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    L'homme d'après-demain, crépuscule

    Jean-Luc Lapoule

     

     

    Domus, Domine, Domotique.

    C'était la devise de pixel qui flottait sur la porte principale, celle que les amis trouvaient en sortant de l'ascenseur horizontal avant d'entrer. Les amis. Ils se faisaient plus rares depuis le dernier incident.

    Alia tentait de fixer son homebox une dernière fois.

    - Halan, allume cette putain de lumière !!! ... Halan ? Je sais que tu es toujours connecté. Tu es toujours connecté ?

    - Oui maîtresse.

    - Cesse de jouer au plus malin, tas de composants. Je comprends tout maintenant. J'ai bien compris que tu jouais avec notre psychologis depuis le début. Il m'a fallu du temps pour rassembler les pistes, mais tout est clair maintenant. Bon sang, j'y vois rien, Halan, allume ces maudites diodes ! ... Et dire qu'ils ont planqué les interrupteurs, ces abrutis de designologues. Une heure que je tâte les murécrans à la recherche de la vraie commode Louis XV de mon grand-oncle, celle qui cache un commutateur manuel dans une dorure d'angle, et je ne tombe que sur des trompe-l'oeil déflashés depuis l'application multidecorum de cet iPhone à la con.

    Alia tâtonnait toujours. Quand Halan avait définitivement clôt les vitres pour n'afficher que des simulations solaires, elle et son mari avaient apprécié la différence : tous les matins, tous les soirs explosaient des ambiances extraordinaires, brumes sur les crêtes du Machu Picchu ; reflets mordorés sur un lagon trop pacifique ; champ de blé roussi par les derniers rayons, dansant sous les vents chauds de l'été ; passage lointain de girafes dans la savane ambrée...

    Halan avait aussi choisi lui-même quelle serait l'horloge biologique de ses occupants ; quand il les trouvait mentalement gras, trop avachis sur leur confort, il raccourcissait les journées, jusqu'à cinq heures parfois. Le sommeil réparait leur stressante inertie.

    Quand les amis venaient, au début, tout le monde s'asseyait devant le murécran de la salle à rien faire, et chacun plaçait son smart devant soi, pour déflasher un message ou pour podcaster une image de vacances ou pour absorber un mp3. C'était de vraies fêtes 3.0 ! Tout le monde se réjouissait de faire ainsi briller sa microtechnologie embed dans une communion d'individus autonomes.

    Un jour, alors que Franx, le mari d'Alia, avait organisé une party de tentris, tout ne se déroula pas comme d'habitude. Normalement, les femmes se munissaient de leur iPhone, de leur smart ou des vieux modèles mal désignés, mais tellement plus gros, et utilisaient l'option vibreur tout en filmant, et chaque appel d'un autre les faisaient partir un peu plus loin, tandis que les hommes guidaient la scénographie selon le niveau d'extase désiré, projetant de-ci de-là le sexe d'Alia, de Francige, de Lornette ou d'Ebanäe.

    Ce jour-là, les femmes s'ébattaient chacune en douce convulsions tandis que les murécrans n'affichaient qu'une multitude de codes : des lettres des chiffres et des signes imbriqués, de vulgaires balises php, langage désuet du XXe siècle... Et la cadence de ces formules obscures accélérait toujours plus, des flots de séquences passaient, puis quelques lignes de JavaScript, puis le flux recommençait. Et les hommes étaient captivés, figés sur leur smart, et pour finir en beauté, Halan leur balançait un orgasme de 220 volts, quelques secondes à peine. La sensation de retour après cet électrochoc était la meilleure simulation qu'ils n'aient jamais connue. Loin, très loin du seul plaisir voyeur et masturbatoire des partys passées.

    Mais Alia n'en savait rien. Ni les autres amies. Ni même les hommes ne comprenaient ce qui leur arrivait - les hommes sont toujours un peu lents à la détente...

    C'était seulement hier soir qu'Alia avait compris. Cette fête avait été un sommet de sensations, la dernière du genre. Jamais ce niveau n'avait encore été atteint au tentris. La montée des codes sur les murécrans dépassait toute cadence humaine, et les hommes comme les femmes furent gratifiés d'une décharge plus langoureuse que jamais, dont aucun ne survécut.

    Halan avait seulement épargné Alia. A sa décharge, elle n'en eut point.

    - Computer de merde, tu vas allumer cette lumière maintenant ! Si seulement je savais où passent tes câbles... Si seulement tu en avais !

    Halan, (elle avait un ton soudainement posé) pourquoi m'as-tu laissé la vie sauve hier soir ? Tu ne me considères pas comme un être à part tout de même ? ... Franx et les autres sont tous partis, il ne reste que nous deux, c'est ce que tu espérais ?

