

    Lui ne s’occupait de personne. Il marchait de son pas claudiquant sans voir quiconque. Il s’arrêtait soudain, braillait ses âneries puis repartait comme un automate. Sa harangue ne servait à rien. Elle ne s’adressait pas aux bons auditeurs et ça n’empêchait personne de bouffer, de regarder la télé et peut-être même pas ce couple de hasard de faire l’amour à la sauvette dans cet hôtel un peu miteux. Apparemment, lui s’en foutait. Seule semblait compter cette phrase un peu vulgaire qu’il débitait d’une voix éraillée.

    Les gens du coin étaient habitués depuis longtemps à cette sorte de colère qui grondait comme un orage sans jamais vraiment éclater. Ils en étaient abreuvés par les informations et ça ne les touchait plus beaucoup sauf, parfois, quand eux-mêmes se sentaient concernés ou menacés.

    D’où venait ce type qui gueulait, en bas, dans la rue ? Qui était-il ? Pourquoi débloquait-il ainsi ? Autant de questions qui n’intéressait personne a priori. Les gens d’ici ne comprenaient rien à son charabia. Tout ça n’avait au fond pas beaucoup d’importance puisque le bonhomme n’emmerdait personne. Il ne dérangeait pas les habitudes et clodo ou pas, son problème n’était pas le leur. Il pouvait traîner autant que ça lui plairait dans ce coin où tous étaient pratiquement aussi paumés que lui.

    Sans être la zone, ce quartier abritait de petites gens modestes asservis par la persécution bourgeoise. Ils vivotaient au jour le jour des miettes que la société voulait bien laisser tomber à leurs pieds. Sans être chien, ils se comportaient comme tel en tentant d’obtenir opiniâtrement un bonheur de gagne-petit. Ils n’avaient pas accès aux grands sentiments, à l’amour moins encore qu’à tout autre. Usés jusqu’à la trame, ils n’aspiraient qu’au repos et à l’oubli de leur condition.

    Ici, nul ne songeait plus depuis longtemps à casser quoique ce soit. Pauvres sans aucun doute, résignés certainement, ils conservaient malgré tout le cœur atavique des… " braves gens ". C’était souvent péjoratif dans la bouche des nantis qui les utilisaient en s’en moquant.

    Leur révolution, ils la faisaient au café du coin, la noyant, au bout de quelques heures, dans les verres du mauvais vin de l’espoir. Ils savaient leurs péroraisons inutiles. Comment les riches pourraient-ils jamais s’abaisser à les écouter ? Il leur aurait fallu le courage d’aller gueuler avec l’autre, dehors, mais ils ne l’avaient plus. Ils se culpabilisaient, bien sûr, de cette absence de volonté mais tout en estimant que pour eux, il était déjà trop tard. ça ne les empêchait pas de rêver… Leur réalité se résumait pourtant à peu de choses : les syndicats qui faisaient le jeu de la politique pour les baiser jusqu’au trognon avec obligation de s’exténuer pour un boulot de traîne-misère qu’il fallait surtout essayer de garder pour ne pas finir laminé par le spectre du chômage. Le peu de fric qui rentrait était toujours ça de pris pour faire bouillir la marmite.

    Y avait la femme et les gosses, les responsabilités, quoi !

    Non, ils n’étaient pas dupes. Ils savaient que leur inertie servait les ambitions de ceux qu’ils appelaient " les gros " mais ils n’étaient plus tout jeunes et se cherchaient des excuses pour ne plus réagir, pour ne plus prendre leur destinée en charge. Ils se contentaient de cette précarité dans laquelle ils s’enfermaient comme dans une prison sans mur et sans barreau. Le mec qui gueulait, dehors, réveillait dans le tréfonds de leur esprit étroit un reste de conscience honteuse mais c’était insuffisant pour embraser leurs forces déclinantes. Ils acceptaient de s’enterrer de leurs propres mains.

    Ils avaient des devoirs mais, au fond, presque plus de droits sauf celui de se taire.

    Dehors, le mec gueulait toujours. La nuit était maintenant tombée. Les boutiques avaient fermé leurs rideaux mis à part le café. Le film à la télé était fini. L’un après l’autre, les volets claquaient. Parfois, une voix excédée s’adressait à l’inconnu :

    - Tu vas la fermer ta grande gueule, oui ou merde ? On voudrait bien roupiller ! Nous, demain, on bosse, du con !

    Rien que de très ordinaire dans ce bordel mais, apparemment, cette soudaine hostilité qui gagnait toute la rue ne troublait pas le mec. Il continuait ses allées et venues en gueulant toujours, comme si le temps n’était pas passé.

