• coiffeur-image2.jpg

    Un coup de peigne et ça repart ! Aujourd'hui c’est Jean Calbrix qui passe la shampooineuse ; une bien belle fantaisie crinesque à peine tirée par les cheveux…

     


    Chacun a ses zones érogènes, lieux de délices dans la géographie du corps que le partenaire prend plaisir à découvrir lors des joutes amoureuses. Il suffit que ces lieux secrets soient effleurés du bout des doigts ou de la langue, et il en naît une bouffée de plaisir allant parfois jusqu'à la pâmoison.

    Pour ma part, très tôt, j'ai su combien de jouissance je pouvais tirer de mon système capillaire, et quand petit enfant, je me blottissais dans le giron de ma mère le front bloqué sur son ventre doux, je ressentais un plaisir immense m'envahir des pieds à la tête lorsque ses doigts délicats me gratouillaient le sommet du crâne, glissaient derrière mes pavillons auditifs et descendaient me fourrager la nuque. Par contre, lorsque mon père passait par-là et nous surprenait dans cette position, sans doute animé par un profond sentiment de jalousie, il me passait ses gros doigts calleux dans la tignasse en s'esclaffant : "Alors ! on aime les papouilles", et le plaisir bloqué net, je grimaçais de dégoût.

    Vint l'adolescence et mes premiers émois amoureux. Je quittai ma mère pour d'autres bras, mais jamais je ne pus retrouver les sensations fortes qu'elle m'avait procurées. Mes partenaires ne prenaient que peu de plaisir à me chercher des poux dans la tête, et malgré mes supplications, elles se lassaient bien vite de ce qu'elles interprétaient comme des lubies de maniaque. C'est ainsi que, dans cette danse du scalp, je fus amené à changer continuellement de cavalière. Seulement, je n'avais rien d'un Apollon avec ma petite taille, mes membres noueux et mon visage ingrat hérissé de verrues. L'âge n'améliora pas les choses, et mon sex-appeal intéressa de moins en moins la gent fémine. J'en fus réduit à payer quelques prostituées pour satisfaire mon vice. Mais là, j'avais encore moins de contentement qu'avec mes petites amoureuses et bien souvent, je n'en avais pas pour mon argent.

    C'est alors que, chez les capilliculteurs, vint la mode de laver la tête des clients avant de faire la coupe. La première fois qu'on me lava les cheveux, ce fut un véritable délice. La petite employée m'emmaillota comme un marmot puis me prit la tête à deux mains et me la posa délicatement dans le réceptacle en zinc. Ensuite, une pluie délicieusement tiède ruissela sur mon crâne et des doigts de fée glissèrent dans mes cheveux comme des anguilles au milieu des algues. La fraîcheur du berlingot de shampooing me fit fermer les yeux puis le massage du cuir chevelu commença. Quelle félicité que cette errance de dix petits lutins dans le foisonnement de ma tignasse emmoussée. La petite était une experte. Ses gestes voluptueux partaient en petits cercles à peine appuyés sur le sommet de mon chef puis descendaient doucement jusque derrière les oreilles. Le doux mouvement de va-et-vient me porta aux nues et j'atteignis le septième ciel lorsque la caresse vint mourir dans ma nuque. Je me cramponnai aux accoudoirs du fauteuil et je poussai un petit cri. La petite crut qu'elle m'avait fait mal et s'en excusa. Les yeux mi-clos, je fis un geste de dénégation, et elle prit un moue étonnée. Heureusement que la chasuble dans laquelle j'étais enveloppé cachait mon pantalon, car elle aurait sûrement remarqué, sous l'étoffe de celui-ci, cette chose proéminente et dure que sa douceur avait fait naître en moi.

    Et puis, félicité des félicités, après m'avoir rincé les tifs, elle me rechampouina et ses doigts agiles et doux reparcoururent mon crâne dans un même mouvement d'approche circulaire autour de mon occiput. Le bout de son sein vint m'effleurer l'épaule et je crois bien qu'alors, mes glandes reproductrices explosèrent dans mon linge intime.

    Par la suite, il ne se passa pas quinze jours sans que, poussé par mes pulsions, je ne retournasse chez le coiffeur. Il fut même un temps où je m'y rendis toutes les semaines, et celui-ci s'étonnait à juste titre de cette rage que j'avais d'avoir le poil ras. Mais pouvait-il se douter que je fréquentais son établissement comme d'autres fréquentent les lupanars ?