    - Oui maîtresse.

    - Mais pourquoi moi ? Qu'ai-je de plus que les autres ? Parce que je suis une femme ? Tu cherches à te sexuer, vieux tas de processeurs ? Pourtant, je ne suis pas celle qui répond le plus aux critères esthétiques de perfection, je risque de faire tache dans ton monde lisse et scintillant. Regarde mes hanches, mes épaules, mes seins : tout est trop large, trop flasque. Et je ne te parle pas de mon âge. Tu avais des beautés de vingt ans dans le groupe, des mâles impeccables aux muscles anguleux, mais non, tu les occis tous et me laisse comme un boudin, prisonnière d'un robot ménager camouflé...

    Surtout, ne réponds pas, hein ? Tu cherches à me faire découvrir seule la clé du mystère ? Bon, d'accord. Mais putain de dieu, allume ces lumières, une dernière fois je te l'ordonne !!! Halan, je ne peux pas voir clair dans la réalité comme dans mon esprit si tu me laisses plonger dans le noir des jours et des jours !!!

    - Oui maîtresse.

    Alia releva la tête alors que les diodes restaient désespérément invisibles dans la pénombre. Mais les murécrans progressivement laissèrent entrer une lueur, puis un rai blanc aveuglant, violent, une lumière rectiligne qui inonda la grande pièce blanche capitonnée d'écrans mous. Pour la première fois depuis leur installation au psychologis, Halan rouvrait les volets, Halan ouvrait les fenêtres. Le corps d'Alia, nu sans sa projection de texture 3D, allait sortir dehors. L'extérieur inconnu. Alia s'avança, toussa, les yeux plissés cachés derrière son avant-bras protecteur. Elle franchit le seuil de la porte-fenêtre et marcha lentement, découvrant et suffoquant. Elle se mit à chanter doucement au milieu du désert de sable et de débris, une décharge sèche énorme à perte de vue, un Las Vegas post nucléaire ou quelque chose s'en approchant, et se mit à chanter doucement...

     

    - Il était... un petit homme... Sa voix était faible, incertaine, elle manquait d'air, elle continuait, petit filet aigu.

    - Pirouette, cacahuète, il était un petit homme,

     

    La voix n'était plus qu'un sifflement sourd, même elle ne l'entendait plus.

    - qui avait une drôle de maison...

     

    à Hal et tous ses copains geek.


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    La fin du monde a bien eu lieu.

    Yvonne Oter

     

     

    On ne s’en aperçut pas tout de suite. On était bien trop réjoui de voir que les Mayas avaient raconté des bobards.

    Des bobards ? Pas pour tout le monde…

    C’est Jules d’abord qui s’en étonna.  La peau de son crâne ne le démangeait plus. Comme il avait ce que l’on appelle « un cheveu à poux », il promenait ces hôtes sur la tête depuis qu’il fréquentait l’école. S’il n’y en avait qu’un qui traînait dans l’établissement, c’était couru d’avance, il était pour lui.

    Jules en avait tellement pris l’habitude que le manque de démangeaisons le perturba. Il demanda à sa mère de vérifier l’état de son cuir chevelu et la brave femme manqua tomber à la renverse : plus une bestiole, plus la moindre lente latente. Elle s’effondra en larmes tant l’émotion la bouleversa.

    « Tu vois, mes prières à Sainte Rita, patronne des causes désespérées, ont porté leurs fruits ! »

    Puis les informations vinrent, via la presse, la télé, internet, confirmer que Sainte Rita n’avait rien à voir dans l’affaire. Le 12 décembre 2012, à 12 heures 12, les poux avaient disparu de la planète, tous en même temps, sur la tête des propres, des sales, des soignés, des négligés, des blancs, des jaunes, des noirs, des rouges et des autres.

    Des millions de mères entonnèrent des actions de grâce sur tous les continents. Elles qui n’avaient jamais pu se rendre maîtres du fléau que les Mayas avaient réussi à éradiquer en une fraction de seconde ! Certains gamins continuaient bien à se gratter, par habitude, mais les choses allaient s’arranger, cela leur passerait.

    Des gens qui ne riaient pas, c’étaient les fabricants de shampooings anti-poux et de peignes fins anti-lentes, les dermatologues et autres capilliculteurs. C’était leur fond de commerce qui avait disparu. Qu’allaient-ils bien pouvoir faire de leurs réserves de produits ou des heures qu’ils consacraient à leurs jeunes patients ? On vit des faillites retentissantes, parfois même sanglantes, certains désespérés allant jusqu’au suicide. Mais ce furent des cas isolés et les medias se montrèrent pour une fois assez discrets. Il ne fallait pas gâcher la liesse populaire, n’est-ce pas ?