    Etait-ce le silence qui l’incitait à crier encore plus fort ? Mystère… Il persévérait néanmoins dans un désert au fur et à mesure que la nuit s’alourdissait.

    Plus personne, toutefois, ne l’entendait. Les autres avaient dû finir par s’endormir.

    Au petit matin, quand les premiers habitants sortirent dans la rue pour se rendre à leur travail, un silence pesant les accueillit et les étonna. La " pauv’ mec ", comme ils l’avaient baptisé, s’était tu et avait même disparu. Il n’était plus là et ça faisait comme un vide étrange, un grand trou dans lequel sa voix ne résonnait plus. Les uns et les autres le cherchèrent ici ou là, dans les encoignures de porte, près des poubelles mais rien. Chacun se sentit orphelin. Soudainement, ils se rendirent compte que le mec dont ils ignoraient tout leur manquait. Ils regrettaient tout d’un coup de n’avoir pas été plus sympa avec lui. Alors, ils s’interrogèrent en s’interpellant :

    - Tu sais qui c’était ?

    - Non, et toi ?

    tandis qu’un autre essayait de savoir

    - D’où qu’il venait ?

    - Va savoir… lui répondait quelqu’un en ajoutant mais faisait chier à brailler comme ça !

    Trop tard pour lui poser toutes ces questions. C’était hier qu’il aurait fallu lui demander, l’inviter à boire un coup mais ils avaient laissé passer leur chance. Le mec s’était barré ailleurs.

    Continuait-il à gueuler son truc pour chambouler les consciences ?

    Quelle importance ? Ici, y a pas de place pour les sentiments et puis, on oublie vite…

    Gilbert Marquès


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même.

    Nous poursuivons la série avec Cédric Studer et sa nouvelle " L’hérédité du pendu "

     

     


    " Pourquoi " . Techniquement, il s’agit d’un adverbe. Difficile à expliquer. Marque l’interrogation. La surprise subite, peut- être.

    " Partir ". Un verbe, il me semble. J’apprendrai plus tard qu’il appartenait au troisième groupe, ce qui ne modifie en rien son sens premier.

    " Pendu ". Inconnu au lexique.

    "  Pourquoi, partir, pendu ". Ces trois mots revenaient inlassablement. Tantôt murmurés, à peine audibles, tantôts criés puis étouffés entre deux pleurs. Un lien mystérieux semblant les unir m’échappait encore. Quoiqu’il en soit, tout cela n’augurait rien de bon.

    Je n’ai rien oublié de cette journée d’été. Les rayons du soleil rentrant avec force dans la pièce. La poussière suspendue, dansant dans les faisceaux d’or. La lourde chaleur, prophétie avortée ou promesse tenue d’un orage futur.

    C’était le temps où mon âge se comptait sur les doigts d’une seule main. Du Nutella plein la bouche, je tartinais avec application mon énième tartine tout en balançant mes jambes au rythme lancinant de la mastication.

    Dans la pièce d’à côté, les cris de ma mère s’envolaient avec force -tourbillon déchirant d’une onde vibratoire aiguë- pour replonger subitement dans les profondeurs de notre appartement et se muer en un grondement sourd. Le murmure rampant s’amplifiait doucement, puis la voix reprenait son l’envol. " Pourquoi, partir, pendu ".

    Quelques heures auparavant, deux de mes tantes avaient investi notre foyer, le visage grave, les yeux gonflés et rougis. De l’asthme sans doute, la période était propice au pollen.

    Surprise, ma mère les avait fixé avec intensité puis, sans un mot, m’avait pris la main pour me conduire à la cuisine en prenant soin de bien refermer la porte derrière elle. Les premiers cris se firent entendre, mes tantes aussi pleuraient. Finalement, c’était peut-être un peu plus que de l’allergie.

    Je restais assis, figé, léchant mécaniquement le bout de mes doigts. Ma mère revint doucement dans la pièce, un sourire crispé accroché à ses lèvres. Elle s’assit sans un bruit et passa tendrement sa main dans mes cheveux bouclés. Le corps tendu à l’extrême, j’attendis avec angoisse qu’elle m’annonçât la terrible nouvelle responsable de tous ces cris. Quelle bêtise avais-je bien pu commettre ? Serais-je privé de centre aéré cet été, ou pire encore, de vélo ?

    - Ton papa est parti, murmura-t-elle dans un souffle.

    Je respirai. Ouf ! Le vélo ne serait pas confisqué.

    - Est-ce pour cela que tu pleures ?

    Elle hésita longuement avant de me répondre, cherchant des mots qui ne venaient pas.

    - Il est parti loin.

    Soudainement, un éclair traversa mon esprit. Le mystérieux lien unissant les trois mots venait de tomber.