    Et puis, ma petite shampouineuse disparut. Le coiffeur m'annonça qu'elle venait de se marier et que son mari lui avait imposé de ne plus travailler dans le salon de coiffure. J'en eus énormément de chagrin, d'autant que sa remplaçante avait le geste vif et brutal, et que dans ces conditions, il n'était plus question d'accéder à l'orgasme. Je me résolus à changer de crémerie et j'errais ainsi de salon de coiffure en salon de coiffure, à la recherche des caresses qui m'avaient fait connaître le Nirvana. Ma quête fut longue avec parfois la rencontre de petites mitraillettes me procurant des petits plaisirs, mais jamais de canon me foutant le feu aux poudres.

    Et puis, je connus Lucette. Merveilleuse Lucette ! Elle n'avait pas son pareil pour vous frottouiller les tempes avec ses petits pouces grassouillets. Ecartant ses doigts comme les dents d'un peigne à carder, elle vous les faisait glisser voluptueusement du front jusqu'à la nuque tout en laissant traîner deux petits doigts mutins sur les pariétaux. Quand j'en parle, j'en ai la chair de poule.

    Un jour, pressé d'aller au rendez-vous de mes papouilles, j'omis de faire ma toilette. Ce n'était pas dans mes habitudes de me pointer à la capilliculture le cheveu poisseux, et je mettais toujours un point d'honneur à m'y rendre le poil lustré, courant le risque de m'entendre dire que le shampooing serait inutile. Mais, de ce côté, il n'y avait rien à craindre ; le coiffeur s'exécute du moment qu'on le paye. Or donc, et comme je suis mécanicien, je pénétrai chez le barbier avec une lotion de cambouis dans les mèches. Quelle ne fut pas ma surprise d'avoir droit à trois shampooings. Mon excitation fut à son comble et quand Lucette eut fini son dernier rinçage, elle dut presque me réveiller pour me passer la serviette sous le cou tant la pâmoison m'avait laissé dans un état d'anéantissement extrême.

    De ce jours, je me rendis chez le coiffeur le cheveu poisseux pour avoir droit à mes trois shampooings. Puis, une idée machiavélique germa dans ma cervelle. Si une chevelure sale donnait droit à trois shampooings, il était fort possible qu'une chevelure très sale donnât droit à quatre shampooings, voire cinq si elle était très très sale. Dès lors j'essayai un peu tout, la boue, le charbon, le beurre, l'oeuf... rien n'échappait à ma perspicacité. Comme de fait, l'oeuf fut très efficace et il fallut cinq shampooings pour en venir à bout. Dans mon délire, j'allais jusqu'à me coller de la peinture dans les cheveux. Le coiffeur s'en étonna. Il me fallut inventer un mensonge et je lui répondis que j'avais repeint l'intérieur d'un placard de ma cuisine mais que cela devait partir facilement car ce n'était que de la peinture à l'eau. En vérité, c'était une bonne peinture glycérophtalique à peine soluble dans le white-spirit. Comme j'étais un bon client, le merlan n'osa pas me dire d'aller me faire voir et il ordonna à Lucette de me shampouiner copieusement.

    Cette fois-ci, elle fit la grimace et je n'eus pas ma dose de jouissance. Elle s'énervait sur mes mèches empeinturlurées, et plus elle s'énervait, plus elle me tirait sur les tifs. Après six shampooings, elle frottait comme une folle, me faisant venir les larmes aux yeux. Je mis à regretter amèrement mon inconséquence. Puis, elle cessa de frotter et j'en ressentis un immense soulagement. Dans le même temps, je l'entendis crier derrière moi à son patron :

    - J'y arrive pas, monsieur Marcel.

    - Qu'est-ce qu'il t'arrive, ma petite Lucette ? lui répondit la grosse voix du patron. Tu as trop fait la java hier soir, tu n'as plus de nerf.

