• Cette lettre ouverte requiert votre attention…


    Photo : Attitudes passionnelles, la Salpêtrière, Paris,1877, Muséum du Dr Guislain, Gent, Belgique



    Une lettre ouverte est un texte qui, bien qu'adressé à une ou plusieurs personnes en particulier, est exhibé publiquement afin d'être lu par un plus grand nombre.

    L’histoire dont il est question dans cette lettre vous la connaissez tous. Elle n’a pas commencé à Grenoble mais vous imaginez bien qu’au café comme un peu partout aux alentours cette affaire-là fait toujours grand bruit. Et comme tant d’autres histoires dont on aimerait pouvoir s’en débrouiller autrement que par la dénonciation et l’exclusion, celle-ci est devenue une affaire d’état. Une nouvelle stigmatisation qui a déjà fait valser quelques têtes. Oui, cet acte dément est impossible à supporter, la douleur est bien réelle et pourtant il nous faut rester tranquille, ne pas se laisser prendre par la peur ou la vengeance…

     

    Lettre ouverte à Monsieur le Président de la République à propos de son discours du 2 décembre 2008 à l’hôpital Erasme d’ANTONY concernant une réforme de l’hospitalisation en psychiatrie.


    Etampes, le 8 décembre 2008

    Monsieur le Président,

    Eluard écrit dans Souvenirs de la Maison des Fous " ma souffrance est souillée ".

    Après le meurtre de Grenoble, votre impatience à répondre dans l’instant à l’aspiration au pire, qu’il vaudrait mieux laisser dormir en chacun d’entre nous, et que vous avez semble t-il tant de difficulté à contenir, vous a amené dans votre discours du 2 décembre à l’hôpital Erasme d’Antony à souiller la souffrance de nos patients.

    Erasme, l’auteur de " L’Eloge de la Folie " eut pu mieux vous inspirer, vous qui en un discours avez montré votre intention d’en finir avec plus d’un demi siècle de lutte contre le mauvais sort fait à la folie : l’enfermement derrière les hauts murs, lui appliquant les traitements les plus dégradants, leur extermination en premier, quand la barbarie prétendit purifier la race, la stigmatisation au quotidien du fait simplement d’être fou.

    Vous avez à Antony insulté la mémoire des Bonnafé, Le Guillant, Lacan, Daumaison et tant d’autres, dont ma génération a hérité du travail magnifique, et qui ont fait de leur pratique, œuvre de libération des fécondités dont la folie est porteuse, œuvre de libération aussi de la pensée de tous, rendant à la population son honneur perdu à maltraiter les plus vulnérables d’entre nous. Lacan n’écrit-il pas " l’homme moderne est voué à la plus formidable galère sociale que nous recueillions quand elle vient à nous, c’est à cet être de néant que notre tâche quotidienne est d’ouvrir à nouveau la voie de son sens dans une fraternité discrète, à la mesure de laquelle nous sommes toujours trop inégaux ".

    Et voilà qu’après un drame, certes, mais seulement un drame, vous proposez une fois encore le dérisoire panégérique de ceux que vous allez plus tard insulter leur demandant d’accomplir votre basse besogne, que les portes se referment sur les cohortes de patients.

    De ce drame, vous faites une généralité, vous désignez ainsi nos patients comme dangereux, alors que tout le monde s’entend à dire qu’ils sont plus vulnérables que dangereux.

    Mesurez-vous, Monsieur le Président, l’incalculable portée de vos propos qui va renforcer la stigmatisation des fous, remettre les soignants en position de gardiens et alarmer les braves gens habitant près du lieu de soin de la folie ?

    Vous donnez consistance à toutes les craintes les moins rationnelles, qui désignant tel ou tel, l’assignent dans les lieux de réclusion.

    Vous venez de finir d’ouvrir la boîte de Pandore et d’achever ce que vous avez commencé à l’occasion de votre réplique aux pêcheurs de Concarneau, de votre insulte au passant du salon de l’agriculture, avilissant votre fonction, vous déprenant ainsi du registre symbolique sans lequel le lien social ne peut que se dissoudre. Vous avez donc, Monsieur le Président, contribué à la destruction du lien social en désignant des malades à la vindicte, et ce, quelques soient les précautions oratoires dont vous affublez votre discours et dont le miel et l’excès masquent mal la violence qu’il tente de dissimuler.

