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    Bella ciao, version originale des mondine

     

    8 mars 2011, le jour des 700 au café célébré par Dominique Guérin, Corinne Jeanson, Laurence Marconi, Claude Romashov, Yvonne Oter, Ysiad.

     

    Le sourire de Bastienne de Dominique Guérin n'est plus en lecture libre ; merci de contacter l'auteure. 

     

     

    Poème texto

    par Corinne Jeanson

    Mes pans C se gonflaient d'L
    quand dans ta bouche tu sues C mon vit
    G M hais TBZ de feu
    tu étais gaze L
    et soignais mes fêlures
    jamais APZ du désespoir de vivre
    NMI du désir

     

     

    Bloody Sunday

    par  Laurence Marconi

     

    Dimanche 5 novembre

    J’ai le moral à zéro. Bloody Sunday … pas vraiment sanglant mais un fichu dimanche quand même. J’en ai assez de ces amants de pacotille, de ces hommes qui brillent, dans mon cou, autour de ma taille, comme des bijoux dernier cri… Je veux du lourd, de l’or 18 carats, je veux investir sur l’avenir : un compagnon qui dure, qui résiste aux caprices de la mode et à l’usure du temps…

    Jeudi 9 novembre

    Jeudi noir, Black Thursday… C’est la crise, je craque. Marc m’a fait une vraie scène de jalousie. Il a appris ma brève liaison avec Bruno du service marketing. Ils sont copains de machine à café et déballent leur tableau de chasse, le matin, en noyant leur nuit blanche dans un café noir. Pitoyable …

    Vendredi 10 novembre

    C’est décidé, je fais vœu de chasteté. Sainte Annie, c’est moi. Bon, soyons réaliste, disons que je fais une trêve, un Ramadan païen, un Carême en novembre. J’ai connu des mardis trop gras, une période de jeûne s’impose. Ce matin, j’ai rencontré Marc à la photocopieuse, il semble s’être calmé…

    Mardi 14 novembre

    Et voilà, il suffisait d’y croire : j’ai rencontré l’âme sœur ! Je l’ai su au premier coup d’œil. C’est LA perle rare, le tailleur sur mesures. Il me va comme un gant ! Il est attentionné, prévenant, romantique… Il me fait la cour à l’ancienne (roses rouges, dîner aux chandelles) et l’amour à la carte, pas de menu fixe, ni de plats imposés : un vrai délice … Ah, oui, j’allais oublier, il s’appelle Antonin.

    Jeudi 16 novembre

    Antonin est devenu un accessoire… indispensable. Il me colle à la peau. En fait, je crois bien que je l’ai dans la peau …

    Vendredi 17 novembre 

    Je suis sur un petit nuage …

    Lundi 20 novembre 

    Le lundi au soleil … Ce soir, on a fêté l’anniversaire de notre rencontre, ça fait déjà une semaine. Ça y est : record battu !

    Mardi 21 novembre 

    Pardonne-moi, gentil journal, si je passe en coup de vent, ma vie est un tourbillon…

    Mercredi 22 novembre 

    Notre première dispute, j’y crois pas ... même pas envie de te raconter.

    Vendredi 24 novembre 

    On est allés au ciné. On a vu le dernier Woody Allen. Jusque là, rien à dire. C’est quand il m’a raccompagnée à la maison que ça s’est gâté : il n’a pas voulu monter, c’est la première fois…

    Dimanche 26 novembre 

    Bloody Sunday, comme au " bon " vieux temps. On n’a pas arrêté de se disputer, pour un oui, pour un non : plus souvent pour un non que pour un oui, d’ailleurs. Il a voulu qu’on se fasse un plateau télé devant le match de foot, t’aurais dit oui, toi ?