    - Il est parti à Pendu ? C’est ça, hein ?! fis-je l’air triomphal.

    Elle ne dit rien, m’embrassant juste sur la joue avant de raccompagner mes tantes qui, le nez coulant comme une fontaine, reniflaient à grand bruit dans le couloir. Ah, l’asthme !

     

    L’été s’écoula sans que mon père ne revienne. Dans mon for intérieur, j’ai toujours su que papa partirait un jour ou l’autre pour des contrées sauvages. Il n’était pas représentant comme il avait tenté de me le faire croire. Malgré mon jeune âge, l’étrange lueur qui brillait au fond de ses yeux ne m’avait pas trompé et le triste costume qu’il portait à longueur d’année n’était qu’une piètre et sinistre couverture. Débarrassé de ce fardeau, il explorait à présent des terres inconnues. Le soir, avant de m’endormir, je l’imaginais au milieu d’une inextricable jungle, un chapeau sur la tête, une machette à la main. Cependant je dus rapidement cesser de demander à maman où se trouvait le pays de Pendu car visiblement cela lui causait un chagrin terrible qu’elle réprimait à grande peine.

    Les journées se firent de plus en plus courtes et septembre arriva. Je fis ma rentrée au cours primaire, seul avec ma mère, quand tous les autres enfants étaient accompagnés de leurs deux parents. Je jubilais à la vue de tous ces pères de famille emprisonnés dans leurs costumes impeccables. Papa avait-il réussi à dompter les peuples aborigènes ? Sans nul doute.

    L’enfance est un verre plein d’innocence qui se vide peu à peu, les premières secondes de l’âge adulte commençant au moment où tombent les dernières gouttes. Mon verre se brisa le jour où, dans la cours de récréation, je surpris la conversation d’autres enfants. Pendu n’était pas une ville, ni même une contrée lointaine, encore moins un pays. L’innocence ruissela sur mon corps, le long de mes jambes. Froide, humide, tranchante. En moins d’une minute, je pataugeais dans une flaque immense. A ce moment, il m’eût été moins pénible de me vider de mon sang. Les dernières gouttes retentirent en touchant le sol, clochettes perdues à jamais. Huit ans à peine, je quittais brusquement le monde de l’enfance.

    A dater de ce jour, je fus pris d’une véritable phobie pour les cordes, lacets et autres ficelles. Il m’était impossible de jouer à l’élastique et je me réfugiais le temps d’une récréation auprès du sacro-saint ballon de foot. Je refusais également, avec obstination, de nouer mes souliers. Vaincue, ma mère dut se résigner à ne m’acheter que des chaussures à scratch. Nous ne parlâmes jamais plus de mon père mais mon imaginaire l’avait tellement fantasmé que je doutais souvent de la véracité des souvenirs qui me restaient en mémoire. Qu’importe, je n’avais qu’eux à présent.

    J’abordais comme une balle cette adolescence en pleine déconstruction. Ma phobie s’estompa progressivement et à l’âge de quinze ans, je pus porter ma première paire de baskets. Pourtant, au moment de les nouer, je n’osai serrer le nœud, de peur d’incommoder mes chevilles en les étranglant.

    Comme dans toute relation, mon rapport aux cordes évolua au fil des ans, passé le stade purement phobique, vint le temps de l’ambivalence. Elles m’attiraient autant qu’elles me révulsaient, seul lien réel conduisant à mon père, fil d’Ariane morbide où se balançait son corps sans vie. Puis doucement, sans que j’en prenne pleinement conscience, je développais une fascination autant secrète qu’étrange. Ma névrose portait un nom : Schoïnopentaxophilie. Prononcez comme cela s’écrit. Schoïnopentaxophilie ou la fascination pour les cordes de pendu, du grec ancien 

    σχονος " corde de jonc, corde ", πήρος, " estropié, mutilé", et τάξος " if, arbre ".

    Drôle de hobby pour un gamin de 16 ans ! Quand tous les enfants de ma classe rêvaient de devenir footballeur professionnel ou médecin, je n’aspirais qu’à collectionner ces foutues cordes. Malgré une lecture régulière et soutenue des avis de décès, le questionnement incessant de mes amis sapeurs-pompiers qui intervenaient sur les lieux du drame, je ne parvenais pas à récupérer la moindre corde. Ces dernières étant souvent jetées par les membres de la famille ou le personnel de secours pour être récupérées par des schoïnopentaxophiles à l’affût plus habiles, plus rapides et mieux expérimentés que moi, confrérie anonyme des collectionneurs de l’ombre. Les gens n’imaginent pas la rareté de ces cordes ni les terribles convoitises qu’elles inspirent.