    Vous avez donc, sous l’apparence du discours d’ordre, contribué à créer un désordre majeur, portant ainsi atteinte à la cohésion nationale en désignant à ceux qui ne demandent que cela, des boucs émissaires, dont mes années de pratique m’ont montré que justement, ils ne pouvaient pas se défendre.

    Face à votre violence, il ne reste, chacun à sa place, et particulièrement dans mon métier, qu’à résister autant que possible.

    J’affirme ici mon ardente obligation à ne pas mettre en œuvre vos propositions dégradantes d’exclure du paysage social les plus vulnérables.

    Il en va des lois comme des pensées, certaines ne sont pas respectables ; je ne respecterai donc pas celle dont vous nous annoncez la promulgation prochaine.

    Veuillez agréer, Monsieur le Président, la très haute considération que je porte à votre fonction.

    Docteur Michaël GUYADER, Chef de service du 8ème secteur de psychiatrie générale de l’Essonne, Psychanalyste.


  • Commentaires

    1
    Mercredi 17 Décembre 2008 à 03:18
    Allons, Jacques, puisque tu t'intéresses aux proches des victimes interdit la circulation automobile, c'est des milliers de fois plus dangeureux que les malades mentaux représentant un danger pour autrui !
    2
    Mercredi 17 Décembre 2008 à 08:33
    Des discours simplistes à propos de problèmes complexes, les hommes politiques  n'hésitent pas à nier des années de réflexion et d'expérience pour mieux passer à la télévision.
    3
    Vendredi 2 Janvier 2009 à 22:29

    J'ai fait cinq ans d'études en psy, travaillé en psychiatrie pendant vingt ans, fait sept ans de psychanalyse, suivi d'innombrables stages, séminaires, formations sur et autour du sujet, et je sais (avec un degré raisonnable de certitude) seulement ceci : il n'est pas possible de dire que vous, toi, moi, tous gens raisonnablement sains d'esprit (certaines personnes de mon entourage pouffent...) ne commettront pas un crime lors d'une bouffée délirante. Pour autant faudrait-il préventivement nous enfermer ? Cela reviendrait à dire qu'il faut enfermer tout le monde!! Il est extrêmement commode de désigner des boucs émissaires à la vindicte populaire lorsqu'on veut gouverner : ça occupe, ça détourne l'attention, ça canalise l'agressivité...Mais c'est profondément manipulatoire, et je ne peux accorder aucune estime ni confiance aux personnes pratiquant ce genre de manoeuvres. Je trouve la lettre de ce médecin à la fois très belle dans sa facture et très juste et digne dans son propos. 

    4
    Vendredi 2 Janvier 2009 à 23:05
    Merci coline. Merci beaucoup.
    5
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Je n'ai aucun commentaire à faire :  je n'ai ni la compétence ni... le coeur à le faire... 
    .
    Une remarque seulement.
    Il n'y aurait, statistiquement, que 1% des malades mentaux jugés dangereux qui récidiveraient postérieurement à leur traitement. Cela représenterait 5 ou 6 cas par an, je crois.
    .
    Serait-ce un risque potentiel consentie par notre Société ?
    .
    Qui peut oser se prononcer sur une telle situation ?
    .
    Je pense affectueusement aux familles des malades et aux familles des victimes...  Je ne puis rien dire d'autre.
    .
    Je suis seulement très, très triste.
    .
    Bonsoir.
    6
    ysiad
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32

    "5 ou 6 cas par an" ? et pour cette poignée de récidivistes, 70 millions allongés pour contrôler les entrées et les sorties ? Y a comme un blème qq part, et c'est quoi, ce dispositif de géo-localisation pour traquer les détraqués ? Combien de détraqués en puissance ? Elle est jolie la société qui se prépare, et puis elle donne envie d'entreprendre, et quel courage manifesté dans les revirements de réforme de l'éduc' à la dernière minute ! Quelle sublime cohérence dans le discours ! Et ce beau geste sarkozien d'imposer les mains pour éviter que le feu estudiantin ne se propage, et Darcos avec la légion d'honneur à côté de lui comme un enfant de choeur, mon dieu comme tout cela est beau, et courageux.

