• Les cent premiers jours après la fin du monde, 73

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    La fin du monde a bien eu lieu.

    Yvonne Oter

     

     

    On ne s’en aperçut pas tout de suite. On était bien trop réjoui de voir que les Mayas avaient raconté des bobards.

    Des bobards ? Pas pour tout le monde…

    C’est Jules d’abord qui s’en étonna.  La peau de son crâne ne le démangeait plus. Comme il avait ce que l’on appelle « un cheveu à poux », il promenait ces hôtes sur la tête depuis qu’il fréquentait l’école. S’il n’y en avait qu’un qui traînait dans l’établissement, c’était couru d’avance, il était pour lui.

    Jules en avait tellement pris l’habitude que le manque de démangeaisons le perturba. Il demanda à sa mère de vérifier l’état de son cuir chevelu et la brave femme manqua tomber à la renverse : plus une bestiole, plus la moindre lente latente. Elle s’effondra en larmes tant l’émotion la bouleversa.

    « Tu vois, mes prières à Sainte Rita, patronne des causes désespérées, ont porté leurs fruits ! »

    Puis les informations vinrent, via la presse, la télé, internet, confirmer que Sainte Rita n’avait rien à voir dans l’affaire. Le 12 décembre 2012, à 12 heures 12, les poux avaient disparu de la planète, tous en même temps, sur la tête des propres, des sales, des soignés, des négligés, des blancs, des jaunes, des noirs, des rouges et des autres.

    Des millions de mères entonnèrent des actions de grâce sur tous les continents. Elles qui n’avaient jamais pu se rendre maîtres du fléau que les Mayas avaient réussi à éradiquer en une fraction de seconde ! Certains gamins continuaient bien à se gratter, par habitude, mais les choses allaient s’arranger, cela leur passerait.

    Des gens qui ne riaient pas, c’étaient les fabricants de shampooings anti-poux et de peignes fins anti-lentes, les dermatologues et autres capilliculteurs. C’était leur fond de commerce qui avait disparu. Qu’allaient-ils bien pouvoir faire de leurs réserves de produits ou des heures qu’ils consacraient à leurs jeunes patients ? On vit des faillites retentissantes, parfois même sanglantes, certains désespérés allant jusqu’au suicide. Mais ce furent des cas isolés et les medias se montrèrent pour une fois assez discrets. Il ne fallait pas gâcher la liesse populaire, n’est-ce pas ?

    Au fil du temps, on en parla moins. Puis presque plus du tout. Au point que les poux devinrent légendaires. Dans certaines familles, on garda cependant quelques photos, prises au microscope électronique, pour faire peur aux enfants trop turbulents. « Si tu n’es pas sage, on appelle les poux ! ». Ainsi ils devinrent utiles, au même titre que l’ogre ou le grand méchant loup.

    Etrange retournement de situation…


  • Commentaires

    1
    Jeudi 7 Mars 2013 à 05:34
    2
    Lza
    Samedi 23 Août 2014 à 18:02

    Et le best-seller "Rendez-moi mes poux", de PEF, fut réédité, au grand bénéfice de l'auteur. (excellent pour stimuler les zigomatiques de nos chères têtes blondes).

    3
    Vieufou
    Samedi 23 Août 2014 à 18:02

    ça me gratte rien que de lire...

    4
    Blanc Chantal
    Samedi 23 Août 2014 à 18:02

    Un beau conte... Bravo

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    5
    Jordy
    Samedi 23 Août 2014 à 18:02

    Poux, poux pis doux ! Voilà une idée originale parfaitement traité.  Belle trouvaille

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