• Le bal des 500 (12)





    Pour son entrée en scène, Suzanne Alvarez, notre maîtresse de cérémonie, nous propose une escapade singulière : rien moins qu’une petite promenade du côté des cimetières de Nice à la rencontre d’hommes et de femmes illustres…





     






    L’endroit de toutes les égalités.


    Bien sûr, il y a celui du " Château " qui domine toute la ville, au-dessus de la Promenade des Anglais et dont on dit qu’il est l’un des plus beaux de France (au Monde disent les gens d’ici), et où j’aime flâner après avoir traversé le Vieux-Nice. Le grand portail à peine franchi, je vais toujours saluer en premier le romancier et père de Rouletabille, Gaston Leroux. Au détour d’une allée, je m’incline devant Léon Gambetta, homme politique français sous la Troisième République. Et puis, plus loin, beaucoup plus loin, je vais à la rencontre de René Goscinny que je trouve souvent en grande conversation avec Astérix et le Petit Nicolas.

    J’aime bien aussi me balader dans celui de " Cimiez ", tout aussi illustre et monumental, où séjournent le peintre Henri Matisse et puis aussi Roger-Martin-du-Gard : Les Thibault vous connaissez, n’est-ce pas ?

    Mais celui que je préfère se trouve à quelques rues de chez moi, et après une envolée de marches qui mène à la colline. J’ai découvert, un peu en retrait des agitations de la ville, cet endroit paisible, serré entre une église et un couvent, il y a un an de cela. Ce lieu, plein de charme et de sérénité, abrite quelques familles niçoises prestigieuses, comme le peintre Cyrille Besset ou Charles Delmas, le célèbre architecte. C’est un petit cimetière de campagne, le plus vieux de Nice : " Le cimetière Saint-Barthélemy ".

    Dans la partie ancienne, au-dessus d’un petit escalier, j’étais tombée en arrêt, un jour, devant une modeste tombe sans entourage et quasiment abandonnée. C’était en octobre 2008, il me semble bien. Pas de socle, rien que des gravillons la recouvrent. Et sur la stèle de pierre, surmontée d’une simple croix, en pierre elle aussi, voici ce que j’ai lu : " Marie-Geneviève Laure La Poittevin de Maupassant- née à Rouen Seine Inférieure- le 28 septembre 1821-morte à Nice le 8 décembre 1903 ". Jugez de mon étonnement ! Moi qui ignorais que la mère à Guy de Maupassant était Niçoise. Cette passionnée de belles lettres parlant couramment l’anglais, et l’italien surtout, recevait souvent la visite de Gustave Flaubert. Juste à côté d’elle, Jean Behra, champion automobile des années 50 lui tient compagnie. Plus loin, en contrebas, se trouve la chapelle funéraire de la Comtesse Emmanuelle Potocka, une de ses maîtresses, la seule femme, après sa mère bien sûre, qui ait vraiment compté pour Guy de Maupassant, qu’il avait surnommée " Sa gamine " et à qui il écrivait : " Je t’aime, je te cherche. Je tiens encore ton ombre chaude dans mes bras. ".

    Voilà, vous savez tout ou presque. Je suis retournée tout dernièrement dans ce petit cimetière de Saint-Barthélemy pour prendre cette photo, pour vous, amis nouvellistes, dont Maupassant est souvent la référence, mais également pour vous, amis poètes, puisque poète, il l’était aussi. C’était le 2 octobre. C’était la St Léger. Et il faisait si beau. 