    7
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Il ne s'agit ni de ce qui se passe au Salon de l'Agriculture, ni dans les lycées, mais de malades réels et des victimes de ceux-ci, les uns et les autres dignes de compassion...
    .
    Il n'est pas question non plus des projets hypothétiques du gouvernement, ni des propositions mythiques de l'opposition, mais de gens malades qui souffrent et de leurs innocentes victimes, aussi peu nombreuses soient-elles.
    .
    La vraie question à poser est : que faire ?
    8
    marques gilbert
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32

    Notre gouvernement actuel nous habitue insensiblement à jouer dans le sens de la répression qui serait pathétique si elle n'était dangeureuse à bien des égards. Vouloir à tout prix légiférer pour tout et sur tout, par caprice et sans concertation, revient effectivement à stigmatiser certaines couches de la population non seulement pour les marginaliser mais pire encore, pour les désocialiser. C'est un moyen comme un autre, au moment où l'état déclare à qui veut l'entendre que les caisses sont vides, de se désengager de secteurs peu rentables ou même déficitaires comme le sont de façon générale non seulement les hôpitaux psychiatriques mais aussi ceux relevant du secteur public. Il s'agit aussi d'un moyen de dégager des sommes colossales pour d'autres secteurs dont on s'aperçoit de l'impéritie mais qu'il faut néanmoins aider, paraît-il, sous prétexte de gripper la machine économique. Que rapporte un malade ? Rien et à la limite, il n'intéresse personne parce que s'il est là où il en est, c'est évidemment de sa faute. Raisonnement simpliste pouvant s'appliquer à bien des femmes et des hommes sur lequel s'appuie sans bien évidemment l'avouer, l'équipe gouvernementale. C'est effectivement une façon de rompre le lien social et aussi la solidarité nationale entre les diverses couches de population dont les unes sont indispensables aux autres pour fonctionner. Mais à qui profitent finalement les économies réalisées ? C'est aussi une autre question qui reste sans réponse.
    Bravo donc, Docteur, pour votre refus d'obéissance et bien des citoyens que nous sommes devraient faire de même.

    9
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Je ne crois pas que l'enjeu constitue un problème politique à résoudre.
    .
    EXEMPLE : Un médecin psychanaliste soigne des malades mentaux, auxquels il est très attaché, avec un taux de réussite asymptote des 100%. Il existe donc un risque minime de récidive. Tout le monde est bien d'accord sur ce point.
    Malheureusement, ce drame rarissime se réalise (et là encore les statistiques montrent un cas sur un milliard...), bien que présentant peu de chose, , au niveau de la Société.
    Mais ce "fait divers" est assimilable à une catastrophe cosmique pour les proches de la victime (votre enfant, votre mère, votre frère, votre ami...) que la perte d'un être cher anéantit.
    .
    Que faire ? Consentir à ce risque au détriment de l'individu et au bénéfice d'une réinsertion indispensable, ou protéger dans l'absolu chaque être humain, principe conduisant à l'annihilation de cette réinsertion de la grande majorité des malades, cet unique espoir de leurs proches.
    Je ne crois pas que l'on puisse sans état d'âme choisr ainsi...
    .
    Il est aisé d'approuver ou de désapprouver le Docteur Guyader, mais beaucoup plus délicat de proposer une solution humaine, faisant table rase des statistiques...
    .
    Eh oui : que faire ?

    Tel est mon avis (et... je le partage.)


    10
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Je vouslais simplement souligner qu'en déclarant :

    "La réinsertion des malades mentaux dans la vie publique est une question trop sérieuse pour devenir un simple problème passionnel, statistique ou politique..."
    .
    Que ce type de question, d'intérêt primordial, devait être dépouillé de toutes idées préconcçues, quel qu'en soit le fondement, pour pouvoir être résolue
    11
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Non, cher Jean et matheux, il est seulement question de ne pas prendre position, en un sens ou dans l'autre, avant d'avoir murement réfléchi à la question posée et, surtout, de ne pas uniquement décider en fonction des statistiques ou de la rentabilité.
    .
    L'automobile fait des miliers de morts en France chaque année, c'est exact . On ne l'interdit pas pour autant, c'est vrai...
    .
    Mais, en ce cas si je suis bien ton raisonnement Jean, pourquoi anticiper par l'arrestation de futurs terroristes, les attentats sur notre territoire faisant moins de victimes que l'automobile ? - Pourquoi s'acharner à rechercher des moyens thérapeutiques efficaces pour soigner des maladies rares, le risque mortel étant plus faible que pour les déplacements en voiture ? - Pourquoi conseiller aux parents d'être vigilents, les enlèvements mortels d'enfants étant bien inférieurs aux nombre d'accidentés de la route ? - Pourquoi... ?
    .
    À mon point de vue, prendre le nombre de victimes de la circulation automobile en tant que référence minimale de base... ne tient pas la route.


