• Le bal des 500 (17)


    Invitée de la dernière heure, Ana Surret propose de nous rafraîchir un moment et de goûter un peu l’air de la mer avant le bouquet final…



    La mer


    Horizon sans bornes, le ciel dans l’eau, l’eau dans le ciel, l’œil hypnotisé se noie dans une brillance bleutée aux tons changeants, et se réveille à la vue d’un frêle esquif laissant une fragile écume dans son sillage.

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    La mer s’esquive emportant avec elle le sable que les pieds ne peuvent retenir, et revient sournoise au-delà de la limite repérée, abandonnant d’éphémères bulles et des débris de posidonie.


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    Chaude sous le soleil d’été, elle invite à l’abandon, baignoire géante accueillant mille nageurs qu’elle surprend par une brusque vague surgie d’ondulations douces et régulières, amorce d’un chahut naissant sous le vent, devançant l’orage.


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    Furieuse, les vagues montent à l’assaut des rochers dans un mouvement tant et tant de fois répété que la pierre est creusée de mille trous, l’éclatement violent des vagues disperse bien au-delà de la promenade une écume salée poissant les cheveux des promeneurs téméraires.


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    Quelques nuages mouchètent encore le ciel, l’eau agitée n’a pas retrouvé sa limpidité, elle s’apaise, sa furie se mue en caresses appuyées, les vagues abandonnent sable et algues en cordons parallèles, des pêcheurs en suroît jaune trempent du fil dans l’eau brouillée, la mer leur appartient pour un temps encore.

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    Le navire haut comme un immeuble de dix étages est solidement amarré au quai, son flanc ouvert en trois points avale les provisions, les bagages et le flot des voyageurs, la passerelle pentue oscille sous leurs pas faisant naître une appréhension chez certains, les portes sont refermées, coups de sifflets et ordres au porte-voix dominés par la sirène scandent le départ, un long tressaillement se répand de la poupe à la proue, le navire s’éloigne du quai aidé par les remorqueurs et tourne son étrave vers le large, un claquement sur l’eau à peine audible, les remorques ont été décrochées et le paquebot file plein sud sous le soleil de midi.


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    Le navire est chahuté en tous sens, agrippés au bastingage du pont sous la salle des commande, où l’on imagine le capitaine scrutant le noir et ses aides les yeux rivés sur les écrans radars, nous résistons au vent, aux embruns portés par les paquets de mer qui s’écrasent au-dessous de nous, le pinceau d’un puissant projecteur éclaire la confusion liquide, depuis deux heures, la modeste houle dans laquelle batifolaient des dauphins s’est transformée en tempête, la mer se creuse et s’élève formant des vagues de plus en plus haute, elle a finalement raison de nous et nous renvoie à l’intérieur.


  • Commentaires

    1
    Vendredi 6 Novembre 2009 à 15:25
    Vivifiant!
    Jolie utilisation des éperluettes.
    2
    Vendredi 6 Novembre 2009 à 16:05
    La première phrase ne m'a pas emballée mais j'ai quand même lu la deuxième et la troisième m'a accrochée. La montée en puissance de ce texte poétique et ronflant de mots est à l'image de la mer: calme et en mouvement à la fois.
    3
    Yvonne Oter
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Je n'aime pas la mer! Je crois en avoir déjà parlé, après un texte de Cap'taine Suzanne. Mais je dois avouer que le texte d'Ana donne envie d'aller la voir de plus près! En le lisant, j'avais le goût du sel au bord des lèvres...
    4
    Colette
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    j'adore votre peinture de la mer
    5
    Jean-Pierre
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Ce tableau est plus vrai que nature. Il me rappelle ces derniers instants de vacances passés sur la plage dans le silence de la nuit naissante, où dansaient les dernières gouttes de lumière sur la crête des flots, avant le coucher du soleil, dans l'attente du Bal des 500...
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    6
    Laure
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Une façon originale de raconter la mer. Et quel beau couchant !
    7
    jackie
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Belle image et belle prose poétique. Ca fait rêver. Clap ! Clap ! Clap !
    8
    ANNA
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Belle évocation poétique de la mer.
    Bravo Ana Surret !
    9
    Marie
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Cette présentation de "l'immensité" aux reflets métalliques est une vraie splendeur, et la prose qui l'accompagne est à ravir. Compliments ! Ana.
    10
    Joël
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Quel talent dans les mots et l'image dans cette manière de nous présenter la Mer. Bravo Ana !
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