    C'est alors que je sentis deux grosses pognes s'abattre sur mon crâne et se mettre à me gratter le cuir chevelu avec la plus grande des énergies. Une décharge électrique me parcourut l'échine. Je me ratatinai en bandant tous mes muscles, puis je me propulsai hors de mon fauteuil comme un chat qu'on asperge. A moitié aveuglé par la mousse qui dégoulinait sur mes yeux, je fonçai vers la sortie en renversant le portemanteau au passage. Je me cognai à la porte et je cherchai la clenche à tâtons. Je finis par ouvrir et je me ruai à l'extérieur avec mon casque de neige sur le sommet de mon crâne, tout en m'emmêlant les crayons dans la barbotteuse capillifère qui venait de me tomber dans les jambes, tandis que le patron me criait du pas de la porte : "Mais enfin, monsieur, revenez ! Ça commençait à partir !"

    Jean Calbrix


    6 commentaires

  • dedicace-image.jpg

    Après " A propos de… " crée la semaine dernière, une nouvelle rubrique voit le jour au menu du café : " Au cœur de… ". L’idée est de rendre compte, sous forme de reportage, d’une expérience inédite et insolite dans le champ de la littérature : à travers les concours (nouvelles, roman, poésie…), du côté des salons, de l’édition, des libraires, des bouquinistes, dans les bibliothèques, les "Village du Livre", ou encore en classe avec les " lectures expliquées ", sur scène avec les " lectures théâtralisées "… Cette rubrique est ouverte et nous vous invitons - visiteurs, lecteurs, auteurs - à participer à cette aventure journalistique…

    Pour ce premier numéro, Danielle Akakpo nous livre une épreuve de dédicaces plutôt décoiffante…

       

    J’arrive, tendue, l’estomac serré, je n’aime pas trop m’exposer. La table est prête, recouverte d’une nappe noire à dessins blancs. Bouteille d’eau, gobelet, comme si j’allais donner une conférence ! Manque juste la provision de livres. Évidemment, j’ai une demi-heure d’avance ! Je me présente au rayon livres, accueil chaleureux. Thierry, mon " contact ", pointe son nez, sourire aux lèvres, me conduit dans son bureau où nous devisons quelques instants. À 15 h, les dix exemplaires de Un Homme de Trôo sont disposés sur la table. Pourquoi dix ? Parce que c’est tout ce qu’il restait chez PLE éditions qui n’a pas eu le temps de rééditer, et parce que la FNAC a refusé de reporter une séance de dédicaces accordée depuis, disons un certain temps, à une chargée de com, licenciée ou partie de son plein gré sans l’intervalle, qui n’avait pas pris la peine de s’assurer que les bouquins seraient disponibles. Y a bien qu’à moi que ça arrive, ces choses-là ! Jusqu’à seize heures, calme plat. La famille, les amis, ça fait belle lurette qu’ils l’ont eu leur exemplaire dédicacé, ils ne vont pas encore se pointer pour prendre un bain de foule ! Quoi que, tout bien considéré, je ne vois pas passer grand monde dans le magasin : fin janvier, trop près des fêtes, fin de mois difficile, ou bien ils sont tous aux soldes de fringues ? Enfin, une élégante dame aux yeux un peu trop charbonneux à mon goût s’approche. Ce qui l’intéresse, ce n’est pas vraiment le livre, c’est l’expérience de coécriture. Elle n’écrit pas, elle, elle peint, depuis toujours, et elle envisage de s’associer avec un ami sculpteur pour un projet artistique pas encore bien défini. Elle finit par la sortir la question qui la titille : peut-on être coauteurs sans que s’instaure une relation amoureuse ? Pour elle, la réponse est non, visiblement. Lorsque je lui explique que Jean-Noël et moi nous sommes rencontrés une seule fois et que nous ne correspondons que par mails, elle tombe de sa chaise, ou presque, de surprise (parce qu’elle s’est confortablement installée en face de moi !) Elle argumente, insiste lourdement, je campe sur mes positions, elle s’en va, sourire en coin, convaincue que je lui ai raconté des bobards, promettant de repasser. Désolée, Jean-Noël, nous sommes, pour la dame aux yeux de braise, les amants terribles qui ont mis au monde l’Homme de Trôo ! Elle est suivie de peu par un Stéphanois, exilé à Paris pour son boulot, qui regrette sa petite ville bien tranquille, qui taille un costard à tous les Parisiens qu’il déteste. J’en profite pour en tailler un à notre maire et nous nous rejoignons sur ce point : il faut que ça change aux prochaines municipales ! Après une demi-heure passée à me déverser ses états d’âme, il s’assure que je serai bien là jusqu’à sept heures, promet de revenir après être passé au distributeur. Il n’en a rien fait : j’espère qu’il s’est fait attaquer devant le distributeur, pire qu’il est passé sous un bus, bien fait ! Pour en revenir à l’accueil FNAC, c’est un vrai plaisir. Régulièrement, les vendeurs, le responsable de la séance de dédicaces passent me faire un petit coucou, me demandent comment ça va, si je veux un peu plus d’eau. J’aurais besoin de quelque chose de plus corsé, mais vous me voyez demander un doigt de whisky ? Un vendeur HIFI me conseille de me dégourdir les jambes et me montre le chemin des toilettes où je m’engouffre dans celles… des hommes ! Ma seule bonne résolution prise le 1er janvier 2008, être moins étourdie, ne tient décidément pas la route !

