• Histoire de passer le temps

    Histoire de passer le temps

    On ne trouvait pas l’information dans la seule presse locale ; de nombreux médias avaient couvert l’évènement. C’est pourquoi je suis allé voir ce qu’il en était de ces drôles de machines qui distribuent de la littérature en deux temps trois mouvements. Un mode d’emploi des plus simples : on presse au choix un des trois boutons lumineux de la console correspondant à une durée normalisée de lecture : une minute, trois minutes ou cinq minutes selon votre humeur ou votre temps de cerveau disponible ; et voilà un rouleau de papier imprimé plus ou moins long qui sort des entrailles de la machine. Enfin, quand ça veut bien fonctionner. Ma rencontre avec la première, installée dans le hall d’un endroit stratégique de la ville, ne m’a rien donné et est restée inactive et muette. Bon, je ne m’attendais pas à ce qu’elle cause, mais au moins qu’elle affiche un petit mot d’excuse genre désolé votre demande n’a pu aboutir, réessayez ultérieurement ! Le genre de message qu’affectionnent les machines un tant soit peu instruites. Résultat, j’ai fait comme on fait avec n’importe quel distributeur réticent, je lui ai filé quelques claques sur les flancs avec l’air de celui à qui on ne la fait pas. Sauf qu’il est resté de marbre, il n’a pas bronché, rien ! Bref, il n’a pas craché le morceau et je suis reparti bredouille.

    La seconde n’était qu’à quelques encablures et aussitôt sur les lieux, j’ai tenté le coup avec le bouton cinq minutes. Peut-être aurais-je dû me contenter du trois minutes mais cinq était le temps qu’il m’avait fallu pour faire le trajet et je me suis dit que ça établirait une certaine connivence temporelle. On a de ces idées parfois ! Le cinq comme le trois et pas plus que le un sollicité après-coup, ne se sont déridés. Pitoyable ! Je n’ai pas refait le coup des claques même si ça me démangeait. Faut dire que la dame à l’accueil semblait n’avoir d’yeux que pour moi. Bon, j’étais le seul visiteur, mais quand même ! Je lui ai demandé comme ça, l’autre là, enfin le truc qui pond des histoires, il fait la gueule ou quoi ? Elle a juste dit, j’en sais rien, j’suis nouvelle, on m’a rien dit, je peux pas tout faire et moi les histoires, vous savez… Comme je n’avais pas envie de lui en faire, j’ai pris mes cliques et mes claques.

    L’histoire aurait pu tourner court si je ne m’étais pas arrêté sur le chemin du retour dans une de ces officines que l’on appelle encore bibliothèque. Bon, la suite n’est pas difficile à imaginer, un distributeur trônait fièrement au beau milieu du hall et une bibliothécaire m’invita d’emblée à expérimenter sa belle mécanique. Voyant ma moue dubitative, elle ajouta ça ne vous prendra pas plus d’une minute, puis après un moment d’hésitation ou trois minutes, voire cinq si vous avez envie de quelque chose de plus long…

    J’ai eu droit à une sorte de ticket de caisse de soixante-dix centimètres de long sur lequel j’ai pu lire le récit plutôt plaisant de « Marthe ou le réveil d’une grande dame délaissée » signé Smoothi (en petits caractères). Rien de plus sur l’auteur(e) comme si cela n’avait aucune importance, comme si à l’avenir la machine pourrait elle-même produire ses petites histoires… pour passer le temps !


  • Commentaires

    1
    Martine
    Lundi 26 Octobre 2015 à 13:58

    Et alors? Verdict? (même si je le subodore grandement! ;-)

      • Lundi 26 Octobre 2015 à 21:07

        Joker !

    2
    Lza
    Lundi 26 Octobre 2015 à 16:32

    ça vous apprendra à faire confiance aux machines!

    3
    Lundi 9 Novembre 2015 à 12:51
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