    Rajoutant à mon malheur, il me sembla que les gens se détournaient de plus en plus de la pendaison, préférant le confort du somnifère ou la rapidité de la balle. L’artisanat du nœud, l’amour du bon geste n’avait plus la côte auprès des dépressifs de tous poils. Remarquez qu’il faut un certain matériel et des compétences avérées avant de prétendre pouvoir se pendre. Tout d’abord, une corde de bonne facture puis une poutre de belle hauteur, et surtout, une maîtrise sans faille du nœud coulant. Imaginez le pauvre homme pensant voir venir sa dernière heure, se jetant dans le vide pour se retrouver la seconde d’après par terre, humilié, le coccyx en mille morceaux.

    Quoiqu’il en soit, ma collection demeurait vierge et à mesure que le temps passait, une question enfouie au plus profond de moi commença sa longue remontée vers les rivages de ma raison. Un fils de pendu était-il un pendu en puissance ? Etais- je, moi, un pendu qui s’ignorait ? Je remarquai qu’aussi paradoxale que cela puisse paraître, le pendu était une espèce en voie de disparition qui ne cessait pourtant de se reproduire. Y avait-il une fatalité du pendu ?

    J’en vins naturellement à m’interroger quant à la nature des décès de mes ancêtres paternels. Je n’avais pas connus mon grand-père, de quoi avait-il bien pu décéder? Question délicate que je n’osai poser à maman de peur qu’elle ne s’inquiète à mon sujet. A défaut de tout démenti, j’acquis la certitude que ce n’était sûrement pas une simple grippe qui l’avait emporté.

    La problématique s’imposait d’elle-même : j’étais fils de pendu et un destin terrible s’acharnait sur les hommes de ma famille. J’étais le prochain sur la liste. L’idée d’être condamné à l’avance me révolta et me fit l’effet d’un électrochoc. Il était hors de question que je me pende de mon vivant ! Jamais !

    J’élevai la lutte contre la pendaison au statut de cause personnelle dans laquelle j’engagerais toutes mes forces et mon énergie. Pour l’honneur de mes ancêtres et la liberté de ma descendance, je me battrais ! Dieu que j’étais beau dans le combat, grand par le sacrifice ! Chevalier en croisade contre le sombre fléau au nœud borroméen, Hérault pourfendeur de corde en tout genre et de toute espèce ! Jamais je ne m’agiterais, fruit trop mûr, aux branches d’un cerisier quelconque.

    Je poursuivis ainsi ma vie, gonflé à bloc d’honneur et de bravoure. Je passai du stade de fils de pendu à celui de père. A présent, je ne me battais plus pour moi, mais pour lui. Pour que cesse à jamais l’hérédité du pendu.

     

    Aujourd’hui, à bientôt 28 ans, je sais que j’ai gagné le combat. J’en suis sûr. Le sort est brisé. Jamais je ne finirai au bout d’une corde. Le sentiment de victoire est tel que mes yeux se troublent. Je regarde ma montre. 10h20. Je pense à mon fils. Quel soulagement pour lui, il n’aura jamais à mener le terrible combat qui fut le mien. Il vivra sereinement, tranquillement sans avoir à redouter de nouer ses chaussures. Il n’aura jamais à écrire l’imprononçable mot, Schoïnopentaxophile.

    10h23. La victoire est toujours belle quand elle est éclatante, sans discussion. C’est le cas. J’inspire profondément l’air pur de la liberté dans mes poumons. Un bruit sourd gronde au loin pour s’amplifier rapidement.

    10h27. Je salue une dernière fois la ponctualité de la SNCF. Remarquable ! 10h28. Je saute.

     

     Cédric Studer


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même.
    Nous poursuivons la série avec Nicole Cavazza et sa nouvelle 
    " La foi "

     

     

    Belle est partie se cacher sous le tracteur, en couinant comme un chiot. Je ressens d’ici la douleur qui brûle son flanc maigre, et qu’elle lèche lentement sans pouvoir la calmer. Le vieux maître la poursuit, le bâton levé. Il a encore trop bu de cette eau rouge qui sent mauvais et qui le met en rage sans raison. Germain a crié " Arrête ! " et il a coupé sa course en se mettant devant lui. Germain est juste. Il ne veut pas qu’on frappe Belle quand elle n’a rien fait, ni elle, ni d’ailleurs aucun de nous. Le vieil homme lève le bras, ses yeux sont rouges de folie. Il ne frappera pas Germain. Je ne veux pas qu’il le frappe. Je sais que d’un seul bond je peux l’atteindre. Pas un grondement ne sortira de ma gueule. Il n’y aura pas d’avertissement. C’est pour tuer que je saute.