    Ce qui m’a frappée, cet après-midi-là, c’est l’impression de voir passer et repasser toujours les mêmes individus. Pour ça, j’ai l’œil : celui-là, serré dans son petit blouson de cuir, celle-là avec sa jupe à volants, ces deux amoureux scotchés l’un à l’autre, et tant d’autres, ils ont erré d’un rayon à l’autre, ils ont tourné en rond, de quatre à sept ou presque ! Ma foi, ils ont bien raison : ici, il fait chaud, on peut feuilleter des livres, écouter de la musique, regarder la télé, s’asseoir, tout ça sans dépenser un centime.

    Le sosie de Sim avec son bonnet enfoncé jusqu’aux yeux, ça faisait un moment que je l’avais repéré, qu’il rôdait autour de ma table. Il finit par se décider. Il m’a reconnue, il m’a acheté un livre sur la guerre d’Algérie à la fête du livre de Saint-Étienne. J’ai du mal à garder mon sérieux ! La guerre d’Algérie, non, ce n'était pas moi, pas plus que celle d’Indochine, de 39-40, du Golfe, Guerre et Paix non plus ! Bref, il écrit lui aussi, des chansons, musique et paroles. Par contre il fait une faute à chaque mot. Est-ce que je connais un remède ? Pas vraiment. Chez lui, c’est d’origine psychiatrique, me confie-t-il. Ben, pas seulement l’orthographe, mon ami, me dis-je ! Il embraie ensuite sur les Don Quichotte, les sans abri, les magasins de luxe, les sans papiers, revient aux grandes guerres, comme s’il les avait toutes faites. Je suis soulagée quand il me serre la main et se dirige vers la sortie.

    Je ne m’attarderai pas sur ceux qui passent leur chemin en lançant un regard condescendant, avec un sourire narquois qui sous-entend : " Encore une pauvre écrivaillonne qui essaie de vendre sa daube ! " Parce qu’il y a aussi les gentils qui disent bonjour, puis au revoir en s’en allant. Et les naïfs qui s’extasient : " Vous êtes de St Etienne ? Et vous avez écrit un livre ? Ça alors !" Ben oui, y en a un paquet de gens qui écrivent à St Etienne, y a pas que des gars en maillot vert qui tapent dans un ballon au stade Geoffroy Guichard. D’ailleurs, y en a-t-il seulement un seul de ces fouteux qui soit né à Sainté ?

    Les moments creux… l’horreur absolue ! Au début, je me suis demandé, riant intérieurement : " J’enlève le haut, j’enlève le bas ? J’aurais peut-être dû me faire une tête hérissée de mèches de toutes les couleurs, collées au gel ? "

    Après, j’ai hésité entre le :

    * Que diable suis-je venue faire dans cette galère ?

     *Mort aux cons ! (le titre du dernier bouquin que je viens de terminer, je ne vous le conseille pas spécialement.)

    * Ah ! si j’étais Michel Drücker ! " Là, je me suis imaginé la tête de mon homme allongé le soir aux côtés de l’indécrottable Monsieurvivementdimanche qu’il hait viscéralement, et j’ai pouffé !

