• Les cent premiers jours après la fin du monde, 65

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    Ce poème de Dominique Chappey paraîtra exceptionnellemnt sur deux jours, avec demain une surprise à la clé... 

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Dominique Chappey 

     

     

     

    Attendre chacun dans la peur son tour de mordre le facteur

    A force de se tromper d'ennemis, on en oublie tous nos soucis

     

    La multitude accouche d'un rien, métamorphose du quotidien

    Trépasse l'aube des indignations au couchant des résignations

     

    Au comptoir de la panade siroter la même limonade

    Prendre de bonnes résolutions pour la prochaine révolution

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Oser redresser la tête, refuser de battre en retraite

    Finir de payer la maison, espérer toucher sa pension

     

    Toujours choisir entre deux maux celui qui nous tiendra au chaud

    De peur d'attraper la crève, oublier qu'on avait des rêves

     

    Chaque jour se voiler la face, aux illusions faire la chasse

    Cesser de dire qu'on aurait pu, admettre qu'on y a jamais cru

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Pourtant demain on promettra un coup de canif au contrat

    Une fulgurance de la conscience pour prendre notre mal en patience

     

    C'est la bataille du quotidien se dire que si ça sert à rien

    De jouer le rôle du bon apôtre, c'est toujours la faute des autres

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?


  • Commentaires

    1
    Joël H
    Samedi 23 Août 2014 à 18:03

    Oui, quand ?

       Accepter le verdict du miroir ou bien maquiller son image et vivre d’illusions. Si elle a trop de reprises, changer de vie. Changer de profil, de face, de fil à son aiguille. S’échapper, tel une anguille, des mailles du filet. Une à l’endroit, une à l’envers. Filer droit et de travers. Changer de vis-à-vis. Changer de pays, de ville, de maison, d’arbre, de gazon, de sensation. Partir ailleurs. Vérifier si, là bas, Je est un Autre. 

      

       Vendre sa vieille vie d’occasion ou la retaper au fond de son garage à mots. Briquer les chromes, huiler la mécanique, refaire les joints pour que ne coule plus le rimmel, les larmes inutiles, la salive des paroles usées. Nettoyer le pare brise et aller à la rencontre de ce qui vient.

     

       Quoi que ce soit.

    2
    Domicha
    Samedi 23 Août 2014 à 18:03

    Ou bien, Joël, dit autrement et également de belle manière :

    … il y a trente ans, quand j’étais petit garçon, si l’on m’avait dit que j’allais vivre dans un monde où l’on risque sa peau en mangeant, en se baignant, en faisant l’amour, un monde où il faut accepter de porter des masques certains jours, où la fête est devenue une obligation, un monde où l’on bombarde ses propres banlieues, où l’eau manque, où l’on ne peut plus jamais être seul sans avoir l’air suspect de maladie mentale, où vouloir faire un enfant à une femme en entrant en elle est devenu obscène, alors, tu vois, j’aurais dit à ce type que j’aimais bien la science-fiction, mais que, là, il y allait tout de même un peu fort. Qu’il n’était pas crédible… On supporte tout ça parce que ce n’est pas arrivé d’un seul coup, mais à doses homéopathiques, mois après mois, année après année. En fait, la catastrophe est lente, …, terriblement lente. C’est une fin du monde au ralenti...


    Extrait de Comme un fauteuil Voltaire dans une bibliothèque en ruine. Jérome Leroy. Ed. 1001 nuits.

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