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    Merci de faire plus que le minimum minimorum

    Ysiad

     

     

    Aujourd’hui, c’est jour de liesse au 6ème, le grand boss s’est tiré aux Zéta Zuni. Si je précise : grand boss, c’est exprès. De même qu’on doit toujours dissocier les bénéfices de l’entreprise et les intérêts individuels, on ne doit pas confondre grand et petit boss. C’est la règle numéro Un, surtout quand on crèche au 6ème étage.

    Le grand boss, c’est le type qui sort de l’ENA et qui envoie des mails en latin du type : merci de faire plus que le minimum minimorum, pour montrer qu’il a un max de culture. Le petit boss, c’est le type qui ne sort pas de l’ENA, n’envoie pas de mails en latin mais demande sans arrêt son avis au grand boss, pour flatter son ego et toucher une belle prime à la fin de l’année. Quand le grand boss n’est pas là, le petit boss met les pieds sur le bureau et s’enfonce dans son fauteuil inclinable avec le journal parce que bon, c’est bien beau le travail, bien joli et tout, mais à la longue, y a pas à tortiller, ça fatigue son homme, Courteline l’a très bien dit. A l’heure où ces lignes s’impriment sur mon écran, le petit boss roupille pendant que le grand boss attend son avion d’Air France pour les Zéta Zuni en classe Bizness, et ce joli voyage aux frais de la princesse lui rapportera des paquets de miles ou points de fidélité, bien utiles pour obtenir des billets gratuits durant les prochaines vacances avec sa petite famille.

    La vie est bien faite, surtout pour ceux qui parlent latin couramment.

    Pour ceux qui ne parlent pas latin couramment, mais qui veulent tout de même se faire bien voir du grand boss, il y a toujours la bonne vieille solution de la lèche. Au 6ème étage, Tiara Lechbien l’a bien compris, qui porte à merveille son anagramme.

    Tiara Lechbien consacre l’intégralité de ses journées à faire une super lèche ; à défaut d’avoir des diplômes et d’être capable d’écrire une simple lettre administrative sans l’agrémenter de cinq fautes d’orthographe, elle décrocherait haut la main une première place dans cette discipline. Question lèche, elle est imbattable, je puis l’affirmer. Dès que le grand boss débarque, elle hurle à pleine voix : Bonjour, M’sieur Suchaaaard ! Vous voulez un café, M’sieur Suchaaaard ? J’vous mets du lait ? Un croissant ? Combien de suc’ ? Le grand boss est ravi. Ça le flatte, toutes ces prévenances, ça le valorise, ça redore son blason à peu de frais. Il n’est pas n’importe qui, mais le grand boss, avec du personnel féminin tout entier dévoué à sa cause. Et plus, si affinités ; est-il besoin de le préciser ?

    En revanche, quand Tiara Lechbien oublie le lundi de mettre en route le chauffage dans son bureau, il la gronde. Petite étourdie ! Vous avez oublié de m’allumer mon chauffage ! entends-je parfois depuis mon poste d’observation, tout en pensant que si Tiara a oublié d’allumer le chauffage du grand boss, elle n’oublie jamais d’allumer sa libido ou ce qu’il en reste, l’énarque allant sur ses soixante-dix ans. Tiara roule des hanches sur ses talons de dix centimètres, s’encadre dans le chambranle en s’arrangeant pour offrir à Monsieur Suchard une vue plongeante sur son décolleté échancré. Elle minaude, joue des jambes, accentue l’ouverture de sa jupe, trépigne qu’elle s’excuse, qu’elle ne recommencera plus, Ouinnn ! Ouinnn ! Il s’en faudrait de peu qu’elle ne se roule par terre en implorant une fessée… Non, vraiment, du grand art

    Il ne se passe pas une matinée sans qu’elle informe Monsieur Suchard de ses déplacements dans les étages. Elle le prévient aussi en cas de besoin pressant par un tonitruant : M’sieur Suchaaaaard ! Je vais faire pipiiiiiiiii ! , dont tout le 6ème profite. Cela fait partie du comportement de Tiara Lechbien, qui cherche désespérément à attirer l’attention de Monsieur Suchard sur la couleur de ses culottes. Vu l’âge de celui-ci, y a intérêt à mettre le paquet pour le stimuler, Tiara Lechbien l’a parfaitement compris.

    La vie est super chouette, surtout pour ceux qui lèchent bien comme Tiara.

    Pour ceux qui ne parlent pas latin couramment, se refusent à pratiquer la lèche et restent tapis dans leur tanière comme des cloportes en attendant des jours meilleurs, la vie au 6ème pourrait paraître un peu rébarbative s’il n’y avait, malgré tout, des possibilités de s’en sortir, en allant explorer des territoires reculés sur Internet par exemple, ou des galeries de photos d’amis, ou encore en écrivant des récits éclair lorsque le grand boss a eu la bonne idée de se barrer.