    J’en ai quand même vendu quelques-uns, de ces Hommes de Trôo, je ne vous dirai pas combien, à des lecteurs qui avaient prêté attention au petit article-annonce dans le magazine de la FNAC. Des femmes, essentiellement, qui avaient eu un coup de cœur, souhaitaient en savoir un peu plus sur l’histoire. Ah ! le bonheur d’écrire un petit mot pour Mimounette, qui allait le recevoir en cadeau, pour Danièle ! Danièle, elle s’est arrêtée, les bras chargés de livres, elle l’a caressé, retourné dans tous les sens, le bouquin. Mais elle avait déjà beaucoup acheté, elle reviendrait. Et le mari s’est approché : " Mais prends-le donc, puisque tu en as envie, parce que la semaine prochaine, la dame, elle, elle va pas revenir pour te faire une jolie dédicace ! " Le regard qu’ils ont échangé, ce couple de quinquagénaires ! Y avait tant de soleil, tant d’amour au fond de leurs yeux… que ça m’a fait du bien.

    J’ai pensé aussi à quelques-uns et unes qui avaient promis de faire un tour, et ne sont pas venus ! Je me suis promis de ne plus leur adresser la parole, ou le mail ! Mais c’est déjà oublié, il y a plus important dans une vie qu’une séance de dédicaces. Je leur conserve toute mon amitié.

    Et puis, heureuse surprise, vers 18h, voilà que débarque un petit groupe d’ados du centre social de mon quartier, de ceux que je vais aider deux fois par semaine à faire leurs devoirs. Ils n’ont pas de fric, et quand ils en ont un peu, c’est pour recharger le téléphone portable, pour un baladeur, un CD, une BD. Mais ils sont venus, pour dire bonjour à m’dame, à celle qui leur ré explique les voies interrogative, négative, passive en anglais, qui donne un coup de main pour la rédac, l’explication de textes, qui pique un fou rire avec eux. Ils veulent même aller me chercher un café, un chocolat. Et ça, croyez-moi, ça m’a fait chaud au cœur.

    À dix-neuf heures, je rends mon tablier. Je récupère mon manteau dans le bureau de Thierry, on papote un moment en mangeant des petits gâteaux secs. Je reprends le tram, fatiguée, songeuse. Écrire, j’aime ça, c’est sûr, j’en ai besoin pour me sentir exister. Mais me mettre en vitrine, me vendre, c’est pas vraiment mon truc ! Vive le Net, vive le forum de Maux d’Auteurs, celui de À vos plumes, celui de Brooms, vive Calipso, Mot compte Double, tous ceux qui me font le plaisir d’héberger de temps à autre les délires de ma plume !

    Danielle Akakpo


    8 commentaires

  • Afgha-image-copie-1.jpg

    Il y a peu de chance que vous y soyez jamais allé. Ou peut-être n’y avez-vous séjourné que le temps d’une pellicule photo ? Ou d’une randonnée télévisuelle ? L’Afghanistan vous connaissez bien sûr ! Mujâhidins, Buzkashi, Loya Jirga, Tâlebân, Chadri, Hashish, Bazar, peuplent vos rêves… A votre réveil, vous ne savez plus trop de quoi il en retourne, les images masquent les mots… Qu’importe, le livre d’Ingrid Thobois vous permet de ressouder vos souvenirs sans avoir à vous soucier de leur exactitude. Vous allez laisser courir votre imagination soit, mais n’est-ce pas ainsi que vous avez appris à voyager ? Je vous entends sourire et pourtant vos yeux brillent, la lumière de Mazâr-i-Sharif vous accroche et Massoud n’est pas loin, toujours en résistance quelque part dans les neiges éternelles. Vous n’en êtes qu’à votre première théière, votre première boule de cannabis et vous voilà déjà en train d’éprouver les reliefs de cette terre farouche, de respirer ses saveurs ensorcelantes, de vous hasarder sur ses pistes brûlantes et lumineuses, de croiser en chemin des figures d’un autre siècle, d’entendre ces légendes qui courent par les montagnes, de caresser quelques uns de ses joyaux patiemment ciselés dans la roche, de faire bouillir votre sang dans un combat insensé ou encore de vous laisser aller dans l’ineffable lenteur du temps.

