• La deuxième vague (6)


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    Lieber Herr Gott (2/2)

     

    par Ernest J. Brooms 
      

    Lieber Herr Gott.

    Venons-en à Marc, le mari de la blonde Anne. Le meilleur ami d’André. Comment le treizième le tenait-il ? Par Madeleine ou Brigitte ? Ni l'une, ni l'autre. C'était Jean. Son voisin de droite. Un jeune homme fragile, frêle même. Le contraire de Marc, large, velu, trapu, la barbe forte, les bras charnus. Le treizième avait remarqué la différence, la complémentarité.

    Il avait convoqué Jean dans la sacristie, lui avait offert du vin. Du malaga. Le vin du dimanche ! Jean avait parlé. Il ne s'était jamais senti homme. Il n'osait même pas regarder son propre sexe. Quant aux femmes, il refusait d'y penser. Quelle horreur ! S'enfouir en elle, jamais ! Le treizième pensait avoir trouvé la solution. Surtout depuis qu'il avait aventuré une main exploratrice sur le corps fragile de Jean. Et que Jean se taisait. Achevait la bouteille de Malaga.

     

    Lieber Herr Gott.

    Direction, la sacristie ! Jean - qui ne refusait plus rien au treizième - accepta de s'y enfermer, de simuler une crise de déprime, de se rouler par terre, de crier, de hurler ! Le treizième, affolé, appela Marc, voisin de la cathédrale et bedeau : il fallait enfoncer la porte pendant qu’il courait avertir un médecin ! La porte ne résista pas. Et Marc trouva Jean en larmes. Le prit dans ses bras. Le consola si bien qu'il y prit goût. Marc fut agréablement surpris, étonné... Lui qui était exaspéré par cette manie qu’avait sa femme à vouloir le tenir serré dans un étau mental comme pour se moquer de sa force physique... Tandis que Jean était doux. Ne demandait rien. Le laissait respirer. C'est ce que Marc expliqua, navré, gêné, au treizième de retour dans la sacristie. Et Marc se fit plus menaçant : le treizième avait intérêt à ne pas ébruiter l'affaire !  Bien que la situation ne soit pas si anormale de nos jours. Mais la blonde Anne ne comprendrait pas !  Ni les autres ! Ni personne !

     

    Lieber Herr Gott.

    La deuxième et la quatrième à gauche,  devant, Madeleine et Brigitte, deux anciennes de l'École des Sœurs de la Charité, ne s'étaient jamais quittées. Célibataires et bien pensantes. Leurs fous rires, à propos de n'importe quoi, amusaient beaucoup le treizième. Elles avaient refusé de venir seules aux répétitions privées. Alors le treizième s'était résolu à les entendre toutes les deux. Dieu est Amour mais l’homme aussi ! C’est une question d’équilibre, ânonnait-il.

    Simon et Luc étaient célibataires. Du même âge approximativement.

    Vous n’y pensez pas,

    Qu'en savez-vous ? Vous avez déjà connu un garçon ? Non ? Venez plus près. Asseyez-vous.

    Le treizième désigna à chacune une de ses grosses jambes. Elles y prirent place, face à face.

    Le Seigneur vous a faites belles. Ce n'est pas pour gaspiller cette beauté en pures égoïstes que vous êtes ! Cela doit cesser !

    Madeleine et Brigitte baissèrent les yeux. Les grosses mains du treizième entreprirent d'ouvrir les deux chemisiers en même temps. Pour synchroniser le mouvement, ânonnait-il. Il dégagea les épaules de chacune, libéra deux paires de jeunes seins tout neufs, frissonnants et parfaits. Il les embrassa longuement, un à un, précieusement. Madeleine et Brigitte s'en mordirent les lèvres. Après un long silence, le treizième les fit lever.

    Était-ce si pénible ?

    Échanges de regards. Rires étouffés.

    Revenez demain à dix-huit heures. Toutes les deux. Je veux que vous séduisiez Simon et Luc. De gré ou de force...

     

    Lieber Herr Gott.

    Ce qui fut dit fut fait. Madeleine et Brigitte ne durent guère se forcer.  Elles en éprouvèrent un plaisir inouï, jusqu’alors insoupçonné, séduisant chacune l'un et l'autre.

    Pour comparer, disaient-elles, en laissant éclater leurs rires. Simon et Luc s’en trouvèrent ravis.  Le treizième garda un souvenir particulier de cette victoire et un enregistrement sonore des ébats... qu'il fit d’ailleurs entendre aux quatre partenaires désormais complices et soudés. répliquèrent-elles, offusquées.

     

    Lieber Herr Gott.

    Restait Sarah, à l'extrême droite. Plus un homme, plus une femme disponibles. Alors le treizième se sacrifia. Pour l’équilibre des choristes, ânonnait-il. C'était la plus jeune. Bientôt seize ans. Et toutes ses illusions. Le corps à peine achevé. Elle devait revoir ses gammes. Le treizième les pianotait sur ses bras, ses genoux, ses jambes. Sarah n'y prêtait pas attention au début. Il lui expliqua qu'il était un père pour elle, qui avait perdu le sien. Il la gâta de petits cadeaux, elle qui n’en recevait jamais. L'emmena chez lui, une petite maison basse. Lui offrit des vêtements de femme. Bains chauds et parfums. Repas sucrés et siestes sous la couette. Quand Sarah repartait chez elle, en jean et tee-shirt usés, son pas était de plus en plus lent : elle attendait avec impatience le moment de retrouver son nid douillet, ses dentelles, ses parfums chez le treizième qui la dégustait comme une coupe de fruits exotiques. Et rares.

     

    Lieber Herr Gott.

    Les membres de la chorale Saint Brice étaient définitivement soudés. Le treizième pouvait s'adonner à son plaisir favori : les faire chanter !

    Les douze, gelés dans le noir de leurs habits, chantent. Le visage fixe. Dignes et inspirés. La cathédrale est remplie. La télévision locale les filme. L'évêque admire et chuchote, penché sur son voisin en soutane.

    La belle chorale !  Douze, douze comme les apôtres. Un exemple pour tous. Et le treizième, quel dévouement, quelle efficacité,  quel sens artistique ! N’est-ce pas ?

    L'abbé Paul approuve d'un acquiescement lent et prolongé.

    C’est vrai, Monseigneur. C’est tellement difficile de former un groupe, de lui garder toute sa cohésion et son équilibre ! Croyez mon expérience : je sais m’y prendre aussi, depuis plus de vingt ans que je fais chanter la chorale des enfants…  

    http://www.broomse.com


  • Commentaires

    1
    Samedi 13 Octobre 2007 à 20:15
    Rien à voir avec les gentils choristes de Jugnot! 
    Tout de même, drôle de conception du chant choral chez les Belges!

    2
    Dimanche 14 Octobre 2007 à 10:17
    Clap ! Clap ! Clap ! Quelle prestation ! Quelle accoustique !
    3
    Mercredi 17 Octobre 2007 à 22:06
    Choqué(e) ? Choquant ? Trop difficile à suivre ? C'est vrai qu'ils sont douze... treize, pardon ! Allons, chantez maintenant !
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