    Lundi 27 novembre 

    Les lendemains qui déchantent… finalement, on en a vite fait le tour, de la carte … Et le plat du jour, c’est souvent le même … les roses rouges des premiers jours fanent dans un vase. Quant aux dîners en amoureux … ma chandelle est mor-te …

    Mardi 28 novembre 

    Il est parti. Encore un échec, lourd et mat …

    Mercredi 29 novembre 

    Les amours mortes se ramassent à la pe-lle. Et moi, je suis à ramasser à la petite cuillère ! Je relis Bridget Jones, c’est un peu ma grande sœur… Martine, ma copine qui travaille à la compta, m’a conseillé un site de rencontres sur Internet. C’est comme ça qu’elle a connu Victor. Après tout, pourquoi pas …

    Jeudi 30 décembre

    Mon ordinateur ronronne jour et nuit dans l’angle du salon. Moi qui ai toujours eu horreur des chats, me voilà accro à un chat électronique !

    Vendredi 1er décembre 

    Premier jour de l’Avent. Avent - Avant, avant quoi d’ailleurs ? Faut pas t’attendre à recevoir un amoureux enrubanné au pied du sapin, ma fille !

    Dimanche 3 décembre 

    Ce soir, j’ai rendez-vous dans un café. Avec Miguel. Ça fait trois jours qu’on discute par emails et entre nous, le courant passe : je suis toute électrique ! On n’a pas échangé de photos. Ça va être la surprise du chef ! J’ai passé trois heures à choisir ma tenue : ça sera chic et choc!

    Mardi 5 décembre 

    Bloody Sunday : un vrai désastre … je suis pas allée bosser. Au fond du gouffre. Je traîne du canapé au lit depuis dimanche. J’étais en avance. J’ai commandé une bière. Il était presque 18h00. J’étais impatiente. Impatiente et anxieuse. Je fixais la baie vitrée et la porte, je n’avais aucun indice pour reconnaître Miguel. Je ne connaissais ni son visage, ni sa voix. Pourtant, il me plaisait. Quand il est entré, c’est comme si j’avais reçu un ballon de football en pleine face. Miguel, c’était un pseudo … bien sûr… C’est avec Antonin que j’avais rendez-vous …. Match nul, vraiment nul … Balle au centre….

      

     

    La scène

    par Claude Romashov

     

    Elle est là tapie derrière un bosquet. Elle l’a suivi. Son père adulé a rejoint ses camarades en uniforme sur la place puis ils se sont éloignés en plaisantant. Elle qui a l’art de passer inaperçue auprès des grandes personnes les a d’abord vus débusquer des caves une poignée de gens effarés. Ils sont sortis du village et, dans un champ à un kilomètre environ, ils les ont attachés deux par deux. Malgré les pleurs et les supplications, ils ont visé avec leurs fusils…

    Elle a huit ans. Le ciel sans nuages de l’enfance vient de vaciller…

    La scène est exiguë et sent la sciure, elle aime bien jouer dans ce petit théâtre parisien, aller à la rencontre de son public. Juste une chaise pour accessoire et sa seule présence sous la lumière crue des projecteurs. Elle entend les bruissements dans la salle, respire un grand coup pour endiguer le trac qui lui noue la gorge et les entrailles. Chaque soir c’est la même chose, elle à l’impression de se jeter dans l’arène, de rejouer sa vie.

    Quelle émotion quand les applaudissements montent des travées. Le rideau se ferme. On la rappelle. Des vagues d’amour la portent. Elle a toujours voulu être comédienne, voulu sortir de son ventre les mots des grands tragédiens pour les projeter loin devant et en ressentir le choc assourdi. Sentir la présence du public, le brouhaha de la première et même tolérer les critiques, ces vautours déplumés de talent, toujours élogieux envers elle.