    Certains psychanalistes ont affirmé, lors de débats, qu'il était possible techniquement, et dès maintenant pour ces praticiens, de déterminer la dangerosité d'un malade mental (pour la Société et pour lui-même), donc de le prémunir non seulement contre son agressivité potentielle, mais aussi contre le suicide.
    Cette démarche demanderait une organisation thérapeutique d'un niveau élevé, donc avec des moyens financiers accrus, c'est-à-dire nécessitait un plus grand nombre de praticiens, de personnels d'ebcadrement et spécialisés.
    .
    Il n'est donc question ni de tout interdire, ni de laisser les choses en l'état, non plus, ni de mélanger les genres (du comportement des politiques lors de salons, ou de scores électoraux donnant tous les droits, etc.)
    .
    La réinsertion des malades mentaux dans la vie publique est une question trop sérieuse pour devenir un simple problème passionnel, statistique ou politique...
    .
    Ce n'est bien entendu QUE mon avis ( mais... je le partage...)
    12
    ysiad
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    La réinsertion des malades mentaux devrait être faite au cas par cas, comme pour l'euthanasie, et paf.
    13
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    C'est ce qui devrait être fait par un collège d'experts après un suivi suffisamment approfondi...
    .
    Et toc !         
    14
    ysiad
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    La Palice n'aurait pas dit mieux, et crac.
    15
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    OPPOSITION DE PHASES...
    .

    .
    Je rêve d'oiseaux noirs venant de la colline,
    Et transmute mes pleurs en roses de Corfou.
    Un monstre en s'écriant : "Cette fois, il est fou !",
    Me cache le Soleil qui lentement décline.
    .
    Un médecin prévient : "parlez-lui calmement" ;
    Des "blancs" hochent la tête en maintenant leur prise,
    "S'il tente de quitter cette vêture grise,
    De suite administrez notre médicament ...
    "
    .
    Je voudrais m'échapper pour au grand jour revivre,
    Car j'erre tout le temps dans un très long couloir :
    J'y parviendrai bien sûr, il suffit de vouloir !
    Je m'avance hésitant... comme si j'étais ivre.
    .
    Au réveil une femme est asise à-côté.
    Elle est vêtue en noir, mais son visage est blême.
    Elle me prend la main : "Maman, Maman, je t'aime !"
    Elle sourit alors : l'Amour fait sa beauté.
    .
    Je parviens à m'enfuir, j'irai tantôt chez nous :
    Partout, mais hors d'ici, je trouverai mon aise.
    Mais ? Qu'est-ce que je fais au bord de la falaise,
    La tête dans le vide, et pleurant, à genoux ?
    .
    .
    Jacques LAMY