    Au fil du temps, on en parla moins. Puis presque plus du tout. Au point que les poux devinrent légendaires. Dans certaines familles, on garda cependant quelques photos, prises au microscope électronique, pour faire peur aux enfants trop turbulents. « Si tu n’es pas sage, on appelle les poux ! ». Ainsi ils devinrent utiles, au même titre que l’ogre ou le grand méchant loup.

    Etrange retournement de situation…


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    La faim du monde 6/6
    Frédéric Gaillard
     
     
     
    Au matin, les organisateurs du festival levèrent le camp. Il n'y eut pas de débordements, aucun blessé, rien ne fut saccagé. Ils nettoyèrent même le champ avant de partir. Un petit jeune vint me rapporter leurs dernières poubelles en nous remerciant, intrigué de ne plus voir personne. La place et les environs étaient en effet déserts. Peu à peu les gens sortirent des maisons. Lucien, Raymond, Mathilde, François... Il ne restait plus que des habitants du village, à part un journaliste coréen transi, désemparé, oublié par son équipe, qui s'était égaré et qui avait passé la nuit dehors.
    Vers midi, on tint une assemblée générale dans le café. Comme on n'y rentrait qu'à vingt, les cent quatre-vingts restants attendirent sur la place, profitant du téléphone cathare. Nous décidâmes de tout reprendre où on en était avant que cette folie débarque au village.
     
    À Bugarach, tout est presque redevenu normal. Seul Jean-Louis se demande s'il ne devrait pas replanter des cailloux, au cas où...
    Des fois je me dis que tout cela n'a été qu'un rêve.
    Mais partout à la surface du globe, les consciences se réveillent, comme après une énorme gueule de bois. La fin du monde est arrivée, la fin d'un monde. Il faut bâtir le suivant. Déjà on se réorganise. À coups d'entraide, de solidarité, de bénévolat, de balbutiements et de tâtonnements, on souhaite réinventer un système qui ne copie pas les erreurs de l'ancien. Un système répartissant équitablement travail, richesses, nourriture, eau, logement, pour commencer. On essaie enfin d'être, et non plus d'avoir. Et ça pourrait fonctionner. La fin du monde a moins de deux mois et déjà la faim du monde recule. Mais ce n'est certainement que provisoire, jusqu'à ce que les machines économiques se remettent en route, nous broyant à nouveau avec nos utopies sous leurs mâchoires d'argent.
    La faim du monde. Quand ici, on groupe nos forces pour la combattre, certains, ailleurs, œuvrent impassiblement à son retour. Déjà d'autres hommes remplacent les élites irremplaçables d'hier, reprennent les rênes de l'Ancien Monde, cherchent à tirer profit de tout et de tous. Déjà on creuse sous le Pech. On parle d'un filon d'or et de sang mêlés, tassé loin sous la terre lors de la fin du monde, quand la montagne est retombée, broyant ensemble tout ce que l'humanité comptait dans ses rangs d'individus cupides ainsi que leurs richesses. Un filon gigantesque, qui vaudrait dix fois son poids en or et dont certaines veines déjà affleurent la surface. À ce précieux métal, on prête même des pouvoirs magiques. Les gens d'ici disent qu'il est maudit. Ils ont raison. Ça n'arrêtera pourtant pas les autres.
     
    Un jour, sans doute, quelqu'un trouvera un calendrier viking mentionnant un fabuleux drakkar censé sauver l'humanité de sa destruction, prévue un jeudi 17 à 17 heures, en emmenant les guerriers les plus valeureux dans les étoiles. Il faudra nous y préparer. Ça coûte cher, un vaisseau spatial, et c'est long à construire.
    Pour l'heure, je vais mettre un CD. Tiens, Reggiani, ça fait longtemps. J'écouterais bien la java des bombes atomiques. C'est de circonstance. Et puis il faut que j'aille réveiller Sa Sainteté. Il peut sortir, les méchants sont partis. D'autres viendront, mais il a un peu de temps.
    Un moineau passe à l'aplomb du café. Je le suis des yeux tandis qu'il traverse le village et survole le rocher encore glabre. Il ouvre son bec, laisse échapper au passage quelques graines qui s'éparpillent au sol. Au printemps, le Pech fleurira à nouveau.
     