    Il m’a dit d’attendre là et je l’attends. La tête sur mes pattes, je l’attends. La cabane est silencieuse. Quelques oiseaux pépient au dehors. Un mulot est passé devant moi tout à l’heure, inquiet et hésitant, mais je n’y ai pas touché. Je n’ai pas faim. Il m’a dit qu’il allait revenir, et je le crois.

    C’est grâce à Germain si je suis en vie. Belle avait caché sa portée dans la vieille remise, là où personne ne va jamais. Mais le vieux maître nous a trouvés. Il a tiré avec son fusil, et mes deux frères n’ont plus bougé. Alors Germain a couru et il m’a prise dans ses bras.

    " Celui-là je le garde, il est à moi. "

    Le vieux maître a crié, mais Germain s’est sauvé. Il m’a cachée quelque temps au fond de la grange, et tous les jours il venait me nourrir, me caresser et jouer avec moi. Il m’a appris  " assis ", " couché ", " pas bouger ", " viens ". Après, quand il m’a ramenée à la ferme, le vieux n’a rien dit. J’évite de me trouver sur son chemin. Il a le coup de pied facile. Plus d’une fois je l’ai vu frapper Belle juste parce qu’elle était près de lui ; Belle ne dit jamais rien. Elle me regarde de ses grands yeux très doux et elle pense " C’est le maître ". Mais moi chaque fois j’ai l’échine qui se hérisse et je me cache parce que Germain m’a dit " Non. Sage. " le jour où il m’a vue comme ça.

    Germain m’a appris à rentrer les moutons du pâturage. Il m’emmène dans le tracteur. Je me couche près de lui et je ne bouge pas. Quand il part en voiture, il me fait monter dans le coffre. C’est petit et noir, mais après on va se promener, il y a beaucoup de gens et même des chiens, et plein d’odeurs nouvelles. J’aime bien. Les autres chiens sont en laisse, parfois ils grognent, quelques uns essaient de m’attaquer. Je sais que je dois rester près de Germain. Ca ne me gênerait pas de me battre, je n’ai pas peur. Je suis sûre que je peux les coucher tous, je suis plus musclée, et je suis plus rapide. A cause du vieux maître, j’ai appris à être sans cesse aux aguets. Mais Germain parle au maître du chien, et les autres s’en vont. Après il me caresse la tête.

    " Bon chien, Moune. Très bon chien. "

    J’aime quand il dit ça. C’est meilleur que le sucre.

    Se promener sur le dur, c’est quand même moins bien que dans les bois, il n’y a rien à chasser et il y a beaucoup de bruit. Et puis il n’y a pas que de bonnes odeurs, il y a aussi des odeurs de peur et de tristesse. Mais après, Germain s’assied à une petite table dehors, et je me couche à ses pieds. Il boit la même chose que le matin, mais là ça sent plus fort, et il me donne un sucre. Ca croque et puis ça fond, c’est bon et ça rend heureux.

    Il m’a amené des croquettes et de l’eau. Puis il m’a fait sortir de la cabane et m’a laissée me dégourdir les pattes. Je me suis soulagée, sans le quitter des yeux. Je n’ai pas osé m’éloigner. Je l’ai senti tendu comme quand quelque chose ne lui plaît pas et qu’il ne sait pas quoi faire. Il n’a pas souri, mais il m’a caressée. Il faut que je l’attende encore. Ca n’a pas d’importance. Je sais qu’il va revenir.

    J’ai sauté. Je l’ai renversé sous mon poids, mais ce n’est pas un combat de chiots. Il ne frappera pas Germain. Il ne frappera plus Belle, ni le vieux Tyson qui est toujours à la chaîne. Je n’ai jamais connu ça avant. L’envie de tuer. J’ai tué des mulots quand j’avais faim, mais à la chasse avec Germain, je ramène, je ne touche pas. Le sang des lièvres et des faisans, ça sent bon, mais c’est à Germain. Il me laisse toujours les têtes et les pattes. Il est juste.

    Envie de tuer. Le vieux maître n’est pas comme Germain. Il ne parle pas, il hurle. Il ne caresse pas, il frappe. Germain esquive toujours, mais La Mère pleure. Comme Belle. J’ai vu le loup tuer des agneaux. J’ai vu le chat jouer avec des mulots et les tuer petit à petit. Ce n’est pas la même chose. Il y a quelque chose en lui de plus noir, de plus dangereux que la mort. Il ne chasse pas, il ne joue pas. Il ne ressemble pas à Germain, ni aux autres hommes que je connais. Il y a quelque chose en lui qui ne parle pas. C’est comme la foudre qui tombe. Comme le feu. Ca ne veut rien dire. C’est l’eau rouge, peut-être. Germain en boit aussi, mais ça ne lui fait rien. Il ne sent pas mauvais. Germain boit aussi de l’eau claire. Et il ne crie pas.