    16
    Lastrega
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Ces alexandrins sont vraiment M A G N I F I Q U E S !... qui traduisent la tragédie de l'incommunicabilité, l'incompréhension et la solitude des êtres.
    17
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    "mais l'argent attribué, seul, n'aurait pas empêchÉ  la survenance des derniers drames vécus..."
    18
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    J'ignore tout de cette rubrique  "À-Propos"... (???)
    19
    marques gilbert
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Quoiqu'en dise notre ami LAMY, il s'agit certes d'un problème d'éthique devant être traité par des experts au cas par cas mais aussi un problème politique parce que c'est l'état qui débloque les finances. Hors, l'état se désengage en réduisant les budgets de la fonction publique dont font partie les hôpitaux, et diminue le nombre de praticiens, ce qui ne peut que créer un paradoxe rempli par du... vide. Pour le combler répondre au tout sécuritaire, il préfère légiférer d'où la réaction par cette lettre ouverte qui semble d'ailleurs faire des émules puisque des enseignants suivent le même exemple. Il est toujours plus facile de manier la carotte et le bâton plutôt que de chercher des solutions et dans ce cadre-là, je crains fort qu'il n'y en ait pas de toutes faites.
    Le risque zéro n'existe pas et tel patient réputé guéri peut être relâché dans la nature puis récidiver ou pour employer un terme plus juste, rechuter. C'est quasiment imprévisible et même avec un suivi adéquat, le risque n'est pas pour autant éliminé. La science a aussi ses limites et ne peut pas tout prévoir ni tout éradiquer.
    Il n'existe pas de véritable solution humaine ou autre à ce genre de problème qui peut seulement se traiter individuellement avec les moyens du bord, si j'ose dire. Les psychiâtres font probablement ce qu'ils peuvent avec les moyens dont ils disposent et en toute responsabilité mais ils ne peuvent être tenus à l'impossible.
    Si un poème pouvait tout résoudre, ce serait merveilleux mais...
    20
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Évidemment que les poèmes ne peuvent TOUT résoudre, et même ne solutionnent probablement (malheureusement) rien ! La Poésie n'apaise et ne conforte que ceux qui l'écrivent et/ou l'apprécient. Mais là n'est pas le problème : l'argent non plus ne résout pas tout, tant s'en faut...
    .
    CIT. : "Les psychiâtres font probablement ce qu'ils peuvent avec les moyens dont ils disposent et en toute responsabilité mais ils ne peuvent être tenus à l'impossible."
    .
    Cette réflexion, qui part d'un bon sentiment et marque le respect indispensable dû à la profession de psychanaliste, montre aussi la méconnaissance de ce qui se passe dans certains services hospitalier de ce type.
    Il suffit de connaître une famille dont l'un des proches se trouve ainsi hospitalisé, pour savoir que parfois ce malade se trouve écrasé et souvent anéanti sous une avalanche médicamenteuse "qui le calme" momentanément, permettant ainsi au personnel de vaquer à d'autres occupations de son activité. Ce n'est pas un procès opportun, il s'agit (hélas) d'une constatation.
    .
    Une actrice française célèbre a vu sa jeune soeur hospitalisée ainsi détruite à jamais par l'apport systématique de drogues.
    .
    Le praticien d'un de ces services (rares heureusement, mais ils existent tout de même) prenant la décision de libérer un patient, celui-ci ayant subi longtemps l'effet des drogues thérapeutiques, ne sait du comportement RÉEL du malade que ce que les consultations ponctuelles et les rapports infirmiers lui apprennent. Un malade trop médicalisé, finit par être psychiquement altéré et peut devenir dangereux (s'il s'en remet), une fois le traitement interrompu.
    .
    Le dernier drame évoqué, ainsi médiatisé, a révélé que ce genre de pratique, bien que rare, existait encore. Et l'argent n'a guère de rôle à jouer en ce cas, le personnel étant d'une rémunération moins élevée que le coût global des substances médicamenteuses administrées...
    .
    Bien évidemment, on m'objectera, avec juste raison d'ailleurs, que ces pratiques sont d'un autre âge. C'est parfaitement exact, mais ces méthodes perdurant parfois, l'approche du "risque 0", en ce cas, ne devrait pas trop troubler les statiticiens...
    .
    Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire en sorte d'attirer le plus possible de jeunes médecins vers vers l'hopspitalisation psychiatrique, ni augmenter les rémunérations des soignants spécialisés et leur nombre. Tel n'est pas mon propos, mais l'argent attribué, seul, n'aurait pas empêcher la survenance des derniers drames vécus...
    21
    marques gilbert