     


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  • Chicago---La-Crown-Fontain.jpgPhoto Sylvie Dubin

     

    Les trois singes

    Sylvie Dubin

     

     

    Chacun connaît cette amusante leçon de sagesse orientale incarnée par trois singes. Le premier a ses mains sur les oreilles, le second sur la bouche, le dernier sur les yeux. « Ne rien voir de mal, ne rien entendre de mal, ne rien dire de mal », telle est la voie de la sagesse et la recette du bonheur. L’une des plus anciennes représentations connues se trouve au Nikkō Toshō-gū, au Japon. D’où viennent-ils, ces singes sages, singes songeurs aux portes des temples, que Gandhi, paraît-il, gardait toujours avec lui sous la forme de petites statuettes ?

     

    Selon le vieux culte shinto, chacun de nous héberge trois vers malfaisants, les San-Shi. Tous les soixante jours, ces odieux animalcules profitent de notre sommeil pour aller raconter au Maître du Ciel toutes les fautes, petites et grandes, dont nous nous sommes rendus coupables. Il nous en punira (à proportion de leur gravité) en chagrins et maladies qui abrégeront nos jours – ou même en mort immédiate. Lutter pour éviter l’endormissement est impossible. Reste à nous mettre sous la protection des petits singes, doubles très pratiques de nos bestioles cafteuses. Suspendus au-dessus de nos seuils ou trônant sur nos buffets, ils nous rappelleront à notre devoir quotidien ; et ce sont eux, qui, en cas de faux pas, subiront la malédiction à notre place. L’homme est malin comme un singe, et bien plus qu’on ne croit ; car ces San-Shi de substitution n’ont plus d’yeux pour voir, ni d’oreilles pour entendre, ni de bouche pour répéter le mal qu’on a fait…

     

    L’histoire des trois singes se prête à des variations moins traditionnelles. Ainsi de ce cliché pris à Chicago, bien loin du Japon et de la sagesse prudente des peuples anciens. J’ai Kikazaru qui se bouche les oreilles et Iwazaru qui se ferme la bouche. Mon troisième singe, Mizaru, n’a pu s’empêcher de regarder ; et le voilà pétrifié, mains en l’air, face au mal, au pied du mur. Les deux autres continuent leur chemin, avec circonspection. Lui seul a désobéi : il a vu le mal, s’est arrêté ; il se retourne vers ses compagnons pour les prévenir. Mais celui qui a les mains sur les oreilles ne peut pas entendre son avertissement : il est sourd ; et celui qui a les mains sur les lèvres ne répondra pas : il est muet. Il est bien seul, celui qui a vu, entendu et voudra témoigner.

     

    Dois-je me féliciter d’avoir déclenché juste à temps pour illustrer si bien cette morale ? Qui suis-je pour donner des leçons, ou plutôt qu’ai-je fait qui changera les choses ? Je revois les trois enfants noirs sous la Crown Fontain de Chicago ; je sais qu’ils ne vivent pas dans les gratte-ciel de verre et d’acier du North Side, pas plus que dans les riches demeures de la Gold Coast, sur les rives du lac Michigan. Et je me souviens d’autres gamins, jouant sur les ordures fumantes d’Antsirabe ou de Niamey. Eux aussi, je les ai photographiés. Ils se pressaient devant l’objectif, faisant le zouave à l'envi, exigeant d’être au premier plan sur la photo. Je n’oserai plus prétendre que, les ayant ainsi immortalisés, j’ai témoigné, et que cela est ma juste contribution à un monde meilleur  sauf à vous payer en monnaie de singe.

     


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    Burnout

    Patrick Ledent

     

     


    Il eut peur, soudain. Ça lui tomba sur le crâne comme si on l’avait réveillé d’un coup de marteau. Il blêmit. Le jingle du 20 heures s’achevait sur sa bouille, à droite de l’écran, à côté de l’autre, comment s’appelait-il déjà ?

    « 53 », c’était le chiffre qui clignotait à l’image. Comme en 2007. Rebelote ! C’était reparti pour un tour. Et la griserie du pouvoir le quitta à l’instant même où l’ampleur et la folie de la performance lui apparurent. Il ne vit plus que l’horreur qui l’attendait : cinq nouvelles années de gesticulations, de conférences, de voyages, de protocoles interminables et de louches négociations. Le tout sous les huées d’un ramassis de marionnettes qui ne l’aimait pas, il le savait, et d’une cour de lèche-bottes qui le haïssait tout autant. Et toute l’énergie qu’il avait dépensée pendant cinq ans lui revint en boomerang. Ça lui fit l’effet d’une foudroyante électrocution. Il sentit ses jambes mollir. Il allait tomber ! Mais on le pressait de toutes parts, si bien qu’il ne fut que balloté comme un bouchon par la marée de son staff. Il comprit qu’il n’avait jamais été autre chose : un bout de bois à la dérive. Ses érections ne lui avaient jamais appartenu. On l’avait juste repêché et on s’en était servi, le temps d’un quinquennat, pour l’ériger en totem et le brancher sur le 220. 