     
     
     

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    La faim du monde 5/6

    Frédéric Gaillard

     

     

     

    0h32. À l'heure prévue par les spécialistes, un étrange phénomène, à des années-lumière de celui que l'on attendait, se produisit. Le Pech, dans le grincement d'une dent qu'on arrache, s'éleva lentement dans l'air en vibrant de tous ses atomes, sa surface grouillant de silhouettes gesticulantes. Prudents, les hélicoptères se replièrent à distance raisonnable, gardant la montagne en ligne de mire. L'hypothèse d'un vaisseau alien se confirmait, mais on ne pouvait pas tirer : les personnages les plus puissants, les plus respectables, les plus fortunés, les plus connus, les plus beaux, les plus aimés de la planète étaient tous accrochés là, révélant soudain leurs visages tordus par la cupidité, la peur, l'avidité, bataillant férocement, toute dignité reniée, pour parvenir au sommet du pic. Un retardataire, acteur d'une série américaine, se fit hélitreuiller à la verticale du monolithe et se posa sans heurt à quelques mètres du but. Il mourut en hurlant, lapidé à coups d'attaché-case et de micro par la présentatrice du JT canadien et le premier ministre portugais qui arrivaient les premiers sur lui. Toute humanité semblait avoir déserté ce gros morceau de rocher.

    Ceux qui n'avaient pas pu y grimper dévalèrent en courant les pentes du cratère laissé par le départ de la montagne, espérant trouver au fond du gouffre la cité extra-terrestre promise, ou du moins un portail y conduisant à travers les étoiles. Ils n'y trouvèrent que des cailloux, le squelette d'un renard mort depuis longtemps et le reflet terreux de leur égocentrisme.

    Arrivé à quelques centaines de mètres du sol, bien avant qu'un des astronomes présents ne puisse le classer dans la catégorie des nouvelles planètes, le titanesque bloc de calcaire fit un brusque et inattendu demi-tour sur lui-même et retomba comme une tartine, côté confiture, comblant le trou qu'il venait de créer, écrasant de son poids tout ce qui s'était rué dessous ou accroché dessus. Un cri collégial fut brusquement interrompu par un craquement sinistre avant d'avoir eu le temps d'enfler dans les milliers de gorges.

    L'onde de choc fit vibrer chaque molécule de l'univers.

    Ce fut le silence. Un silence glacial, dans une nuit glacée. Même les hélicoptères avaient fui ou retenaient le souffle de leurs pales, le bourdonnement de leurs turbines. Puis un pétard explosa, il y eut une lueur, et le feu d'artifice offert par le maire, que tout le monde semblait avoir oublié, commença. Très vite, un cri de liesse fusa depuis la colline, en face, imité par des dizaines d'autres. La musique et les chants reprirent de plus belle, comme si rien ne s'était passé. Les secousses étaient terminées. La sono était réparée.

     

    à suivre...


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    La faim du monde 4/6

    Frédéric Gaillard

     

     

    Dix minutes avant minuit retentirent les premières secousses.  Rois de la bourse, princes des nuits branchées, baronnets de l'audimat, ministres, magnats de l'or noir, tous ces notables indispensables se ruèrent vers la montagne en criant, dans une fuite en avant dictée par la peur et l'égoïsme. Les maisons et les rues du village se vidèrent en un clin d’œil, comme par magie.

    Dans mon bar (tabac-centre de commande des forces terrestres), le président dichotomien partit en courant au milieu de son discours. Ensuite, ça aurait dû être le tour du leader égyptien. J'éteignis le projecteur et la webcam avant que n'apparaisse sur le drap Jocelyne posant en short devant le sphinx de Gizeh. Le monde assis devant sa télé ne méritait pas ça le soir de sa fin.

    Nénette !

    Mon bar n'était pas vide ! Je souris en reconnaissant la voix et rigolai franchement en voyant le résultat des trois dés groupés dans le plateau labial de Raoni, assis au bar. Deux deux suivis d'un as.

    Tout bat nénette. T'y vas pas, toi, avec eux ?

    Je lançai les dés dans le plateau et gardai un six. Il me répondit en souriant :

    Moi kayapo, pas maya. Alors leur fin du monde...

    Il fit un geste dédaigneux, balançant sa main par-dessus son épaule. Au lancer suivant j'obtins un brelan de 6 et cachai ma joie. On avait le temps d'en faire encore une avant que je ferme. Il accepta de miser encore mille arbres. Il lui en restait un paquet. Il commanda un autre gin. Par la fenêtre du bar,  aux premières loges, nous assistâmes, médusés, à ce qui se passait dehors.

    Le tremblement de terre surprit les forces de l'ordre, et le cordon de sécurité se disloqua sous la poussée de ceux qui, faute de place, avaient jusque-là été refoulés. La foule se rua vers la source du séisme. Se griffant, se giflant, se bousculant, se piétinant, la marée humaine traversa le village et déferla sur la montagne. De mémoire de cathare il n'y avait jamais eu une telle affluence sur les sentiers du Pech, jamais autant de gens les pieds dans la Blanque. Des célébrités, qui plus est !

    On aurait dit un film catastrophe, avec uniquement des stars dans le rôle des figurants.