    Ce livre vous fera revivre une illusion peut-être. Mais quelque chose d’imprévu viendra aiguillonner vos pensées enfouies et nul doute que l’escapade réveillera en vous certaines de ces émotions sublimes qui font perdre l’équilibre. C’est à ce moment là, dans cette position hasardeuse qu’il vous faudra affronter l’exubérance, le débordement, vous exposer à l'échappée de vos désirs…vous aurez toutes les peines du monde à vous fier aux mots qui disent le doute, le manque et l’éparpillement de votre cœur… Vous ne saurez dire exactement les noms, les dates, les lieux au risque d’être pris par le regret ou la douleur, mais vous ne chercherez pas à prendre congé, chaque page, chaque phrase, chaque mot peut-être, viendra rappeler ces promesses insensées que vous aviez soutenues haut et fort quand votre soif d’absolu et votre appétit d’aventures vous faisaient prendre la vie à bras le corps. Défaire le monde pour le parfaire, disiez-vous alors. Et voilà que porté par le souffle héroïque d’un amour inédit, vous balayez d’un revers l’énigme de vos rides pour aller chercher encore et encore une histoire qui tienne la route...

    Le roi d’Afghanistan ne nous a pas mariés d’Ingrid Thobois aux Editions Phébus, 148 pages, 13,50€


    2 commentaires

  • Ce n’est pas parce qu’elle n’en mène pas large, qu’elle ne saura pas vous emmener au large… Ami(e)s de la Loire, du Rhône, de l’Isère et des eaux peut-être plus lointaines, Danielle Akakpo, vous invite à partager le prélude à la lecture de son roman Un homme de Trôo co-écrit avec Jean-Noël Lewandowski. Embarquement samedi 26 janvier 2008 de 15hH à 19H à la FNAC de St Etienne.

    " Philippe Bonjour perd son emploi de Commandant de bord à la Kerries Airlines. Par un heureux hasard, il hérite au même moment d’une propriété… dans le Perche ornais. Quoi de plus naturel que de s’y retirer en compagnie de son épouse Véronique afin d’y mener une paisible existence de gentleman farmer ?

    Or le destin semble en avoir décidé autrement. Peu après son installation au domaine, le solide quadragénaire se trouve plongé au cœur d’étranges évènements…

    Doutes et inquiétudes s’installent dans son esprit qui commence à vaciller tandis que de douloureuses dissensions gangrènent son couple.

    Qui, en secret, tire les ficelles des scénarios nocturnes à répétition dont Philippe est, malgré lui, le héros épuisé ?... "



    2 commentaires


  • festif-image-copie-1.jpg

    Rasé de près, bien coiffé et le chien toiletté, il ne vous reste plus qu’à faire votre marché pour que la fête reparte de plus belle…

     

    par Jean-Claude Touray

    - André, montre-moi le ticket de caisse au lieu de le chiffonner en boule, dit Lucienne, j’ai quelque chose à vérifier.

    Madame et Monsieur Legrand s’apprêtent à sortir de " Bétail ", la grande surface de la "  ZAC du Poisson Rouge ". Comme toutes les semaines, ils sont venus y faire leurs achats. A " Bétail " on trouve de tout : du cassoulet à l’ouvre-boîte et de l’eau de Javel à celle de Cologne. Le jour où il s’y vendra aussi des pierres tombales et de l’aspirine, à la limite, cet hyper suffira à satisfaire tous les besoins de sa clientèle. A " Bétail " ils ont le geste commercial qui attire le chaland : si tu viens le mardi, tu gagnes un bonus de dix pourcents, à valoir sur tes achats de la semaine suivante dans les rayons en promotion. Exemple : vêtements pour chiens, charcuterie tropicale et peinture à l’eau.

    Lulu et Dédé ne sont pas du mardi, jour à faible fréquentation, ils préfèrent le rituel bain de foule du samedi, la communion des caddies au corps à corps, la fusion d’âme des quidams, bref le culte de la déesse " Consommation ". Les Legrand viennent à " Bétail " acheter le nécessaire et, à l’occasion, le superflu. Aujourd’hui, " Pâtissenkit ", le dessert glacé pour grandes occasions. Avec cette nouvelle création des biscuiteries VU, chacun peut monter sa pièce au gré de sa créativité. Quarante ans après soixante-huit, l’imagination revient au pouvoir. L’article est en tête de gondole des surgelés. Dans un joli carton, on trouve les petits choux, avec ce qu’il faut pour les fourrer puis les assembler : glace à la camomille, plus originale que la traditionnelle crème pâtissière, et caramel-colle au beurre salé. Naturellement, l’œuvre est à stocker au congélo !