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    Nous sommes au moins d'accord sur un point, le risque zéro n'existe pas cependant, comment pouvez-vous prétendre que je ne connais rien à ce milieu ? Petite mise au point : un de mes proches amis a exercé durant une quarantaine d'années comme infirmier spécialisé en psychiâtrie et ma femme a exercé durant le même temps le même métier en secteur hospitalier public. Depuis des années, j'entends parler des problèmes que rencontrent les personnels soignants qui subissent des pressions administratives de plus en plus contraignantes contraires à leur éthique et à leutr vocation.
    A partir de statistiques et d'enveloppes budgétaires, des autorités ne connaissant rien aux problèmes spécifiques prennent des décisions et aux gens de terrain de se débrouiller avec.
    Croyez-vous que ce soit de gaieté de coeur que ces personels soignants, y compris les médecins, en soient parfois réduits à abrutir les patients ? Comme partout, il y a probablement des  gens qui s'en foutent et d'autres qui sont peut-être incompétents mais ce n'est pas la majorité, loin s'en faut. Néanmoins, lorsque les heures de garde se multiplient, que le nombre de patients augmente, que les équipes se réduisent, il s'installe une usure, une fatigue. Comment voulez-vous que la qualité des soins n'en patissent pas ?
    Toutefois, toutes les conditions pourraient être réunies que des drames tels que celui qui s'est produit pour la soeur de Sandrine BONNAIRE ou pour ce jeune étudiant assasiné ou encore pour les deux infirmières paloises tuées voilà quatre ans, ne peuvent pas être empêchés. Cela fait partie de l'imprévisible qui pourtant suscite des réactions démesurées et des interventions de l'état intempestives sans aucun fondement.
    Notre président voudrait-il aussi dompter l'impondérable ?
    22
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    "Depuis des années, j'entends parler des problèmes que rencontrent les personnels soignants qui subissent des pressions administratives de plus en plus contraignantes contraires à leur éthique et à leutr vocation."
    .
    Je suis d'accord avec vous sur ce point. En ce qui me concerne cela fait quarante ans que j'en entends parler, et bien d'autres d'autres gouvernements avant e ce dernier ont éludé ce terrible problème. Georges POMPIDOU qui dirigeait la France à cette époque (Nicolas Sarkozy avait 12 ans et François Mitterant était âge de... 52 ans) "en avait bien conscience"... et il s'est arrêté là.
    .
    .
    "A partir de statistiques et d'enveloppes budgétaires, des autorités ne connaissant rien aux problèmes spécifiques prennent des décisions et aux gens de terrain de se débrouiller avec."
    .
    Ne pas prendre de décision quand un cas nécessite une réflexion urgente mais approfondie tout de même, ou en prendre, parait-il, hâtivement de mauvaises : quelle différence ?
    .
    "Croyez-vous que ce soit de gaieté de coeur que ces personels soignants, y compris les médecins, en soient parfois réduits à abrutir les patients ? Comme partout, il y a probablement des gens qui s'en foutent et d'autres qui sont peut-être incompétents mais ce n'est pas la majorité, loin s'en faut."
    .
    Que certains médecins en soient effectivement réduits à cette ultra-médication, je l'admet volontiers, mais d'autres sombrent aussi parfois dans la falicité et je parle en connaissance de cause.
    En ce qui concerne le personnel soignant (quelle que soit la nature du traitement et quelle que soit la maladie) j'ai pu constater personnellement (hélas !) qu'il était en majorité au-dessus de tout éloge, tant par la compétence que par le dévouement, voire la compassion.
    Mais, quand le bugdet médication d'un hôpital excède le coût salarial du personnel, on est en droit de se poser la question poursuoi plus d'argent ? Pour plus de médication ?
    .
    Ainsi que je l'ai déjà dit, j'ai assisté à un débat au cours duquel des psychanalistes ont affirmé qu'il était possible techniquement, et dès maintenant, de déterminer la dangerosité d'un malade mental (pour la Société et pour lui-même), donc de le prémunir non seulement contre son agressivité potentielle, mais aussi contre le suicide, tout en admettant que le risque zéro n'existe pas (même lorsque vous sortez votre chien, si vous en avez un, le soir...
    Je sais que d'autres praticiens que le Docteur Guyader ne partagent pas sa façon de voir et je reste persuadé que le dernier drame évoqué était, en l'état actuel de ce secteur hospitalier, évitable. Et cette constation est amère ayant coûté la vie à un jeune étudiant qui passait par là !
    .
    Je ne cherche pas à vous convaincre, Gilbert Marques (vous avez vos convictions et moi les miennes), mais je vous dis franchement ce que je pense, tout simplement... Nous avons visiblement des données et informations différentes, cela est certain.
    .