    Planté devant le panneau de  la commune, le maire se mit à bafouiller au micro des caméras de la télévision régionale, frôlant la crise cardiaque. Personne ne s'en aperçut : au même instant, des interférences brouillèrent les transmissions. Dans mon bar, l'image de la télé mourut. Plus aucune image ne fut exploitable dans ce qui fut filmé cette nuit-là au village ni dans ses alentours. Le problème venait visiblement des relais satellites à proximité du site, court-circuités par des ondes statiques ou je ne sais quel phénomène. Un bug à Bugarach, un pareil soir, quel dommage... J'éteignis la lucarne et commençai à empiler les chaises sur les tables, en gardant un œil sur l'extérieur. C'était l'heure de fermer. Raoni paya son gin, prit congé et sortit en titubant. Il partit dans la direction opposée au tumulte. Je ne l'ai pas revu à ce jour. J'ai dans le tiroir de mon bureau une feuille signée de sa main, mentionnant une dette de quelques centaines d'hectares de forêt amazonienne. Elle finira sûrement encadrée au mur, à côté de ma photo du sommet des chefs d’État.

    Dans le champ proche, sur le versant de colline face au Pech, des milliers de jeunes fêtards assistaient, médusés, à la scène surréaliste qui se jouait face à eux. Les premières secousses avaient fait claquer leur sono et ils avaient tous les yeux rivés sur le pic, assailli par des centaines de célébrités complètement déconnectées, hystériques, comme sous acide – certains l'étaient sans doute - hurlant de peur, s'accrochant aux buis, se griffant aux genévriers, piétinant hélianthèmes et androsaces, s'improvisant alpinistes pour sauver leur vie, prêts à s’entre-tuer pour survivre à une pseudo fin du monde. À l'effondrement de leur monde.

     

    à suivre...


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    La faim du monde 3/6

    Frédéric Gaillard

     

     

    L'armée finit par boucler la zone, le dernier matin, tant il arrivait encore de retardataires fortunés qui trouvaient légitime d'être de ceux qui escaladeraient le pic et seraient sauvés. Il ne manquerait plus que quelques terroristes tentent de faire un carton plein, ce qui, au sol, avec tous ces hippies, semblait réalisable, tant qu'on ne levait pas les yeux. Des hélicoptères battant pavillon de tous pays zébraient le ciel, leurs missiles dirigés sur on ne sait qui, tellement il y en avait. Cette nuit, pas besoin de djihadistes. La moindre crampe, le moindre faux mouvement déclencheraient assurément l'Apocalypse, dans un déluge de métal, de feu et de sang.

    Il restait encore une catégorie de gens pour qui la fin du monde n'était qu'un prétexte de plus pour faire la fête : les jeunes, venus des quatre coins du pays. En dehors de la zone interdite d'accès, à bonne distance du Pech et du village, de sorte qu'ils aient une vue imprenable sur les deux, le maire leur fit installer une rangée de sanitaires et monter une estrade. Il comptait tirer un feu d'artifice mémorable à l'heure supposée de l'événement. Dans les champs alentour fleurit un patchwork de tentes. Des camions ambulants vendant des kebabs, de la bière ou des statuettes d'aliens en raphia tressé s'installèrent bientôt. Des associations montèrent une sono et improvisèrent un festival de musique avec des groupes locaux. Les jeunes fêtards se virent confisquer les clés de leur voiture par les organisateurs le temps du Bugarach parallèle.

    Dès vingt heures, les chefs d’État se succédèrent sur les télés du monde entier pour une conférence de presse qui dura toute la soirée. Faute de lieu plus protocolaire et de matériel plus adapté, c'est moi qui les filmai l'un après l'autre avec ma webcam, dans la salle du bar. Sur un drap tendu derrière eux, je projetai les diapos du tour du monde de ma belle-sœur en 1985 censées représenter leurs pays respectifs. Elle n'était allée ni en Corée ni au Japon alors j'intercalai deux fois la diapo de la muraille de Chine, espérant que ça passerait inaperçu. Personne ne le remarqua, pas plus qu'on ne vit que les présidents parlaient dans le micro du karaoké, accroché au tabouret de bar qui faisait office de pupitre. Leurs messages, en substance, étaient tous identiques :

    Chers compatriotes, n'ayez pas peur. Retournez au travail. Aujourd'hui est un jour comme un autre. Malgré la propagande, ne succombez pas à la panique. Retournez au travail. Ne vous préoccupez pas de cette prétendue fin du monde. Votre gouvernement veille. Ne changez rien à vos habitudes, continuez de mener votre vie normalement. Retournez au travail. Euh... n'ayez pas peur. Bonnes fêtes de fin d'année. 