    Ça gueulait, on l’embrassait, on se l’entre-déchirait. Il s’ébroua, retrouva un semblant d’équilibre, s’efforça de sourire. Mais le cœur n’y était plus. Il venait de le perdre, sans savoir comment. Ça se décrochait comme ça, un cœur ? Ça vous tombait dans l’estomac et ça disparaissait comme un vulgaire repas, boulotté par les enzymes ? Il joua du coude, agacé, avant d’exploser : « Foutez-moi la paix ! ». Jamais il n’avait gueulé aussi fort. Il savait pourquoi : c’était la dernière fois. Il avait mis tout ce qu’il lui restait dans ce cri-là. Du coup, l’étau autour de lui se relâcha et il put se frayer un chemin jusqu’à ses appartements. Il avait la désagréable impression de nager debout. Il ferma la porte sans même l’entendre claquer, et son bureau lui apparut sans consistance, comme sorti d’un tableau de Dali.

    Le silence qui mura le QG derrière lui n’avait rien à voir avec la nuit. Il était bien plus dense.  À cause de tout ce monde, figé dans l’hébétude. On se regardait, les yeux ronds, à se demander ce qu’on fichait là, acteurs en perdition d’un film devenu improbable, hors de portée. Au-delà de la porte, on l’entendit pleurer. Il y eut quelques toussotements en écho, des mains sur la bouche et de drôles de petits sourires gênés, presque honteux.

    Son médecin personnel fut le premier à émerger : « Burnout » conclut-il. Son diagnostic – un seul mot, c’était ce dont on avait besoin, après tant d’autres inutiles –, fit instantanément le tour du QG.  « Ainsi donc, lui aussi…  Pourquoi pas ? Après tout, il n’y pas de raison…» « Burnout », on connaissait ça, on l’avait vécu. On avait bossé comme des bêtes. On sortait de quatre mois d’enfer.

     « Burnout », ça rassurait. Le malaise se dissipa. Du repos, c’est tout. Le médecin frappa deux fois à la porte présidentielle, sans attendre de réponse. Le chef de l’État se tenait prostré, la tête entre les mains. Le toubib lui pressa l’épaule : sans réaction. C’était sérieux, cette épaule inerte, comme débranchée.

    – Je vais vous faire une piqûre, monsieur le président.

    – Me touche pas ! Je vais bien.

    Il renifla :

    – Ça vous a fait marrer, hein ? Ça fait un bout de temps que vous attendiez ça !

    – Je ne comprends pas, monsieur le président. Pardon, votre bras, on vous attend. Vous avez gagné. Il faut préparer votre interview.

    – C’est ça, qu’ils attendent, ces cons ! Je n’en ai rien à foutre. Cette blague ! Tu me vois rempiler ? Pas question. Tout ce qui m’intéressait, c’était de les écraser. Seulement ça. Je viens de le comprendre. Marrant, hein ? D’un coup : pouf ! Tout compris. Plus rien à foutre des salamalecs, des tapis rouges, des palaces et des courbettes de rois mages. Qu’il y aille, l’autre fou, puisqu’il y tient tant. C’est vrai ça, qu’il y aille ! Tiens ! Appelle-le moi ! On va arranger ça tout de suite.

    – De qui parlez-vous donc ?

    – De l’autre, à l’écran, avec moi. Celui qui a un nom de fromage.

    – Vous délirez, monsieur le président.

    – Pas du tout ! Il la veut, ma place. Ben, qu’il la prenne ! Et tout ce qui va avec, ce con. Les électeurs que je lui ai piqués, mon gouvernement, ce ramassis d’incapables, je lui offre. Va en prendre plein la gueule, le batave. Je vais te le mettre en orbite, moi, de jet en jet, autour du monde, à serrer des pinces et à cirer des princes. Vingt mille bornes par semaine, il signe, dis ! Il signe ? Et un traité par-ci et un traité par-là. Des contrats à se chier dessus, il signe, dis, il signe ?

    – Votre bras, monsieur le président, votre bras, s’il vous plaît.

    – Tu me remises ta saloperie d’aiguille ou je te la plante dans l’œil.

    Le docteur sortit doucement, ferma la porte, repoussa la foule, intima le silence, qu’il obtint. L’instant était solennel. Le premier ministre s’avança :

    – C’est sérieux, chuchota le docteur. Je dois lui faire une piqûre. Il ne veut pas. Il est de nouveau très agité. S’il sort de ce bureau, on est foutu. Il me faut deux gardes du corps, pour le tenir.

    – Je vous trouve ça.