  • Commentaires

    1
    Jean-Pierre
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Entre la parution d'un "bouquet de plumes", la description de lieux souvent oubliés par les Niçois, et tes aventures sur le Pythagore, voilà qui laisse à penser que tu as tout d'une femme orchestre. Merci, Suzanne, de nous montrer toutes les facettes de ta personne, si je puis m'exprimer ainsi! 
    2
    Solange
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Des pages d'autrefois sur une musique de Haendel. C'est agréable à lire et à entendre en dégageant un parfum de nostalgie. Bravo, Suzanne pour ce joli texte 
    3
    Florence
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    -Je tiens encore ton ombre chaude entre mes bras-. On savait parler aux dames à cette époque.Vivement le retour au Romantisme!
    4
    Yvonne Oter
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Un samedi soir, après une journée bien active, qu'il est doux de se reposer dans les souvenirs évoqués, avec quel talent, par Suzanne. Sur une musique parfaitement associée au doux-amer de ses propos, il n'y a plus qu'à se laisser aller. Et à rêver.
    Merci, Cap'taine.
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    5
    Christiane
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Voilà une visite fort insolite dans un lieu qui fait partie de notre patrimoine et que l'on a tendance a laissé dans l'oubli. Heureusement, Suzanne, comme toujours, est là pour nous en rappeler l'existence à l'occasion de la Toussaint.Si le soleil est de la partie, il n'en sera que plus agréable d'y aller le visiter à l'occasion lors d'un passage à Nice.
    6
    Alex
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Il y a fort longtemps, dans ma jeunesse, il y avait un terrain de camping près de l'aéroport de Nice. Je me rappelle d'une nuit sans sommeil...
    Existe-t-il toujours? Je garde aussi l'image du marché où chacun donnait de la voix pour vanter ses produits. Qu'en est-il en 2009?
    J'ai besoin d'un bon cicérone, Suzanne, car tu sembles bien connaître le terrain.Si l'envie me prenait d'aller y camper de nouveau, puis-je compter sur toi? Il y aura un resto à la clef.
    7
    Lastrega
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27
    Merci mes amis pour vos délicieux commentaires. Et pour répondre à tes interrogations, Alex, je ne pense pas que ce camping existe encore. Je crois bien qu'il a été remplacé par un emplacement réservé aux campings-cars et caravanes seulement. Et pour ce qui est du marché de la Vieille Ville, il est toujours à sa place, toujours aussi bien achalandé, et on entend surtout crier du côté du marché au poisson : "Che bella putina !" (c'est de la petite friture je crois). Quant au marché aux fleurs, toujours aussi beau. Voilà !

    Et pour en revenir à Guy de Maupassant, je voulais retranscrire ici, pour mes amis, qui ne connaissent de lui que ses nouvelles, une de ses poésies qui a ma préférence. La voici donc : 

    NUIT DE NEIGE

    La grande plaine est blanche, immobile et sans voix.
    Pas un bruit, pas un son ; toute vie est éteinte.
    Mais on entend parfois, comme une morne plainte,
    Quelque chien sans abri qui hurle au coin d'un bois.

    Plus de chansons dans l'air, sous nos pieds plus de chaumes.
    L'hiver s'est abattu sur toute floraison ;
    Des arbres dépouillés dressent à l'horizon
    Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.

    La lune est large et pâle et semble se hâter.
    On dirait qu'elle a froid dans le grand ciel austère.
    De son morne regard elle parcourt la terre,
    Et, voyant tout désert, s'empresse à nous quitter.

    Et froids tombent sur nous les rayons qu'elle darde,
    Fantastiques lueurs qu'elle s'en va semant ;
    Et la neige s'éclaire au loin, sinistrement,
    Aux étranges reflets de la clarté blafarde.

    Oh ! La terrible nuit pour les petits oiseaux !
    Un vent glacé frissonne et court par les allées ;
    Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux,
    Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.

    Dans les grands arbres nus que couvre le verglas
    Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ;
    De leur oeil inquiet ils regardent la neige,
    Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.

    Guy de Maupassant


    8
    ANNA
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27

    Derrière la danse d'Haendel aux accents lugubres qui touchent à la grâce, les deux photos pleines de charme et le texte dépouillé d'artifices, se faufilent des explosions lyriques d'une grande mélancolie. N'était-ce pas le plus bel hommage que Suzanne pouvait faire à tous ces chers disparus ? Merci pour cette magnifique rêverie !

    9
    Lastrega
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27

    C'est gentil ! Anna. Mais Patrick le barman de Calipso a largement contribué à cet hommage, par une belle mise en place du texte, des photos et de la musique.

    10
    Monique
    Samedi 23 Août 2014 à 18:27

    Un morceau sublime pour un retour à des années lointaines.Bravo.

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