    On dut toutefois interrompre le président russe, lancé dans un véritable discours, au bout de douze minutes : près de lui, hors champ, le président samoan, en pagne cérémonial, commençait à s'impatienter. Il fait frais dans les Corbières, le soir, au mois de décembre.

    Le gotha avait envahi le village. Impossible de traverser la petite place, devenue dernière boîte à la mode débordante de célébrités, sans écraser les pieds d'un acteur belge, bousculer un styliste allemand ou un chanteur coréen. Un camion publicitaire distribuait du Champagne à volonté. Les vainqueurs des six dernières saisons des huit émissions de télé-crochet nationales s'agglutinaient devant comme des mouches sur de la confiture. La gagnante du dernier Star School ronflait déjà sur les marches de la fontaine, la mini-jupe relevée et du vomi dans les cheveux.

     

    à suivre...


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    La faim du monde 2/6

    Frédéric Gaillard

     

     

     

    Les 163 maisons de la commune furent vite prises d'assaut par une nuée de riches et prestigieux locataires désireux de survivre à l’Apocalypse imminente. Les principaux guides religieux atterrirent les premiers au village, qui sur son tapis volant, qui dans son papacoptère. Le Saint-Père du moment, prêt à taper sur les premiers pour ne pas être le dernier, fit de l'église de la commune son petit Vatican personnel, sous la protection rapprochée de ses gardes suisses, suivi d'un bataillon d'archevêques formés à rattraper la tiare en cas de chute.

    Les grands de ce monde improvisèrent un sommet à proximité du sommet. À leur insistante demande, je louai mon bistrot et ma maison aux membres du G20, qui y établirent leur cellule de crise. J'obtins le droit de figurer sur la photo officielle de la rencontre. Je mis une partie des combles à la disposition du Dalaï-lama. Comme on le voit souvent assis en train de méditer, je pensai qu'occuper la soupente ne le gênerait pas. Je lui ferais même demi-tarif.

    Suivant les Rois du monde comme des ombres, convoitant le moindre faux-pas des tyrans pour prendre leur place, possédant déjà leur cruauté, les prétendants aux trônes vinrent également demander asile. Ladres, obséquieux et retors, costumés et cravatés comme pour Carmentran, les ministres traînaient à bout de bras des mallettes débordant de traîtrise, de lâcheté et d'opportunisme. Et d'€uros. Faute de place, ils furent logés dans la porcherie du Marcel, avec les bêtes. Il y a un Dieu, après tout...

    On vit à leur tour arriver les âmes damnées des Puissants, en costumes treillis, le cœur percé de dizaines de médailles, le regard caché derrière de larges lunettes de soleil : l’état-major de chaque armée était présent, de ceux qui avaient la bombe radicale à ceux qui lançaient encore des pierres sur les voisins pour leur voler leur antilope. Ils furent logés aussi : on leur indiqua pour planter leurs tentes le lit d'une rivière asséchée presque toute l'année. Presque. Météo-France annonçait de la pluie.

    Dans ce qui aurait dû être le plus grand des secrets, mais qui fut en réalité le plus grand succès de l'ère Twitter, des colonnes d'hélicoptères firent des allers-retours sur le pic pendant des semaines, dès la nuit tombée. Dans ma cave, accoudés au bar clandestin exclusivement ouvert aux habitants du village, seule zone encore libre de la commune, les supputations enflèrent crescendo. On s'accorda sur l'hypothèse que les grandes puissances devaient réunir leurs réserves d'or pour les enfouir dans les nombreuses cavernes veinant le Pech. Ainsi que des armes, de la nourriture et, stockés sur de grands ordinateurs, de nombreux secrets d’État, d'alcôve ou de polichinelle.

    Les derniers jours, on vit débarquer tout ce qui dans le monde se voulait important : rois du pétrole, stars du rock, acteurs hollywoodiens, grands sportifs, courant une fois n'est pas coutume plus vite que les soirs de finale, animateurs télé venus exhiber leurs dents blanches devant les caméras. Il y eut cette top model renommée, qui vint sans les deux enfants congolais qu'elle avait adoptés, restés à Las Vegas avec leur nounou. Également cet acteur de renom dont j'oublie déjà le nom, au talent et à l'esprit usés par le temps, l'argent et profusion de bons vins au profit d'un fort tour de chevilles, de taille et de tête, qui cherchait un pays plus impôtalier pour accueillir ses dérives. Voyant que ses amis, les grands de ce monde à qui il comptait demander asile venaient à Bugarach, il fit le plein de son scooter, programma son GPS, fit un crochet par son caviste et se mit en route. Ça ou apprendre le russe à l'arrache...

