• La fin veut les moyens


    Le 26 janvier dernier, Françoise Guérin publiait sur Mot Compte Double une " Lettre à un lecteur qui commence les livres par la fin " dont nous vous conseillons vivement la lecture avant d’entamer celle du présent billet.

     

     

    Pour poursuivre un débat très fructueux entamé sur Mot Compte Double à propos de la question " Doit-on mettre en prison les lecteurs qui commencent les romans en lisant la fin ? Jean Calbrix veut apporter sa pierre ici sur Calipso.

    Puisque c’est un phénomène d’époque de commencer à lire les romans par la fin, monsieur Yaka dit : " commençons à écrire par la fin ". Un peu simpliste ? D’accord, comme la fin veut les moyens, mettons la fin au milieu, quitte à mettre le milieu au début, ce qui, à la fin, ne laisse qu’une place pour le début.

    Pas satisfaisant ? Bon, une autre solution : ne pas écrire de fin et annoncer qu’il y aura une suite. Dans la suite - moitié moins longue que le premier tome car vous êtes fatigué, vous réservez vos forces pour l’avenir et vous ne voulez pas lasser le lecteur - ne pas faire de fin et annoncer qu’il y aura une suite (deux fois moins longue évidemment). L’indentation (*) est ainsi enclenchée. Le lecteur va courir après la fin par laquelle - oh désespoir ! - il n’aura jamais pu commencer. Feinté le pressé, le je-veux-savoir-tout-tout-de-suite, le celui-qui-met-toujours-la-charrue-avant-les-boeufs, le léger, le frivole, l’inconscient. Il n’aura la fin qu’à la fin de sa vie. Je vous vois venir, l’indentation se poursuivant théoriquement à l’infini, le lecteur ne verra jamais la fin. C’est compter sans la limitation physique du phénomène d’indentation ; le saucissonnage des phrases et des mots s’arrête forcément à un temps t. La fin sera donc une lettre. Ecrivain, choisis cette lettre la plus belle possible, il en va de la qualité de ton ouvrage, de ta notoriété et de la belle ambition que tu as de ne pas laisser le lecteur sur sa fin.

    Si malgré tout, tu as raté ta fin dis-toi bien que tu viens d’inventer, non le feuilleton, c’est déjà connu, mais le feuilleton à terme car même si tu coupes les lettres en quatre, tu finiras toujours par tomber sur le dernier atome d’encre (à condition bien sûr d’avoir encré ton bouquin dans le bon port). A bon entendeur, salut.

     

    (*) L’indentation est un processus mathématique repris par les informaticiens dans le but de programmer scientifiquement toutes sortes de choses. Exemple pédagogique : vous pratiquez le casting pour découvrir la femme canon et les candidates recrutée par petites annonces se présentent à vous. Première étape, vous les numérotez. Deuxième étape, vous les mettez en file indienne par ordre de numéro. Troisième étape, vous les faites passer à tour de rôle sur la balance. Si la balance marque plus de quarante-cinq kilos, vous balancez la candidate (mais pas la balance, elle servira encore à n+1). Si la balance marque moins de quarante-cinq kilos, vous retenez la candidate. Après ce premier tri, vous renumérotez les candidates retenues et vous les soumettez au mesurage du tour de poitrine. Si le centimètre indique moins de 90 et plus de 120, vous éjectez la candidate. Si le centimètre indique entre 90 et 120, vous retenez la candidate. Vous procédez ainsi suivant tous les critères de la femme canon. Si au bout de ces processus d’indentation, votre compteur tombe à zéro, vous n’avez plus qu’à repasser votre petite annonce pour obtenir un nouvel échantillon. Ne vous découragez pas, le succès est au bout, la gloire et les feux de la rampe avec. Les mathématiciens ont prouvé qu’après un boudin n, il y a forcément un canon n+100.


  • Commentaires

    1
    Vendredi 6 Février 2009 à 03:00
    Je n'ai rien contre le boudin, Jacques. Un bon boudin aux pommes, de la bailleuil s'entend, c'est délicieux. Par contre, j'ai horreur qu'une nouvelle se termine en eau de boudin (bien fait pour ceux qui commencent par la fin - voilà comment on retombe sur ses pieds)
    2
    Vendredi 6 Février 2009 à 12:23
    Merci, Lastrega, de ton commentaire venant avec le vent du grand large, un vent arriàre évidemment.

    Et le jabot gonflé d'orgueil,
    Voulant tout savoir avant tout
    A force d'être au bout du bout,
    Il a vécu dans un cercueil.

    A toi, Jacques
    Poètes à vos luths
    3
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    Je n'ai pas compris ce que Jean avait contre le "boudin" ?
    .
    Ils sont "Légion"  les boudins !
    .
    TIENS, VOILÀ DU BOUDIN...   VOILÀ DU BOUDIN...
    4
    Lastrega
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    Un bon boudin avec de la purée, servi à des fessaleaupodes (mollusques habitués à pratiquer des bains de siège, façon Rika Zaraï) par un sybabarite particulièrement friand de rotondités postérieurs et de pâtisseries alcoolisées au rhum ; ou même par un marlou de mer spécialisé dans la pêche à la morue... N'est-ce pas la plus belle des nirvânalyses...
    Bon, voilà que ma gagacité me reprend.... et que la chute a tourné au vinaigre.  
    5
    ysiad
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    Dis moi Jean, l'indentation, ça marche aussi pour trouver l'homme idéal ou alors il faut que je commence mon portrait robot par les pieds ?

    Tu me diras.

    Je me suis bien poilée en te lisant. Quel est l'auteur (amateur ou non) qui en achevant un texte n'a pas eu envie de mettre la fin au début et le début à la fin ?
    6
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    La pêche à la morue est un métier d'enfer,
    Disait en aparté l'infâme proxénète.
    Dès lors, il appliqua la peine au rouge fer,
    Mais la fille, échaudée, en redevint... honnête...
    .                                                                       
    .
    Ces vers ne riment à rien, mais l'essentiel est que ça rime !
    .                                                                                                                
    7
    Lastrega
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    Oyez ! Oyez ! ce petit maquereaustiche, petit poème dont chaque vers commence en queue de poisson :

    Le défilé des miss

    Lolitartes en monoclini
    Ou mannequintal en listring
    Génuflexions et soumission
    Sont toutes rouges de confusion.
    Histoire à dormir toutes nues
    Pour putecelles, fausses ingénues.

    Pas des oeufs pourris, pas des oeufs pourris... il ne faut me jeter... Par pitié ! C'était mon petit quart d'heure de folie...
    8
    Philippe
    Samedi 23 Août 2014 à 18:31
    Pas d'oeufs pourris, c'est juré, sauf si Geneviède de F...fait partie du défilé.
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