    Le président réélu n’avait pas quitté la chaise où il se tenait. Quand la porte s’ouvrit, il ne réagit pas. Il semblait comme endormi. Le médecin lui prit le pouls.

     Ok, j’aime mieux ça. Il dort. Qu’on nous laisse !

    On congédia les gorilles : inutiles. Le petit homme ne frémit même pas au contact de l’aiguille.

    – Qu’est-ce que je leur dis, docteur ? Dehors, dans la rue, la presse, qu’est-ce que je raconte ? s’inquiéta le premier ministre.

    – Que ça va être long.

    – Combien ?

    – Cinq ans, c’est le tarif.

     


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    Le silence intérieur

    Claude Romashov

     

     

     

    Tomber en panne d’essence ! Ce jour là, surtout. Il s’était réveillé en retard et tout se bousculait sur son passage. Sa femme n’avait pas préparé le petit déjeuner, les enfants se chamaillaient et couraient dans tous les sens. Même le chien, d’ordinaire si calme, réclamait en aboyant sa promenade matinale.

    Et maintenant la panne !

    Il bouillonnait dans son for intérieur, mais n’arrivait pas à exprimer sa lassitude.

    Il poussa la voiture au milieu des embouteillages, tout seul, sous les invectives et les klaxons impatients. Il abandonna sa fidèle et vieille amie, le long d’un trottoir à la merci des contraventions. Sans un regard pour elle, il s’enfuit en courant vers la bouche de métro la plus proche.

    Il y avait du monde sur les quais, il n’arriverait jamais à l’heure, sa journée était compromise. Quand soudain le haut-parleur grésilla.

    - Mesdames et Messieurs. Nous vous prions de nous excuser mais suite à un incident, la circulation est interrompue et ne peut être rétablie pour le moment.

    Un incident ou un accident ? Un drame de la misère, de la solitude ? Nul ne savait ! Nous vivons une époque si étrange. Nous n’avons jamais été aussi proches les uns des autres, mais toujours plus solitaires. Les médias si nombreux avaient depuis quelque temps la langue de bois. Il était dépassé, le monde lui donnait le vertige. Etait-il sûr d’avoir bien saisi, l’annonce du haut parleur dont la voix résonnait en lui douloureusement. Parfois il perdait le sens des réalités. Chose surprenante pour un comptable. Il essaya de rétablir l’ordre de ses pensées, son regard s’attarda sur les affiches des candidats en campagne. Des promesses et toujours un pays qui régresse. Le slogan qu’il avait en tête lui arracha un pauvre sourire. 

    Il devait rejoindre à tout prix son bureau où ses supérieurs l’attendaient. L’idée d’une promotion bien méritée le rasséréna quelque peu.

    Il sortit à l’air libre et se mit à marcher d’un pas vif. La ville était bien vivante et joyeuse. Le soleil perçait le tendre feuillage de mars, des odeurs de pain chaud s’échappaient des portes ouvertes. Les oiseaux s’égosillaient dans les arbres et les jolies filles enlaçaient leurs amoureux sur les trottoirs.

    Il se sentit plus léger et n’arriva finalement pas trop en retard.

    -Vous voilà enfin, Mr le directeur vous attend dans son bureau, dépêchez-vous, il s’impatiente. » 

    Il lui sembla que Melle Denis, la secrétaire lui parlait un peu sèchement.

    Il entra dans le bureau.

    - Ah, Mr Dubon, asseyez-vous ! Le directeur lui présenta son meilleur fauteuil.

    Nous sommes satisfaits de vos services dans notre entreprise, mais voyez-vous, il y a un problème dont je vais vous expliquer la nature. Nous sommes amenés à une compression du personnel pour rester compétitifs. Vous comprenez… La crise. Je suis désolé. De ce fait et malgré vos compétences, nous sommes dans l’obligation de nous passer de vos services.  Il est évident que nous saurons nous montrer généreux. Nous vous devons bien cela, vous faites un peu partie des meubles !

    Dubon resta muet. Il fallait bien que cela m’arrive, pensa-t-il.

    Désolé, il était désolé ce directeur replet à l’air suffisant et au sourire sarcastique. 

    Et lui, Dubon :

    -Vingt années de loyaux services à la comptabilité dans l’ombre d’un petit chef arriviste.

    - Vingt années passées à se taire, à aligner des chiffres.

    - Un maigre salaire.

    - Sa femme qui critiquait sans cesse son manque d’ambition.

    La fatalité l’écrasait. Il sortit du bureau en silence, rangea ses affaires en silence, brossa son pardessus, regarda au travers de la vitre les nuages qui s’amoncelaient dans un ciel de giboulée.

    La rue poussiéreuse l’attendait, les illusions s’envolaient en tourbillons.

    Il marcha vers  la station de métro la plus proche. Il y avait du monde sur les quais. Un cri déchira le fracas de la rame.