    Grâce à cette approche, on sort enfin de la forme traditionnelle en cône des pièces montées qui peuvent prendre des silhouettes variées : pyramide, chalet suisse ou chapeau rond…Et surtout, on crée un dessert décoratif glacé.

    La fin janvier est dans une semaine, belle occasion d’essayer ce nouveau dessert festif à la place d’une cinquième galette des rois. Les Legrand se laissent tenter. D’autant qu’ils savent que les Martin, leurs voisins dans la résidence " Les Blattes " en ont consommé hier soir, pour fêter les quatre-vingt six ans de Pépère, l’arrière grand-père. Comme ça, dans quelques temps, ils pourront comparer leurs impressions gustatives.

    - Alors Dédé, tu me le donnes ce ticket au lieu de rêver ? La glace va se réchauffer, il ne faut pas traîner. J’en étais sûre, regarde : la caissière nous a compté le prix de l’option avec dragées, comme si nous devions fêter un mariage ou une première communion ! Ah mais…on va voir ce qu’on va voir. Attends-moi ici en surveillant le caddy.

    D’un pas décidé, Lucienne se dirige vers l’accueil du magasin.

    - Appelez-moi le directeur, c’est pour une réclamation !

    Dix minutes passent. Il arrive enfin, il s’excuse, il est très occupé, Lucienne s’explique. Et pendant ce temps là, au sein du chariot des Legrand, bien rangée dans le carton qui emballe "Pâtissenkit ", la glace fond.

    - Vous avez entièrement raison, chère Madame Legrand. Nous sommes en tort. Il n’y aurait pas dû y avoir d’affichette pour le produit sans dragées, nous sommes en rupture de stock. Mais le prix que vous avez payé est bien celui de l’article qui est dans votre chariot. Je comprends votre réaction et, pour se faire pardonner, " Bétail " vous offre un bon de cinq euros, à valoir sur tout achat de religieuses, profiteroles ou choux à la crème.

    Lucienne est ravie d’empocher une réduction, le directeur est satisfait de s’en être tiré à bon compte, Dédé dort debout, la glace continue de fondre.

    Retour à la maison.

    - Regarde André, quelque chose a coulé sur la moquette du coffre…Horreur, le liquide provient du carton de Pâtissenkit ! Les choux sont certainement détrempés et inutilisables : tout juste bons à donner au chien. La faute à qui ? Au directeur qui a tardé ! Je vais me plaindre au siège, à Paris…, réclamer des dommages et intérêts !... Mais que se passe-t-il chez les Martin ? L’ambulance du SAMU est garée devant chez eux… j’appelle Josiane. Allo, Josy, ce n’est tout de même pas Pépère qui…Si ? Et toute la famille sauf vous! Croyez, chère amie, qu’en cette douloureuse épreuve, nous sommes de tout cœur à vos côtés.

    Lucienne raccroche et dit :

    - Ils ont tous, à part Josy, une colique carabinée. Contamination par des bactéries pathogènes apportées probablement par le dessert en kit. L’arrière-grand-père en a fait une attaque.

    - En somme, ils n’ont pas eu notre chance, remarque André avec un fin sourire. 


    4 commentaires

  • capillaire-image.jpg

    En ce début d’année, la pilosité est à l’honneur sur Calipso. Après Ernest J. Brooms et sa barbe, Danielle Akakpo et ses mèches, voilà qu’Ysiad nous propose de partager ses réflexions suscitées par l’interrogation d’un internaute.

    Est-ce que le gel à coiffer est bon pour le poil du chihuahua ?

     

    Introduction.

    Enfin une question fondamentale, dont on ne peut plus faire l’économie, tant il est vrai que notre monde moderne produit aussi bien du gel à coiffer que des boutiques où sont exposés ces chiens qui, de même que les Chichimèques, les Aztèques, les Toltèques et les meubles en teck, viennent directement du Mexique. Il ne faudrait pas cependant en déduire que tout nous vient du Mexique. Le gel à coiffer n’a pas été inventé par les Incas. On ne connaît pas très bien l’origine du gel à coiffer. On hésite. Certaines questions ne doivent-elles pas rester irrésolues ? Après tout, on n’a jamais su si Nietzsche portait la raie sur le côté et de quelle longueur était la barbe de Socrate. Ce qui est sûr, c’est que ce dernier n’y mêlait pas de gel à coiffer. Il préférait la porter au gré du vent, à en croire les écrits de Platon qui n’était pas chauve comme Socrate, mais portait la barbe lui aussi. Ni l’un ni l’autre n’utilisaient de gel à coiffer, et si chacun avait sa chacune, Socrate : Xanthippe, Platon : Alcibiade, aucun n’avait de chihuahua. En ces temps-là, la question de savoir si le gel à coiffer était bon pour le poil du chihuahua ne se posait pas. On était déjà assez occupé avec " Connais-toi toi-même " pour ne pas se préoccuper en plus des poils de son chien.