    C’est le quelque chose que j’ai voulu tuer. Parce que c’est dangereux.

    C’était facile. J’ai planté mes crocs dans le cou, le sang a coulé. J’ai déjà chassé seule. Quand la prise est bonne, la proie ne se débat pas.

    Germain a crié " Moune ! " , mais je n’avais pas fini. Je ne voulais pas qu’il le frappe. Il a crié encore mais je ne pouvais pas l’écouter. Il a tiré sur mon collier, il m’a poussée, il a essayé de m’ouvrir la gueule. Mais je n’avais pas fini.

    Quand le sang s’est arrêté de battre, j’ai lâché. Je me suis assise. Je l’ai regardé. Il était pâle. Il a murmuré "  Moune… " dans un soupir. Il a regardé vers la ferme. La Mère devait être encore occupée. Il a dit " Viens. Vite. " Et nous avons couru jusqu’ici.

    Je sais qu’il va revenir.

    Il veille sur moi, même quand il n’est pas là. De quoi aurais-je peur ? Avec lui je ne manque de rien. Il connaît toujours le bon sentier. Il trouve l’herbe douce pour me reposer, et l’eau paisible pour que je boive. Je peux marcher dans la plus sombre des vallées, je ne crains aucun mal, car il est avec moi. Et j’habiterai avec lui jusqu’à la fin de mes jours… Germain, la force qui me sauve, la main qui me soulève pour échapper à la mort. Ce qu’il dit est ma Loi, et sa Loi est juste. Je sais qu’il va revenir.

    Il m’a apporté encore à manger. Il a posé le fusil près de la porte. On va aller chasser, tout à l’heure, j’en suis sûre. Je vais bien m’amuser. Je rapporterai, et il sera content. On fera peut-être la sieste dans l’herbe, ma tête sur sa cuisse.

    J’ai fini de manger. Il est assis par terre, le dos contre la porte. Je viens poser ma tête sur son genou. Il me caresse. Je ferme les yeux. Je le sens triste, troublé, confus. J’ai toujours su lui rendre le sourire. Je m’assieds, je penche la tête sur le côté. Mais il ne rit pas. Il a les yeux mouillés. Il m’attire vers lui, serre ma tête contre son poitrail, me tient là.

    " Oh Moune, Moune, qu’est-ce que tu as fait… "

    Il se lève, prend le fusil. Je me lève, je le regarde, je remue la queue. Je le suivrai partout. Personne ne lui fera jamais de mal. Je suis son chien, son bon chien. Ma vie est à lui. Sa main tremble sur le fusil. Il pense des choses que je ne comprends pas, mais je suis en sécurité avec lui, je n’ai pas peur.

    Il me regarde longtemps et je le regarde. Je n’ai besoin que de lui.

    Puis tout à coup il jette le fusil à terre et s’accroupit pour me serrer dans ses bras. Il est vraiment étrange aujourd’hui. Il s’essuie les yeux.

    " D’accord, Moune. On s’en va. "

    Je monte dans le coffre de la voiture. Cette fois ça dure longtemps. Mais je suis avec lui.

     



    Nicole Cavazza :
    j'ai 55 ans, je suis italienne d'origine ; j'ai été mariée, j'ai deux enfants ; je suis pédiatre dans la banlieue de Toulouse. J'habite à la campagne avec deux chiens, deux chats, et j'ai la chance de posséder un cheval. Mes auteurs préférés sont R. Kipling, O. Scott Card, et bien entendu JRR Tolkien. J'ai toujours écrit. Mon terrain de prédilection est la Fantasy, surtout l'Héroïc. Mon rêve serait d'avoir plus de temps libre pour écrire davantage...

     


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  • Sur les quatre vingt trois nouvelles reçues au concours Calipso 2008 "Passages rebelles" vingt trois avaient été retenues par les jurés dans une première sélection. Vous connaissez les auteurs des dix nouvelles lauréates mais pas les treize autres qui les suivaient, certaines de très près. Comme ces dernières ne seront pas éditées dans le recueil 2008, nous avons proposé aux auteurs de les publier ici même. Nous commençons aujourd’hui la série avec Olivier Delau et sa nouvelle " Camions "

     

    Nous roulons vers Timimoun. Deux cents kilomètres nous en séparent. C'est un après-midi chaud, moite, tamisé.

    Nous avons à peine la force de parler. Tu parles de choses et d'autres. Je n'ai pas le courage de te répondre.

    Je n'ai que la force de lever les yeux au dessus du ruban gris de la route. La force de regarder un paysage, un ciel qui, par ailleurs, changent au fur et à mesure que nous avançons, prennent d'assez mauvaises couleurs.