    La voix du haut-parleur grésilla :

    - Mesdames et Messieurs. Nous vous prions de nous excuser, mais suite à un incident, la circulation est interrompue et ne peut être rétablie pour le moment.

     


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    Humanisme

    Jean Gualbert

     

     

    Le RER m’emmène vers Paris, sous un ciel sans nuages. La journée sera magnifique nous sommes gâtés par la météo de ce début de printemps. Je savoure avec volupté ce coin d’Île-de-France que je traverse chaque matin, le parc de Sevran, les bords du canal de l’Ourcq, où je vais si souvent me promener avec mes enfants, mon mari. Les arbres défilent, me berçant de leurs verts joyeux qui marquent le renouveau. Le bourdonnement du train avalant la banlieue au rythme régulier des arrêts, dans toutes ces petites gares au nom fleuri, me plonge dans une sorte de somnolence euphorique. Quelle chance j’ai d’habiter une si douce région, riche d’une palette culturelle aux infinies variations, d’un terroir aux savoureux relents rabelaisiens et de traditions où le réconfort de l’humanisme le dispute aux lumières du génie. Je ne me prive jamais de profiter des plaisirs simples de la campagne autant que de ceux, plus raffinés, de la ville, toute proche. En contemplant, à travers la vitre embuée, cet univers, à la fois excitant et paisible, qui s’offre aux premiers sourires du jour, je ne peux imaginer contrée où je me sentirais plus en accord avec moi-même.

    Mais voilà, cela ne pouvait pas manquer ! D’ailleurs c’est toujours la même histoire, dès que pointent les premiers HLM. Il faut qu’une bande de jeunes monte dans ma voiture. Comme si les autres compartiments n’étaient pas encore vides, ou presque ! Naturellement, ce sont des étrangers. Leur langage est bizarre, malsain, ordurier. Regardez-les, ils s’entassent dans un coin, comme du bétail mal parqué. Ils me dévisagent, avec leur mine patibulaire, leur regard sournois et pervers, leur chevelure décolorée. Je vois très bien leur manège, je ne suis pas dupe de leurs sourires, de leur fausse amabilité. Se croient-ils innocents, juste parce qu’ils cèdent leur place à cette petite grand-mère, agrippée à son sac de toute la force de ses poignets décharné ? Un Vuitton d’un cuir bordeaux de toute beauté ! Il m’irait d’ailleurs bien mieux qu’à cette vieille bique… En attendant, les loubards m’ont repérée, ils préparent un sale coup. Ils suintent l’envie, la convoitise… Pour cette racaille, tout est bon, pourvu qu’on l’obtienne sans effort. Supporter cette ménagerie pour aller travailler, c’est tout de même scandaleux. Vivement que l’on nettoie cette populace au Karcher ! Pour moi, la mitrailleuse ferait d’ailleurs tout autant l’affaire.

    Heureusement, il nous reste le Président, toujours digne de confiance, et quelques ministres qui voient clair. Mais tous les autres, ces conseillers, ces députés, ce sont des lâches, des pleutres. Voire même des traîtres, téléguidés depuis l’étranger. Ou par les communistes. Cette engeance est partout, tapie dans l’ombre. Elle se cache, à la moindre faiblesse, elle nous sautera à la gorge.

    Enfin, nous arrivons. Sur le quai, un mendiant, ou plutôt un quêteur. Il n’est pas trop mal vêtu ; j’examine sa carte avec circonspection. Me voilà rassurée, c’est un admirateur de Brigitte Bardot, mon idole, mon modèle. Il veut rassembler des fonds pour sauver les chiens errants d’Indonésie, ces malheureux qui vivent dans l’horreur, après avoir perdu leur foyer lors du tsunami. Quelle belle œuvre, quel humanisme ! Je lui glisse quelques piécettes. D’avoir accompli ma bonne action mensuelle, je me sens légère, légère…

     


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    La fille anémone et le permis tricolore

    Lunatik

     

     

    Bleu. D'un bleu étoilé sans nuages, sombre comme les iris de Latifa. Des amants s'enlacent fougueusement, ils ont des cheveux blonds et des lèvres fines. La nuit leur appartient. Je n'invente rien, c'est le titre du bouquin que je retourne entre mes mains, dans la collection Amour & Beauté. Je le remets en rayon. Je le reprends. Je tripote sa couverture, bleue, toujours. Sans un nuage, sauf le prix au dos : 9€30, c'est pas du vol à main armée mais presque. C'est trois kilos de nouilles, quatre steaks hachés, six yaourts, deux paquets de céréales et un pot de café. Les roucoulades coûtent une semaine de bouffe au discount du coin, pas moins.
    Je parcours les premières pages. C'est nul à se pendre mais ça fait rêver Latifa, toutes ces romances bidon. J'ai beau lui dire que l'amour éternel et les orgasmes multiples dès le premier coup de queue c'est du chiqué, elle s'entête. Je repose le bouquin. Paraît que je ne comprends rien à rien. Mais je lui achète quand même toutes les nouveautés, dès leur parution. Alors elle me sourit et elle me dit que je suis un bon fils, le meilleur. Et ça me va comme ça.