    23
    marques gilbert
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32

    Vous avez tout à fait raison sur le fait que le personnel soignant est au-dessus de tout éloge pour son dévouement et sa compétence mais il a aussi des limites humaines au-delà desquelles il ne lui est plus possible d'agir avec l'objectivté nécessaire, la sérénité indispensable et la lucidité adéquate. Vous dites malheureusement savoir de quoi il en retourne. Je suppose que vous avez à faire avec le corps médical et je peux aussi en parler en connaissance de cause puisque je vis avec un cancer depuis une douzaine d'années.
    Je comprends bien que vous n'essayez pas de me convaincre mais de me communiquer vos idées sur le sujet. Vous avez pour votre part, une vue à la suite d'informations. Pour ce qui me concerne, j'ai un avis de gens le vivant de l'intérieur comme je vous l'expliquais. Ces points de vue peuvent être difficilement identiques, je le conçois, mais pas incompatibles.
    Lorsque je parle des moyens et que je tape sur les autorités, cela englobe également une bonne part des gouvernements précédents qui ont contribué au basculement de la qualité des soins du public vers le privé. Ce n'est d'ailleurs pas tant un besoin d'argent que d'une meilleure répartition des moyens dont ce secteur a besoin. Disons que les mesures préconisées par le gouvernement actuel n'arrangeront rien et n'iront surtout pas dans le sens que vous défendez, la prévention.
    Vous insistez sur le fait que ce dramatique fait divers aurait pu, selon un médecin spécialiste, être évité. Peut-être y a-t-il eu mauvais diagnostic ou erreur médicale dans ce cas précis mais franchement, je ne le crois pas. Toutes les mesures sécuritaires peuvent a priori avoir été prises, il n'y aura jamais un risque zéro absolu sauf à s'en remettre à la décision présidentielle de boucler tout le monde indéfiniment auquel cas, c'est la moitié de la population de notre pays qu'il faudrait enfermer. Que des pistes nouvelles soient ouvertes, que certaines réformes interviennent afin que les choses avancent, je crois que tout le monde peut l'admettre et c'est même souhaitable mais il y a certaines manières de le faire. En l'état actuel, il ne me semble pas que ce soit en légiférant sans aucune concertation avec les professionnels des différents secteurs que des solutions adéquates peuvent être trouvées.

    Une loi reste une loi. Elle peut être bonne à un certain moment et mauvaise ensuite. D'autres le sont dans le temps et d'autres mauvaises dès le début. Pour moi, le citoyen n'est pas un soldat. Il doit pouvoir garder son libre arbitre et y adhérer si elle lui semble juste ou bien refuser de l'appliquer si elle lui paraît injuste. C'est en ce sens que comme le médecin signataire de cette lettre ouverte, je prône également la désobéissance civile en certaines circonstances. Pour reprendre d'ailleurs un passage d'un de vos commentaires à l'un de mes précédents propos sur la Poésie Engagée, je n'engage personne à aller défiler pour protester mais seulement à user des voies légales pour contester parfois systématiquement certains textes qui sont fondamentalement liberticides. J'ai usé sinon abusé de ces voies de recours et j'ai toujours obtenu gain de cause. Petite précision au passage, j'ai eu durant une quarantaine d'années des responsabilités syndicales dans le secteur social...
    J'en termine en vous informant répondre du reste à votre commentaire auquel je fais allusion dans un nouvel A Propos.