    On l’aime. Elle ne laisse personne indifférent, on aime sa voix où pointe un zeste d’accent guttural. Ses amants vénèrent sa silhouette longiligne, son visage marmoréen démenti par un regard qui transperce l’âme. Peut-être, mais ces hommes qui lui déroulent le tapis rouge, l’encensent et la couvrent de cadeaux se révèlent inconstants et infidèles. Du plus loin qu’elle ne se souvienne, elle n’a jamais eu d’histoire longue et sérieuse. Juste des amourettes, quelques liaisons plus sérieuses mais pas d’engagement pas de promesses et pas d’enfant. Elle tient à distance tous les flagorneurs qui gravitent autour d’elle, avides des retombées de la gloire. La vacuité de ses amours l’étonne même si elle comprend bien qu’elle n’a jamais beaucoup donné d’elle-même, que sa capacité d’aimer appartient à la scène. Entrevoir des visages, serrer des mains, recevoir des gerbes de fleurs, voyager sur tous les continents. La fuite, toujours la fuite pour ne plus voir le regard bleu posé sur elle, le regard de son père. L’assassin brutal du champ de luzerne. Ce soir le souvenir brûlant brouille ses yeux, des sanglots remontent de l’enfance. Elle, la fille du bourreau. Elle se rappelle le départ précipité après la guerre, l’arrestation du père, la santé fragile de sa mère, et puis le désir très fort de se dédoubler, d’entrer dans une autre peau. Comme si elle effectuait une mue chaque soir sur scène.

    La nuit est tombée dans les coulisses, il fait froid dans sa loge. Elle remonte sur la petite scène. Le théâtre a éteint ses lumières, elle a gardé la clé de l’entrée des artistes. Le spectacle est terminé. Elle se sent tellement vide et seule…

    Demain elle repartira en tournée, rôder sa nouvelle pièce. Dans son métier elle est entourée. Elle a beaucoup d’amis, d’amoureux éconduits et depuis quelque temps une bande d’homosexuels la suit dans tous ses déplacements. Alors elle sera désirée, aimée pour une fois encore. Elle s’imprègnera des vivats de la foule, de l’odeur de chien mouillé des manteaux de fourrure, S’amusera des entrechats maladroits des porteurs de bouquets dans la loge. Toute cette légèreté qui compose et enrichit sa vie…

    Ils essaient de fuir, de courir entravés par les liens, dans le champ de luzerne. Son père et ses camarades rient grassement car leurs victimes juives n’ont pas d’échappatoire. Elle tremble de tous ses membres, tapie derrière son bosquet mais elle veut voir, elle ne peut s’empêcher de regarder. Comme elle veut regarder la progression lente du doigt sur la gâchette, sentir l’odeur de poudre avant de tomber dans la sciure sur la scène du petit théâtre parisien…  

    L’accessoiriste, cet idiot lui a donné un revolver factice… Elle balance l’objet avec colère. Elle lui avait pourtant bien spécifié qu’elle voulait une vraie arme pour la crédibilité de la scène de suicide dans la pièce. Pour sa part, elle n’a jamais eu l’envie d’effectuer le grand saut sauf ce soir… Elle éclate d’un rire douloureux. Pas si facile de franchir le pas. C’était encore du jeu. Elle n’a pas le droit de mourir puisqu’elle appartient à son public. Sa vie est une tragi-comédie qui dure depuis quarante ans, le bel âge pour une nouvelle amourette ! Demain elle emmènera dans ses bagages le jeune et bel amant qui ne la quitte pas de ses yeux humides de biche.

     

    Rouge balises

    par  Yvonne Oter

    Ma mère me promenait souvent et longtemps dans mon landau. Quand, de ma position allongée, j’apercevais la pompe à essence rouge du garage voisin dépassant des bords de ma nacelle, je savais que la maison était proche et que nous serions bientôt rentrées. Longtemps, le rouge a été associé à l’odeur agressive du carburant, qui me plaisait assez, douçâtre, insidieuse, prenante.

    Le rouge a ponctué toute mon enfance de ses taches chaudes. Rouge de la pomme d’amour croquée avec délice entre deux tours de manège. Rouge du feu de charbon qui grondait dans la cuisinière en se riant des froidures extérieures. Rouge des camions de pompiers hurlant sur la route pour assurer la sécurité des gens et des biens. Rouge du soleil couchant qui illuminait ma chambre à l’heure où le sommeil m’emportait.