     

    Blanc. Genre ivoirin, comme les dents du type à la banque qui m'a demandé de lui rendre mon flingue et mon insigne. A moins que ce soit ma visa et mon chéquier. Bref, de toute façon, il avait des dents énormes d'herbivore, qui mâchent, qui broient, qui ruminent. Placide et implacable, le gars. Il consulte sa grille : chômeur récidiviste à découvert = retrait d'un point sur le permis. Il obéit aux ordres. Il classe, il tamponne, il convoque, il confisque : revenez aux heures de bureau avec un nouveau job, du cash et vos justificatifs en douze exemplaires. Il concasse. On en ressort en tant de petits morceaux, façon vase ming post tsunami, qu'on se demande si on aura assez de thunes pour se payer la colle.

    Je repêche le bouquin avec sa couverture de tapin. Je le feuillette. Je le replace bien aligné avec les autres, sur son rayon. Je le reprends... Du rêve en papier mâché pour Latifa, pour déjouer la nostalgie qui la noue, le manque du pays, du sable, du miel. 9€30. Je le repose. Latifa n'a pas élevé un voleur. Même si je l'ai de nouveau entre les mains. Je tergiverse, je déambule. Tout vire au blanc, sous les néons, et semble passé à la chaux. Je détaille la peau laiteuse des amoureux qui n'en finissent plus de se rouler des pelles sur fond de ciel nocturne, remplacés tout à coup par la gueule enfarinée du vigile qui me chope à la sortie.

     

    Rouge. Comme son sang sur mes phalanges. Maintenant, il a le tarin de travers. Il ameute ses potes de la sécurité d'une voix nasillarde tandis qu'un planton zélé prévient le commissariat. Fallait pas essayer de me faire vider mes poches. Une fouille, et puis quoi encore ? Latifa n'a pas élevé un voleur. Fallait pas lui manquer de respect.

    La fille à la caisse m'implore gentiment de ne pas faire d'histoires. Elle dit qu'ils sont très cons et moi très loin de chez moi. Elle a une peau noire étincelante et des lèvres immenses, sanguines, qui m'hypnotisent. Sa bouche est comme une anémone qui s'ouvre, ondule et se replie au gré des mots. Je devine le murmure des vagues dans son souffle. Je nous imagine en couverture sur fond étoilé.

    Je me désape rien que pour elle, en me demandant combien de points il lui reste sur son permis. Elle me sourit ; j'ai un goût de sel sur la langue. Les vigiles m'arrêtent avant que je tombe le slip et constatent, navrés : pas plus de bouquin que de beurre au cul d'un chien. Évidemment : vous connaissez Latifa. Le flic appelé à la rescousse me rend mes papiers et mon permis Marine. Ce foutu certificat de nationalité probatoire arbore un nouveau tampon écarlate, un de plus : Retrait 1 point. Ça fait cher le nez cassé. Encore un et c'est le retour au bled direct par la première bétaillère. Je me demande si ça me laissera le temps de conclure avec la fille anémone.

     


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    100 choses à faire ou à défaire pendant une campagne électorale

    Mes résolutions et autres fantaisies du dimanche

    par Franck Garot 

        

    57.       craindre de passer du régime Dukan au régime Ducon

    58.       proposer le mandat présidentiel à 1 an pour limiter la glandouille de 4 ans

    59.       investir dans le commerce de parachutes en prévision des législatives

    60.       rappeler que le courant alternatif est plus économique que le courant continu

    61.       se réjouir du nombre de sondages : on va bientôt trouver du pétrole

    62.       se demander si toucher le pompon des gars de la Marine ça porte toujours chance

    63.       se dire qu’au moins pendant la campagne électorale, notre cerveau peut se reposer




     


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    Le petit Nico

    Jean Calbrix

     

     

    Le petit Nico s’en revient de l’école. Il traîne la savate, il tape sans conviction dans une petite boîte de conserve rouillée, il en  a lourd sur la patate. Il a son carnet de note, très mauvais, dans son sac à dos Décathlon la forme. Sa maîtresse, que les élèves appellent la grosse Louloute, lui a collé de sales notes. De plus, elle lui a donné une lettre à faire signer par ses parents.

    Il arrive devant la maison familiale, un cossu pavillon de Neuilly-la-Bourge, et il s’assoit sur les marches menant au perron, la tête dans les mains. Conchita, la bonne portugaise, l’aperçoit de sa chambre au grenier, et va avertir Madame. Elle apparaît sur le pas de la porte, en guêpière et vertugadin. Elle a abandonné la crinoline et la fraise, passées de mode.