    24
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    "En l'état actuel, il ne me semble pas que ce soit en légiférant sans aucune concertation avec les professionnels des différents secteurs que des solutions adéquates peuvent être trouvées."
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    Si ces médecins spécialistes arrivaient déjà à s'entendre entre eux sur des suggestions et préconisations à faire auX gouvernementS, au lieu de rivaliser (et se "manger le foie" en permanence), les choses avanceraient plus vite et... mieux.
    .
    La désobéissance civile suivie par les uns et ignorée par les autres ne présente pas grand intérêt, et révèle seulement le caractère contestataire d'une partie du corps médicale et non l'intention de présenter un pannel de propositions, notamment quant à la répartition des moyens, ce que vous évoquez par ailleurs.
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    Il serait préférable que les patrons d'hôpitaux spécialisés formulent unanimement et au grand jour un programme de mesures chiffrées, tout en réduisant le caractère dispendieux lors d'achat de médicaments onéreux, efficaces parfois, mais trop souvent superfétatoires...
    25
    LAMY Jacques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    il n'est pas possible de dire que vous, toi, moi, tous gens raisonnablement sains d'esprit .... ne commettront pas un crime lors d'une bouffée délirante. Pour autant faudrait-il préventivement nous enfermer ? Cela reviendrait à dire qu'il faut enfermer tout le monde!!
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    Bien évidemment Nicole, mais est-ce bien le sujet de la lettre du Docteur Guyader ? Franchement je ne le crois pas : relisez ce document, vous verrez...
    .
    Non, car , il ne s'agit pas de gens dits "normaux" pouvant un jour, éventuellement, "péter les plombs", mais d'individus (relativement rares en proportion de la population concernée, je le concède), ayant déjà commis ce crime
    .
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    Il est extrêmement commode de désigner des boucs émissaires à la vindicte populaire lorsqu'on veut gouverner : ça occupe, ça détourne l'attention, ça canalise l'agressivité...Mais c'est profondément manipulatoire, et je ne peux accorder aucune estime ni confiance aux personnes pratiquant ce genre de manoeuvres. Je trouve la lettre de ce médecin à la fois très belle dans sa facture et très juste et digne dans son propos.
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    Votre discours, Nicole, concerne les FUTURS malades mentaux et non ceux, déjà l'objet de soins, susceptibles de récidives, ce qu'évoque justement le Docteur Guyader. Ce grand spécialiste ne parle ni de Vous ni de moi, Nicole (enfin surtout pas de Vous...
    . )
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    À mon avis de non-spécialiste, en ayant écouté quelques exposés de ces professions (parfois d'avis diamétralement opposés, d'ailleurs), il ne faudrait pas généraliser la dangerosité des malades mentaux. Mais, pour certains psys, il est actuellement possible par un suivi sérieux des malades, de déterminer ceux ayant un potentiel caractérisé de rechute.
    .
    Doit-on, dans le doute (récidivera-t-il ou ne récidivera-t-il pas ?), laisser des malades (potentiellement dangereux à une grande probabilité), sans soins, errer à l'aventure au risque de commettre de nouveaux actes irréparables ?
    .
    Ce ne sont ni les psys, ni, a priori, les êtres qui leur sont chers qui risquent d'être victimes, mais bien d'autres membres, tout aussi innocents, de notre société.
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    De plus, de l'avis même, de l'ensemble des spécialistes dont j'ai entendu les exposés, il s'agit de cas presque rarissime propotionne!lement à la population globale et
    très, très peu nombreux parmi les mlades de ce type...
    ..
    Peut-on sincèrement risquer mort d'homme (ou de femme, bien sûr ! Enfin, bon...) pour avoir accordé quelques temps de liberté à des malades dont on ne pouvait pas ignorer le niveau de démence ?.

    Non, vraiment, même si j'exprime une grande compassion pour des malades, en proie à de grandes souffrances, incontestablement, je ne peux partager cette prise de risque, aussi faible soit-elle, pour noptre société.
    .
    Bien sûr, on m'objectera : "et les accidents d'automobiles ?", etc... et je dirais aussi : et les guerres ?
    .
    Pensez-vous qu'une mère se soucie de savoir si son enfant est, ou non, l'unique victime d'un crime, et, dans l'affirmative, que cela puisse apaiser son chagrin ?
    .
    Il n'est pas question de jeter l'opprobe sur qui que se soit, et surtout pas sur le corps médical dans son ensemble (milieu que je connais plutôt bien..., moi aussi), mais de ne pas prendre les choses, sujets à réflexion, à la légère (tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles..)

    26
    LAMY Javques
    Samedi 23 Août 2014 à 18:32
    De plus, si, comme l'affirme Nicole, il est actuellement impossible de prévoir à l'avance avec une relative certitude le comportement ultérieur d'un individu, je ne vois pas ce que davantage de moyens financiers apporteraient de sécurité aux décisions des psychiatres...
    .
    En ce cas, comment l'apport d'argent réclamé par le Docteur Guyader pourrait-il pallier à l'insuffisance des connaissances du moment ?
    .
    Soit, que les médecins aient déjà la possibilité d'anticiper les "bouffées délirantes", et on voit mal ce que des moyens financiers supplémentaires (sans nouvelles répartition, ce qui est un tout autre problème) apporteraient de tranquilité à la Société,
    .
    soit, les connaissances psychiatriques sont encore trop limitées pour permettre aux médecins de se prononcer sur de tels cas, et des moyens nouveaux n'apporteraient aucune tranquilité, à moins d'exiger plus d'enfermement sécuritaire ou plus de médicaments psychotropes (dont on abuse encore trop souvent) ce qui n'est pas non plus une solution, ni même seulement tolérable...
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