    Puis j’ai appris à me méfier du rouge. Rouge affolant de mon premier sang qui m’a laissé désemparée. Rouge inquiétant de l’encre dont les maîtres annotaient mes copies. Rouge trop brillant des lèvres qui me donnèrent mon premier baiser et rouge déchirant du premier chagrin d’amour.

    Le rouge-sécurité laissait la place au rouge-bourreau, capable de blesser et de faire très mal.

    Après l’adolescence, vint le rouge-coupable. " Feu rouge, on ne passe pas. " Rouge toléré en touches discrètes, sur des vêtements sobres et de bon ton. Place désormais au beige, au grège, au gris perle, au bleu marine, au vert sombre, au marron, parfois même au noir. De la classe ! De la distinction !

    Mais rouge cerise pour la première robe de grossesse, tant le bonheur qui grandissait en moi avait besoin de s’afficher aux yeux du monde de manière éclatante.

    Le blanc a envahi mes cheveux, gommant petit à petit leurs reflets sombres. Il est arrivé le temps de revenir vers mes anciennes valeurs. Le rouge a entamé mes convictions et entreprend de reconquérir son espace. Discrètement, par petites touches. Parfois, je le freine en tentant de lui imposer des nuances rosées. Rien n’y fait, il investit de nouveau ma vie. Rouge-regret, rouge-espoir, rouge-avenir. Rouge qui me dit qu’il ne faut plus tergiverser, qu’il faut oser, foncer, sans calculer. Qu’il n’est pas trop tard mais qu’il est temps. Rouge du demain qui est déjà presque arrivé.

    Rouge-bonheur de la maturité accueillie avec amour.

     

     

    Dans les couloirs de l’entreprise

    par Ysiad

     

    Dans les couloirs de l’entreprise

    Le chemin est long et les infatués nombreux

    A exercer leur emprise

    Tyrans déguisés en supérieurs hiérarchiques

    Cadres surpayés n’en fichant pas une

    Beaux habits, beau manteau, costume-cravate, Borsalino

    Avantages à tire-larigot

    Filant à l’anglaise par les portes de service

    Faire les soldes de quatre à six

    Quand le Big Boss est en voyage

    Pour voir du paysage

    Déléguant corvées et pensums

    Travail vient de Tripalium

    Merci de faire plus que le minimum minimorum

    Appelant du mobile

    Pour demander si ça avance

    Disposant du droit d’ingérence

    Et de l’art de la courbette

    Ronds-de-cuir experts en ronds-de-jambe

    Mon cher Président,

    Bien chère Madame, très cher Monsieur,

    Avec mes sentiments les plus respectueux

    Petits messieurs bien propres sur eux

    A qui il faut rendre des comptes

    Que faisiez-vous à telle date ?

    Où étiez-vous à telle heure ?

    Courriels exigés pour justifier une absence

    Bien à l'avance

    Beaux habits, beau manteau, costume-cravate, Borsalino

    Petits tyrans pourris derrière les apparences

    N’ayant de comptes à rendre qu’à eux-mêmes

    Dans les couloirs de l’entreprise

    Le chemin est long et les infatués nombreux

     


  • Commentaires

    1
    Mardi 8 Mars 2011 à 13:50

    merci Ysiad, de ce coup de gueules/humour aux vagues hiérarchiques, méfions-nous, à ce petit jeu, les femmes zossi, quand elles zont le pouvoir peuvent en abuser, ne nous trompons pas de cible et gardons nos émois pour les zommes accomplis ! ça existe ? faut peut-être leur consacrer une journée de libération de l'Humanité. 

    2
    ysiad
    Samedi 23 Août 2014 à 18:18

    Certes, Corinne, seulement ici je n'évoque que ce que je vois et à quoi je suis confrontée. Pas de femmes leader, ici. Pas encore. Et je ne suis pas près de le devenir!

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