    - Que fais-tu là, mon chéri ? Viens vite manger ton petit goûter.

    - J’ai pas faim, grogne Nico.

    - Oh, toi, tu viens d’avoir ton carnet. Rentre un peu qu’on voit ça de plus près.

    Nico hésite, puis finit par se lever, et pénètre dans la demeure. Sa mère le fait asseoir dans un fauteuil Louis XV. Elle fouille dans le sac de son fils et en tire le fameux carnet.

    - Que vois-je, mon chéri. Tu as eu zéro en mathématiques ?

    - Oui, je lui ai dit que les maths, ça ne servait à rien.

    - Mais Nico, tu en auras besoin plus tard pour calculer tes indemnités.

    - Bah, j’aurais assez de banquiers pour le faire à ma place.

    - Oui, tu as raison, il faut savoir utiliser le partage du travail. Et pourquoi ce zéro en histoire ? Tu connais quand même toutes les victoires de Napoléon.

    - Louloute ne m’a pas interrogé là-dessus. Elle m’a demandé qui était le chef des gaulois pendant la guerre des de Gaulle. Je lui ai répondu que c’était Astérix.

    - Mais non, gros bêta. C’est Assurancetourix. Tu as pourtant lu toutes les BD. Et pourquoi ce zéro en grammaire ?

    - Elle m’a demandé de conjuguer le verbe profitationner au plus-que-parfait du subjonctif.

    - Comme si l’imparfait ne suffisait pas. Et pourquoi ce 3 en géographie ?

    - Elle m’a demandé où se situait la résidence insulaire de monsieur Christophe Clavecin. Je savais que c’était en Corse à côté de chez nous, mais je n’ai pas su dire dans quelle mer.

    - Holà, qu’est-ce que c’est que ce zéro en instruction civique ?

    - Louloute m’a demandé ce qui se passerait si on travaillait plus.

    - Oui et que lui as-tu répondu ?

    - Bah, qu’on gagnerait plus.

    - C’est très bien, mon chéri. Ça méritait 20.

    - Non, elle a prétendu que ça ferait encore plus de chômeurs.

    - Elle a peut-être un peu raison.

    - Mais non, maman, les chômeurs, ce sont des fainéants. Il faut bien que les travailleurs courageux fassent le travail qu’ils ne veulent pas faire.  

    - Qu’est-ce que c’est que cette lettre ? dit la mère en fouillant un peu plus profondément dans le sac de son fils.

    - C’est Louloute qui veut que tu la signes.

    La mère lut la lettre, ses yeux allant en s’écarquillant.

    - Tu t’es encore battu avec ton ami Mouammar dans la cour de récréation.

    - C’est de sa faute. Il ne voulait pas me donner un litre d’essence pour mon quad.

    - Tu as traité Laurent de sale nègre. Ce n’est pas gentil. Tu sais bien que ce n’est pas de sa faute s’il est noir.

    - Oui mais, il cultive le cacao chez lui. Il fabrique de la cocaïne avec. C’est mon ami Bush qui me l’a dit.

    - Ah, je ne savais pas que c’était un dealer. Tiens, tu as fait installer un baby-foot à la place de la table d’auscultation dans l’infirmerie ?

    - Il y en a trop qui jouent aux malades.

    - Tu as dit au jardinier « Casse-toi pauv’ con ».

    - Il nous interdit de marcher sur la pelouse, ce bouseux.

    - Tu as jeté en l’air dans la cour des petits parachutes en papier doré avec des billes d’acier au bout.

    - C’était joli, maman.

    - Tu risquais de blesser tes petits camarades.

    - J’le ferai plus, maman.

    - Tu as invité quelques uns de tous tes amis qui t’ont élu chef de classe, à boire un pot au Fouquette. Les autres vous ont regardés, à travers les carreaux, siroter votre orangeade.

    - J’le fira…feru… ferai pu… plus, maman.

    - Tu as peloté Angéla derrière les cabinets. Ta petite amie Carla ne va pas être contente.

    - J’le ferai plus, maman.

    - Tu as dit à la concierge, au moment de son pot de retraite, que c’était scandaleux, qu’étant donné sa grande forme, elle pouvait rester à son poste encore dix ans.

    - J’le dirai plus, maman.

    - Tu as dit à ta maîtresse qu’elle gagnait trop pour ce qu’elle faisait, qu’il fallait sucrer son poste, que ça te ferait des vacances.

    - J’le dirai plus, maman.

    - Tu as crié « les étrangers dehors », au risque de faire renvoyer papa à Budapest avec un charter de Roms.

    - J’le dirai plus, maman.

    - Fais bien attention à ce que tu dis et ce que tu fais, mon trésor, lui susurra sa mère en le serrant contre elle. C’est pour ton bien que je te dis ça. Malheureusement, quand ton papa rentrera, je crains fort que tu n’échappes à la fessée.