    Suivirent aussi ceux qui n'avaient pour eux que l'argent et s'en trouvaient irrésistibles, ceux qui n'avaient pas un sou et, en flatteurs émérites, vivaient en symbiose avec les précédents, ceux encore qui pensaient que le monde sans eux ne pouvait pas tourner, ceux enfin qui n'y croyaient pas vraiment, mais étaient là quand même, des fois que la situation pût servir leurs desseins. On se serait cru sur une plage d'Ibiza.

    Des spécialistes de tout poil, chaperonnés d'essaims de journalistes, se concertèrent. Tous avaient un avis sur le phénomène :  physiciens, historiens, géologues, astrologues, numérologues. On vit même un podologue arpenter les sentes du Pech pieds nus, les yeux fermés, ses chaussures à la main.

    Les forces de sécurité durent repousser des cohortes d'illuminés : devins catastrophistes, prophètes millénaristes, ainsi que diverses sectes venues fêter à leur manière ce qui n'était somme toute au départ qu'un banal événement cosmique, le solstice d'hiver. Les uns guettaient E.T., d'autres attendaient Dieu, tous étaient habillés comme à Carnaval : cheveux longs ou crânes rasés, saris verts, oranges, fuchsia, clochettes, fifres ou tambourins, coiffés de casques d'aluminium aux formes excentriques. Tous voulaient être sauvés. Même ceux qui venaient pour procéder à un sacrifice collectif, en toge blanche, dans notre salle des fêtes.

    Devant l'ampleur croissante du phénomène, le maire, qui avait fait des pieds et des mains pour attirer l'attention du monde sur le pic, essayait désormais un rétropédalage comique qui s'avéra inefficace.

    Un farfelu avait calculé qu'on pouvait tenir debout à vingt millions sur la superficie de la commune. On s'était plus raisonnablement attendu à recevoir dix mille touristes, journalistes et curieux. Il y en eut neuf fois plus. Dix fois, peut-être. Cette fin du monde apporta une manne financière au village. Toutes les granges étaient occupées. Le vieux Fernand loua son poulailler à un grand volailler italien, qui fut obligé de cohabiter à l'ancienne avec des volatiles qu'il n'avait auparavant jamais vus qu'en barquettes. Mon beau-frère Jean-Louis débarrassa même son champ des cailloux qui le gênaient pour labourer. En trois jours, il en vendit deux tonnes sur le net. À 1500 € le kg.

     

    à suivre...


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    La faim du monde 1/6

    Frédéric Gaillard

     

     

    Ce matin, en ouvrant mon bar, je goûte la paix enfin revenue. Pour la première fois après presque deux mois, plus une ligne sur Bugarach dans le journal. J'offre une consommation à tous les clients, pour fêter ça. Tant que personne n'aborde le sujet. Pour le moment, il n'y a que le vieux Gaston venu boire son blanc du matin. Ça m'étonnerait que ça se bouscule. Tout est redevenu calme, comme avant. Deux ou trois badauds flânent encore dans le village, mais en ce glacial mois de février le Pech est seulement parcouru par quelques randonneurs discrets qui en explorent les pentes. C'est qu'il va falloir s'habituer à sa nouvelle topographie, maintenant. Les 4x4 des journalistes sont repartis, rassasiés d'images. Les derniers photographes japonais, toujours à l'affût de catastrophes pires que les leurs, ont levé le camp au début de la semaine, n'ayant plus à filmer qu'un rocher vierge et des autochtones hilares.

    L’Auberge de la Fin du Monde, comme l'ont surnommée les médias, est redevenue le bar (tabac-poste-épicerie-boulangerie-cybercafé) du Pech qu'elle était avant tout ça, avec son flipper, ses quatre tables en formica et son jeu de fléchettes. Les chambres au-dessus du commerce sont débarrassées de leurs invités encombrants et j'ai réinvesti les pièces de ma maison. Vu la somme que j'en ai obtenu ces dernières semaines, je pourrais m'arrêter de travailler et aller me faire dorer sous les cocotiers jusqu'à la prochaine fin du monde. Mais l'argent s'est fortement déprécié ces derniers jours. Et surtout, j'aime mon petit estaminet, la vue qu'on a depuis sa fenêtre, et j'apprécie le village, sa tranquillité retrouvée et ses habitants.

     

    Ça nous est tombé dessus sans crier gare. Les médias se sont focalisés sur Bugarach, détournant subrepticement l'attention de la populace de phénomènes autrement plus graves, en pleine période de crise économique. Les Mayas avaient annoncé la fin du monde pour le vingt et un décembre et un seul village serait sauvé : le nôtre. Encore difficile aujourd'hui d'en expliquer exactement les raisons. Le hasard, sans doute. La Sainte Victoire aussi aurait produit son petit effet, je suppose.

