• Les cent premiers jours après la fin du monde, 37

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    Nera planète subhum7

    (après le quotidien, passons à demain)

    Jean-Luc Lapoule
       

     

    Les filles n'étaient pas vraiment des femmes ; et les femmes gardaient une part de leurs premières années enfouie au plus profond d'elles. Tout était enfoui. On ne les appelait même plus des femmes. Chacun était cantonné dans son patricule, les subhum7c=8 et les subhum7)(

    Les subhum7c=8 avait conservé cette main-mise sur l'ordre, la règle et la fesse bombée des subhum7)(. Elles n'étaient là que pour l'utilité, la futilité et la fertilité.

    Tous les printemps, dont on savait qu'il arrivait quand l'allumage séquentiel de nos écrans plats se faisait plus tôt, la période de reproduction commençait.

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    Les subhum7)( nouvellement menstruées depuis plus de trois 3 mois représentaient la tranche des plus jeunes accouplées. A l'opposé, il y avait cette minorité supérieure, qu'on nommait encore les "cougars" (subhum6 ou subhum5), dont le surnom était la dernière trace de nos lointaines origines, dernière trace de notre lointaine ironie.


    Toutes devaient participer à l'effort de survivance avec ardeur. Il n'y avait pas de couple. La notion de famille était démembrée. Seul restait le nom à préserver par la descendance et les alliances entre familles. Jusqu'à cinq familles pouvaient coexister dans les mêmes murs. Généralement, les abris en étaient constitués de trois. Et les plus aisés des subhum1 ayant cru privilégier leur confort en emplissant de leur seule famille le large espace de béton, s'étaient bien vite rendus compte de leur malheur, au fil des générations.

    Bien qu'entièrement clos, l'intérieur d'un abri ouvrait de larges fenêtres panoramiques sur la végétation tout autour, le ciel bleu magnifique, les arbres, les fleurs, le soleil... Ces écrans plats qui tapissaient les murs étaient connectés sur tout un réseau de caméras solaires disposé à la surface. Chaque cube blindé en était équipé. Il était assez rageant finalement de voir fonctionner tout ce système, naturellement activé par la simple lumière du jour. S'ils avaient réalisés plus tôt seulement...

    Qui savait encore le début de l'histoire ? Qui croyait le savoir ? Qui osait y croire ? Personne n'en parlait. Personne depuis le premier jour d'alerte n'en avait jamais parlé. Une habitude chez ces gens fortunés de Suisse, de garder les secrets, d'enterrer les affaires. Nous étions dans le secteur Françaphone, qui regroupait les divers grands comptes d'alors, de Suisse mais surtout de France, ce pays dont la fuite fut vraiment la spécialité nationale !

    Une fuite fatale, celle des centrales. C'est pourquoi chacun avait anticipé dans son coin, construisant des abris à tout va dans les strates rocheuses de la chaîne alpine. Ce surplus d'argent devait bien servir à quelque chose, enfin !

    Se retrouvaient là familles du béton, familles du plastique, familles du spectacle populaire, familles des réseaux politiques, familles des médias, familles de la pharmacologie, familles de la chimie, famille de la médecine, famille de l'hypercommerce, familles des transactions financières, familles de l'armement ...et forcément familles des énergies ! (qui mieux qu'elles connaissait l'inéluctable avenir ?)

    subhum1 cherche tras 2vie :-() subhum1 cherche tras 2vie :-()

    Ce texto envoyé à l'infini depuis les portables interconnectés du secteur Françaphone au lendemain de l'événement était devenu notre devise à tous. Notre génération était la septième seulement, pas tout à fait la dernière.

    On ne communiquait plus qu'à distance, d'un bunker à l'autre, par écran interposé. On nous appelait toujours les blogueurs.


    Sources proches et lointaines : Miranda July, Daniel Mermet, Philip K. Dick


  • Commentaires

    1
    Mercredi 30 Janvier 2013 à 05:30

    Jolie parabole. Si en plus ça sent son Philip K. Dick, on va attendre l'oeuf au... sortir de Lapoule.

    J'espère que tu en as d'autres comme celui-là.

    2
    Mercredi 30 Janvier 2013 à 05:33

     

    L'écriture d'un texte de science fiction est loin d'être chose aisée, tant il est facile de tomber dans des clichés lus et relus. Pari réussi pour "Nera planète Subhum7". On a envie de continuer la lecture...

    3
    Lza
    Samedi 23 Août 2014 à 18:04

    Vous ne le savez peut-être pas, mais ces abris existent déjà en Suisse. Les propriétaires ont été obligés d'en creuser partout, ce qui a entraîné la suppression de nombreux jardins, remplacés par de hideux blocs de béton. C'était pour se protéger d'une éventuelle guerre atomique. Et les habitants avaient l'obligation de renouveler périodiquement les provisions.

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