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    Comment bien foirer en essayant de faire la grasse matinée

    Ysiad (avec la collaboration de Poiluchet)

     

     

     

    Nous poursuivons la série « foirer, c’est bien, mais bien foirer, c’est mieux » en abordant un sujet qui nous est vital, à savoir le sommeil. Le sommeil, c’est tabou. Faut pas s’aviser d’y toucher.

     

     

    Il est étonnant de constater à quel point les choses se liguent pour vous empêcher de dormir au moment où vous en avez le plus besoin. Il est d’autant plus important de bien dormir que du lundi au vendredi, vous vous épuisez à prendre des transports en commun bondés pour aller travailler, lesquels vous ramènent au bercail en vous faisant subir toutes sortes d’avaries qui plombent le moral et dilapident le peu de temps de détente dont vous disposez avant de vous relancer, dès le lendemain, dans le bruit et la fureur. Une fois à la maison, les choses ne s’arrangent guère. Le quotidien exerce une telle emprise que bien souvent, au lieu de faire de beaux rêves auxquels vous pourriez légitimement prétendre à l’issue d’une journée passée à subir les humeurs du patron, voilà qu’à peine la tête posée sur l’oreiller, vous plongez dans un enfer de monstres grouillants à queue de reptile. Vade rétro, sale cauchemar. Et toi, le chat, va au pied du lit, tu pèses. Pas possible, vraiment. Comment faire pour pouvoir dormir sereinement, et sans bestiau sur le ventre, surtout le week-end ?

     

    Pour bien baliser le terrain, il faut éliminer les obstacles, au premier rang desquels figure le bruit. Le bruit est votre ennemi numéro un et bien sûr, il est omniprésent. Une seule solution : la Boule Quiès (BQ). Il vous en faut une paire, parce que vous avez deux oreilles. Une dans chaque. Pas de jaloux. Pas deux dans la même, non, ça ne marche pas.

     

    Bien évidemment, le tiroir de la salle de bains ne renferme que d’immondes résidus poussiéreux vaguement rosâtres, qui furent un jour de magnifiques BQ enrobées dans une délicate couche de ouate, mais qu’il est inenvisageable aujourd’hui de se refourrer dans les oreilles sous peine d’attraper une méga infection du conduit auditif. Commencez par jeter les vieux résidus immondes et poussiéreux et courez acquérir à la pharmacie une nouvelle boîte de ces BQ vitales pour votre équilibre. Le pharmacien vous attend derrière le comptoir (il n’y a pas que le bar qui possède un comptoir, la pharmacie aussi). Et, ô miracle, il n’y a personne devant vous, l’idée d’être tout de suite servie vous grise, cependant méfiez vous de votre fougue habituelle qui pourrait vous amener à dire : Bonjour Monsieur, je voudrais une paire de Boules Q. Même si le pharmacien n’a rien d’un pépère pervers, il pourrait croire que vous sous-entendez un truc cochon derrière votre air sage et cela vous mettrait dans une situation embarrassante. Dites sobrement qu’il vous faut une boîte de boules Ki-Yesse et basta. Bien. Le pharmacien s’éclipse pour revenir avec la sympathique petite boîte blanche et plate qui renferme les clés de votre sommeil, et si par hasard il vous demande si vous savez comment vous les loger, les Boules Q, dites que oui, vous avez une grande habitude de la chose, et arrêtez-vous là, car à supposer que vous n’en ayez pas la moindre idée, il y a un dessin en guise de mode d’emploi dans la petite boîte blanche et plate que le pharmacien vient de vous remettre en vous jetant un regard lubrique. Obsédé, va.

     

    Le premier obstacle à votre sommeil réparateur étant éradiqué, passons à la suite.

     

    Sur le seuil, alors que vous tentez d’introduire la clé dans la serrure déglinguée, un deuxième obstacle vous attend derrière la porte, en la personne du matou. Le vôtre fait partie de ces animaux très casse-bonbon qui réclament à bouffer sur le coup de six heures du mat’ et qui ne conçoivent pas de faire leur nuit ailleurs que sur votre lit. C’est comme ça. Il n’y a rien à faire. Le chat, c’est avec vous qu’il veut dormir. Avec personne d’autre. Oh bien sûr, vous avez tenté de l’en dissuader en claquant fermement la porte de la chambre, mais le lendemain, la cuisine ressemblait trop à Fukushima pour envisager qu’il se la prenne une deuxième fois dans la truffe. Donc Poiluchet dort avec vous, plus précisément il ventouse votre ventre, une habitude qu’il a prise en devenant ce gros mâle sénescent qui vous lorgne de son oeil jaune en vous signifiant qu’on n’a pas intérêt à badiner avec l’horaire de ses repas. Pour avoir la paix, remplissez bien sa gamelle ; lesté comme il est, il y a très peu de chances qu’il vienne faire sa danse de la faim avant neuf heures. Et s’il vous réveille, gare. A défaut de pouvoir le faire entrer dans le four, vous essaierez de le vendre sur e-Bay. Encore quelques croquettes, mon Poiluchet ? 

     

    Ce deuxième obstacle étant évincé, buvez une tisane, détendez-vous, retapez les oreillers, écoutez de la musique de chambre, lisez quelques pages de doctrine comptable, vissez vos Ki-yesse à gauche, à droite, et dodo. Et toi, le bestiau, tu restes au pied du lit. Allez. On dort.

     

    A trois heures une, une mouche entre dans la chambre. A trois heures deux, Poiluchet se gratte vigoureusement l’oreille gauche. A trois heures trois, il s’étire. A trois heures quatre, une boule Q glisse de votre oreille droite. A trois heures cinq, vous ouvrez un œil. 

     

    Bravo, en plein dans les esgourdes, tout est parfaitement normal, c’est foiré !

     

    Ben maintenant, y a plus qu’à chasser la mouche hors de la chambre, retrouver la boule qui a glissé sous le lit, la revisser du bon côté, pousser Poiluchet qui s’est mis en travers du lit, et vous rendormir en espérant faire de beaux rêves.

     

    … Mais si par miracle, à sept heures cinquante deux, votre belle-mère appelle pour vous apprendre qu’aujourd’hui, Monoprix fait des offres promotionnelles sur les lots de saucisse fumée au bois de hêtre, alors vous pourrez estimer que la grasse matinée est bien foirée.

     


  • Commentaires

    1
    Jeudi 16 Mai 2013 à 14:40

    Finalement, ce serait mieux que ce soit la belle-mère qui dorme au pied du lit et que ce soit le chat qui appelle. Encore que, une belle-mère, ça ronfle !

    Quelle superbe illustration de ce petit bijou d'Ysiad ! Merci Patrick.

    2
    Mardi 16 Juillet 2013 à 10:49

    Moi, j'ai déjà éradiqué la belle-mère. Reste plus que le chat. Ça, c'est un gros morceau.

    3
    Lza
    Samedi 23 Août 2014 à 18:01

    Et le savon anti-crampes, alors?

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