    Quand ? où ? ai-je commencé de trouver cela inhabituel, inquiétant... "Tu as vu ?" ai-je demandé d'une voix un peu sourde.

    Tu t'es interrompu et tu as regardé. Devant, le ciel était de plomb. Une bande comme une lame de plomb. Un ciel d'avant l'orage dans un pays où il n'y a pas d'orages. Tu as regardé cela et tu t'es extasié. J'ai remarqué que ton visage était pâle. Comme le mien sans doute, il prenait la couleur du dehors. Couleur de verre teint ou de verre sali. Fatigue. Intérieure réverbération.

    Ce n'est qu'ensuite, dans la descente, que nous avons vu le rideau rouge, le rideau rouge mouvant. En peu de temps, il devint un mur. Ce mur sans failles, orangé, qui reliant la terre et le ciel avançait vers nous...

    - "Le vent de sable, probablement..."

    - "Non, ce n'est jamais si..."

    - "Quoi, alors ?"

    Tu secoues la tête : aucune idée.

    Nous essayons d'en plaisanter, de nous moquer de ce qui s'avance et vers quoi, plus lentement, nous roulons.

    Tu dis, en riant, que c'est l'enfer qui est là, le début de la fin du monde. Et c'est vrai que le paysage a quelque chose d'apocalyptique à cause de l'air de plus en plus soufré, du ciel de plus en plus noir. A cause des arbres dissous, des pierres qui semblent se tasser et frémir. A cause du mur avançant...

    Et tout d'un coup nous y entrons. Je te réentends parler de la trouée à gauche de la route, de la "porte". Il faut la prendre, cette porte, essayer par elle de "traverser".

    Mais déjà c'est impossible. Tout change. Nous savons à présent ce que c'est. J'ai passé la marche arrière. Ai-je voulu, en reculant, gagner de vitesse sur la tempête ? Tu as fermé nos deux vitres -et déjà nous étouffons !- mais c'est peine perdue que ces vitres fermées. Le sable qui dehors roule à la vitesse d'un train fou et qui réduit notre champ visuel à un capot, à un pare-brise, ce sable s'immisce partout, en poudre, à l'intérieur de l'auto. Il nappe le tableau de bord, nos visages suants… Et c'est peine perdue, aussi, que cette marche arrière dans laquelle je me suis lancé ! D'abord parce que n'y voyant pas un mètre en avant, je n'y vois pas non plus un mètre en arrière. Ensuite, parce que c'est dans cette position que la calandre, le moteur, sont le mieux exposés.

    Songeant à cela, je m'arrête. Et j'essaie de manœuvrer sur la route, de manière à repartir dans le sens du vent. Mais la force de celui-ci, précisément, m'en empêche. Et maintenant pourquoi le moteur se met-il à ronfler, à s'emballer ? Je ne suis plus maître de ma pédale de frein, encore moins de l'accélérateur. Je crains en outre dans cette tentative, qui nous retient dangereusement en travers de la route, je crains de sortir des limites du goudron -elles aussi effacées.

    Soudain, deux phares. Nous n'avons rien vu ni rien entendu. Qu'est-ce ? Un camion frôle de si près le côté gauche de la voiture que nous trouverons une baguette arrachée. Un camion ? Quelque chose de rouge, en tout cas. Deux phares…Le conducteur nous a-t-il seulement vus ?

    A cet instant, tu perds la tête, tu cries :

    - "Tu aurais dû le suivre. SUIS-LE !"

    - "Non... non."

    - "Pourquoi ? Il nous mène jusqu'au café."

    Finalement je parviens à m'extraire du milieu de la route. Nous soufflons... Du sable jusque sur la langue. Cheveux et visage recouverts de cette gaze que la sueur fixe à l'épiderme luisant.

    Et dehors c'est le grondement, le roulement rouge, le feu.

    - "Le café... Si encore on peut le retrouver !"

    - "Il faudra bien regarder. Il y aura certainement quelqu'un de garé. Le camion..."

    Le camion !

    - "Tu as eu peur quand il nous a touchés ?"

    Tu secoues la tête négativement. Moi non plus je n'ai pas eu peur. Pas le temps.

    Mais déjà, en face, en voici un autre, voici un autre poids lourd. "ATTENTION !"

    Ce n'était qu'une borne. Une de ces hautes bornes du Sahara que le mauvais temps déformait.