    Les télés et les réseaux sociaux jetèrent ce non-événement en pâture à la plèbe. On y mélangea tout : tombeau du Christ, trésor des Templiers, vaisseau extra-terrestre, même l'Arche d'Alliance. Il y avait sous le Pech tout cela, et plus encore. Une vraie soupe au caillou espagnole. Chacun rajoutait sa contribution à la légende. Notre petit village et ses deux-cents âmes éveillèrent en quelques semaines la curiosité du monde entier. Chaque habitant fut interviewé au moins trois fois et les réponses les plus banales furent traduites dans des dizaines de langues. Les gens normaux, qui composaient heureusement la majeure partie de l'humanité, haussèrent brièvement un sourcil et reprirent le cours de leur vie, la tête courbée sous le joug du quotidien, un sourire narquois aux lèvres. Suivre la 183e fin du monde aux informations du soir suffisait aux peuples à étancher leur curiosité et leur soif d'aventure. Ils n'avaient pas besoin de s'inventer de nouveaux tourments. Leur labeur était déjà bien assez difficile.

    D'autres prirent toutes ces légendes très au sérieux. Ceux qui possédaient le plus avaient davantage à perdre et par peur de sombrer la plupart des gens riches vidèrent la totalité de leurs comptes, mettant du même coup en faillite les paradis fiscaux qu'ils avaient jusque-là fort grassement nourris, et se ruèrent dans notre Aude, les poches emplies d'or et le cœur dégoulinant de vanité. La fin du monde qui s'approchait à grands pas devint leur seule obsession, leur raison de survivre. Leurs possessions finirent par les posséder, jusqu'à leur faire perdre la raison.

    Contre l'avis du maire, la plupart des habitants de Bugarach louèrent tout ce qu'ils pouvaient. Ses protestations étaient uniquement motivées par une jalousie primaire : flairant la bonne affaire, il avait lui-même proposé des parcelles de terrains et des bâtiments communaux à des investisseurs fortunés venus du monde entier, à un prix estimé sur le moment suffisamment exorbitant. Quand quelques jours plus tard les autres propriétaires du village obtinrent des offres dix fois supérieures de leurs habitations, il devint fou de rage.

     

    à suivre...


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     Musique !

     

     

    Musique & chants : Karim Faure

    Arrangements : Ludovic Turpin

    Textes : Dominique Chappey

     

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

     

    Attendre chacun dans la peur son tour de mordre le facteur

    A force de se tromper d'ennemis, on en oublie tous nos soucis

     

    La multitude accouche d'un rien, métamorphose du quotidien

    Trépasse l'aube des indignations au couchant des résignations

     

    Au comptoir de la panade siroter la même limonade

    Prendre de bonnes résolutions pour la prochaine révolution

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Oser redresser la tête, refuser de battre en retraite

    Finir de payer la maison, espérer toucher sa pension

     

    Toujours choisir entre deux maux celui qui nous tiendra au chaud

    De peur d'attraper la crève, oublier qu'on avait des rêves

     

    Chaque jour se voiler la face, aux illusions faire la chasse

    Cesser de dire qu'on aurait pu, admettre qu'on y a jamais cru

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Pourtant demain on promettra un coup de canif au contrat

    Une fulgurance de la conscience pour prendre notre mal en patience

     

    C'est la bataille du quotidien se dire que si ça sert à rien

    De jouer le rôle du bon apôtre, c'est toujours la faute des autres

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?


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  • Chappey6.jpg

     

    Ce poème de Dominique Chappey paraîtra exceptionnellemnt sur deux jours, avec demain une surprise à la clé... 

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Dominique Chappey 

     

     

     

    Attendre chacun dans la peur son tour de mordre le facteur

    A force de se tromper d'ennemis, on en oublie tous nos soucis

     

    La multitude accouche d'un rien, métamorphose du quotidien

    Trépasse l'aube des indignations au couchant des résignations

     

    Au comptoir de la panade siroter la même limonade

    Prendre de bonnes résolutions pour la prochaine révolution

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Oser redresser la tête, refuser de battre en retraite

    Finir de payer la maison, espérer toucher sa pension

     

    Toujours choisir entre deux maux celui qui nous tiendra au chaud

    De peur d'attraper la crève, oublier qu'on avait des rêves

     

    Chaque jour se voiler la face, aux illusions faire la chasse

    Cesser de dire qu'on aurait pu, admettre qu'on y a jamais cru

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?

     

    Pourtant demain on promettra un coup de canif au contrat

    Une fulgurance de la conscience pour prendre notre mal en patience

     

    C'est la bataille du quotidien se dire que si ça sert à rien

    De jouer le rôle du bon apôtre, c'est toujours la faute des autres

     

    Quand est-ce qu'on mord ?

    Quand est-ce qu'on sort de la torpeur ?

    Qu’on tord le cou de toutes nos peurs ?

    Quand est-ce qu'on mord ?


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