    - J’m’en fiche bien. Je serai président de la République. Et d’abord, j’exige pour mon goûter, trois petits pains et trois verres de chocolat.

     


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    Salades à l'électorale

    Emmanuelle Cart-Tanneur

     

     

     

    Prendre une belle otage, si possible d'origine contrôlée - en cas d'incertitude sur sa provenance on pourra toujours rectifier la présentation ultérieurement. L'important est d'utiliser de bons produits susceptibles de mettre l'eau à la bouche et les larmes aux yeux.

    Les produits exotiques sont toujours les bienvenus, apportant à la recette une xénophilie de bon aloi qui pourra être réutilisé plusieurs fois avant de perdre son goût. Ainsi la Bulgarie fournit-elle de très belles otages sans trop d'acidité, ainsi que le Mexique , avec son petit côté piquant et imprévisible (libérée, pas libérée ?) et que tous les pays du Moyen-Orient en général, dont les charmes militaires restent incomparables, même si l'on n'est jamais sûr de bien recevoir sa commande en bon état (bien vérifier l'intégrité du colis et la présence de tous ses membres).

    Faire revenir l'otage – cette étape est la plus délicate et peut parfois nécessiter un peu de patience

    Assaisonner de deux ou trois pincées de suspense.

    Cuisiner l'opinion publique ne pose guère de problème à qui possède un tant soit peu d'expérience en la matière ; la retourner comme une crêpe autant de fois que possible, elle n'en sera que plus malléable. En accompagnement, on pourra prévoir quelques salades variées plus ou moins assaisonnées, un trait de Kärcher ou une larme de détail de l'histoire.

    Dresser les partis les uns contre les autres, et servir avec quelques affaires bien gratinées ou deux ou trois comptes blanchis et juste saisis.

    Une brasserie populaire parisienne vient de la mettre à sa carte cette mise en bouche électorale qui  accompagne très bien la mauvaise foi de canard très en vogue en ce moment.

     


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    Dernière volonté

    Undisclosed Recipients

     

     

    Je voudrais avant tout propos vous présenter toutes mes excuses si mon message vous semble un peu difficile à comprendre. En effet, nous ne nous connaissons pas et j’estime que je devrais échanger plus longuement avec vous avant de me confier plus avant. N’ayant plus longtemps à vivre comme un roi, selon mon politologue, j’ai jugé bon de vous tenir informé de ma dernière volonté afin que mon âme repose en paix.

    Je suis Monsieur Koni et je vis en France depuis que ma famille a obtenu un permis de séjour il y a quelques années de cela, années pendant lesquelles j’ai réussi à m'élever au-dessus du lot et à mettre au pas tout ce que le pays comptait comme populations primitives. Hélas, aujour'hui ma situation est telle que je n’ai pas d'héritiers qui vaillent. Compte tenu de mon état de santé, affreusement dégradé par une mégalomanie galopante, et malgré l'assistance d'une bourgeoise compatissante, je n’ai pu m'en fabriquer aucun qui satisfasse mon désir de pérennité.

    Selon mes chiens de garde, les jours à venir seront décisifs alors je voudrais prendre les dispositions nécéssaires pour éviter ainsi toute surprise désagréable. En clair, je voudrais vous léguer par avance Mes Restes avec l’assurance que vous saurez en faire profiter les personnes qui m'auront aimées pour de vrai.

    Ma véritable fortune se résume en effet à cette petite enveloppe charnelle mais je reste convaincu qu'elle pourra être partagée après ma disparition et combler des milliers de cœurs en peine.

    Malgré mes efforts pour les éradiquer, il existe encore quelques organisations non gouvernementales dans le pays et je ne voudrais pour rien au monde qu'elles se saisissent de la répartition de dons aussi précieux. Vous comprendrez aisément qu'une personne de mon importance ne puisse en aucun cas être remisée dans les profondeurs d'un sarcophage, fût-il orné des plus beaux apparats. Inutile de vous dire que j'enrage à l'idée que l'on se serve de mon être et de mes essences pour satisfaire les envies de grandeur du premier venu.  

    Sans vouloir vous imposer la gestion de ma dépouille, je tiens à vous instruire de mon exigence de voir qu’une part soit effectivement affectée au bien-être des personnes que mon absence indisposerait gravement. Vous pourrez bien sûr en acquérir une pour votre seul bien propre. L'essentiel restant bien entendu dévolue à la perpétuation de mon oeuvre.

    Etant dans la limite du peu de temps qui me reste à jouir de toutes mes facultés, je vous demande de bien vouloir donner rapidement suite à cette lettre d'autorité afin que tout soit en ordre le jour du grand bond en avant.

    Vôtre,

    En sa chapelle éternelle

     


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