    Plus tard, bien plus tard, nous nous retrouvons au café. Sans paroles, vidés, au milieu de gens qui ne parlent pas plus que nous. De temps en temps quelqu'un se lève, va jusqu'à la porte, revient. Quelqu'un d'autre, au retour du premier, décroise les jambes, s'étire, change de position. Visages glissants, anxiété. "Mézel ?" - "Mézel !"*

    Je te regarde observer le fond de ton verre de thé. Je te vois mal dans l'ombre. Du sable jusque dans les yeux. Yeux éprouvés tout à l'heure et maintenant trop frottés. Je te regarde et je ne te vois pas. Tu étais mon ami, le seul vrai. "Mézel !"... Pourquoi ai-je eu ce serrement de cœur ?

    Ce n'est pas de cela que tu es mort, ce n'est pas ce jour-là. C'est le mois suivant, avec ton cousin. Un après-midi où il faisait très clair et très beau. Très chaud aussi. Un jour où ton cousin s'est endormi au volant.

    Un camion de plein fouet alors que l'air était d'une transparence inouïe et que l'horizon avait repris, depuis longtemps, son habituelle clarté.

    Mais de cela, bien sûr, je ne me souviens pas. Ce dont je me rappelle c'est cet après-midi de déluge, de tempête, de vent. Ce sable, cette baguette arrachée. De cela, oui, je me souviens.

    Je m'en souviens comme si c'était hier.

     

    *"Mézel" : en arabe dialectal, signifie "pas encore", "pas tout de suite".

     

    Olivier Delau

    Né à Capdenac (Lot) en 1950, j’ai publié 7 livres. La plupart sont des recueils de nouvelles. Il y a néanmoins un roman " adulte " : " Jacques et Jean " (épuisé) et, pour faire bon poids : un récit jeunesse, " Kévin le devin ", (épuisé, lui aussi)…Je fais des infidélités depuis quelques années à la nouvelle, qui a donc été ma maîtresse en titre(s) longtemps (" Clair comme la nuit " ; " Cet âge est sans pitié " plaquette ; " Partants et revenants " ; " Autres réalités ") pour me consacrer plus intensément au roman ou à l’écriture pour la scène. Je signe des critiques littéraires dans la revue " Brèves ". Enfin, touche à tout impénitent, je compose poèmes et textes de chansons.

    J’ai obtenu une bonne trentaine de prix littéraires depuis 20 ans que je joue de ma plume tous azimuts. Mes deux derniers ouvrages publiés (voir ci-dessous) le sont, du reste, à la suite d’obtention de tels prix. Il s’agit de :

    -" Diables d’homme " février 2003. Editions Editinter. Un ensemble de récits brefs sur l’amour entre hommes, le désir homosexuel. Difficultés et bonheurs… Prix de l’édition du Val de Seine 2002 et premier Prix du Salon du Livre Internet 2004

    -"  Lianes " novembre 2005. Editions Atelier du Gué. Recueil de nouvelles sur des situations " en dehors ", extra-ordinaires. Intrusion d’un fantastique de plus en plus accentué, mêlant Eros et Thanatos… Prix Missives 2005

     

    A propos de Lianes :

    Pierre rencontre par l’intermédiaire d’une agence matrimoniale la fiancée qui lui convient, et tombe du même coup sur Liane, la tyrannique petite sœur, qui n’a de cesse de supplanter son aînée dans le cœur du jeune businessman ! Ailleurs, cette liane prend le visage d’une autre enjôleuse, la femme en noir, dont la présence répétée depuis cette estivale route des vacances qui ouvre le livre, effectue d’incessants retours, dispensatrice de volupté, bien souvent. Eros et Thanatos sont toujours très proches dans les histoires de l’auteur. " Les hommes, écrit-il, n’aiment pas uniquement le corps des femmes même si c’est à la folie. Les hommes aiment la folie. " Les histoires d’Olivier Delau disent la force du désir, la sensualité des corps, la passion.


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  • Sans plus attendre parce qu’il se fait tard et que Madame Edwige est impatiente de remplir ses fiches, voici la liste des rebelles consacrés par Calipso en 2008. De son côté le jury adresse ses chaleureuses félicitations aux lauréats mais aussi à tous les rebelles qui ont bien voulu se prêter au jeu…

    1- Bernard Jacquot pour La tombe de Madame est avancée

    2- Yvonne Le Meur-Rollet pour Quelqu’un de passage

    3- Joël Hamm pour Le rosier jaune

    4- Laurence Marconi pour Un dimanche à la mer

    5- Désirée Boillot pour Sauver sa peau

    6- Philippe Arnaud pour Memento mori

    7- Patrick Denys pour Avec les anges

    8- Désirée Boillot pour La femme à Jean

    9- Sylvette Heurtel pour La peau du loup

    10- Anna Raapoto pour D’une rive à l’autre


    Rendez-vous le 18 octobre au Fontanil pour la soirée Nouvelles en fête…


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