    Ce qui nous ramène d’office à la question de savoir si le gel à coiffer est bon pour le chihuahua. Question complexe dont nous tenterons dans ce bref essai de démêler l’écheveau, et tant qu’à faire, d’en comprendre la problématique. Autant faire d’une pierre deux coups. Il faut toujours comprendre la problématique des choses dans ce monde tourmenté où l’homme a de plus en plus tendance à se tartiner du gel sur les cheveux sans lire les étiquettes. Or le problème qui se pose présentement est de savoir de quoi est composé le gel à coiffer.

    Premier temps de la thèse.

    Le gel à coiffer est composé de tout un tas de choses qui ne figurent pas forcément sur l’étiquette de la bouteille et qui regardent uniquement les fabricants de gel à coiffer. Personne d’autre. Les fabricants de gel à coiffer ne livrent pas leurs recettes sinon tout le monde serait capable de fabriquer de nuit et clandestinement du gel à coiffer dans sa cave. L’action de l’Oréal perdrait toute sa valeur, ce qui serait un coup mortel porté au kakarante. Or le kakarante n’est pas type à se laisser passer du gel dans le dos, même à coiffer. Sachez-le. Le kakarante se courroucerait tel Quetzacoatl, qui est une valeur sûre au Mexique. Le kakarante protège l’Oréal qui protège son gel à coiffer pour que les gens soient contents d’en acheter, sans se demander dans quelle proportion entrent les conservateurs, et sans avoir de scrupules à en administrer à leurs chihuahuas. Les gens achètent leur gel à coiffer les doigts dans le nez, et quand il est en promo, c’est la curée. Ils ne regardent pas la composition. Ils veulent se gominer les cheveux, et basta. Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

    Transition vers le deuxième temps de la thèse.

    Sauf que des petits malins ont d’abord fait l’essai sur leur chihuahua. Car l’homme est un roseau. Le plus faible de la nature, mais un roseau pensant (Pascal). L’homme en sa nature complexe est amené à chercher, encore et toujours, de quoi sont faites les choses, comment ne pas payer ses impôts, et s’il est envisageable de débarquer au bureau avec une crête à l’iroquoise pour mettre de l’ambiance à l’étage. Il est certain qu’une crête à l’iroquoise implique d’avoir une bonne dose de patience et autant de gel à coiffer et qu’il est alors déterminant de savoir de quoi est composé ce putain de gel à coiffer pour savoir si on va garder ses cheveux ensuite.

    D’où le chihuahua. Allez, au pied. Tout de suite. Brave bête.

    Tout en lui flattant l’encolure, appliquons-lui largement au pinceau du gel à coiffer sur le sommet de la tête. Tartinons généreusement, puis rassemblons les poils et formons une queue de cheval que les plus audacieux d’entre nous pourront agrémenter d’un joli nœud nœud bleu. Ou rouge. Selon l’humeur.

    Puis attendons.

    Antithèse.

    Au bout d’un quart d’heure, le chihuahua a perdu tous ses poils de tête. Comme Socrate. Il ne reste plus rien de ses mèches crâniennes. C’est la bérézina, d’autant plus que le vétérinaire n’a pas l’air très optimiste sur la repousse. Il hésite. Il se gratte le cuir chevelu. Il demande que l’on s’abstienne de toute nouvelle tentative sur la tête du chien, et il présente sa note, que l’on paye en sachant qu’on ne pourra plus s’acheter de gel à coiffer pendant au moins six mois. De retour à la maison, on se regarde dans la glace, un peu confus. Jusqu’à ce qu’une question fondamentale s’élève du néant : A-t-on vraiment besoin de gel à coiffer dans la vie ?

    Synthèse, le temps presse.

    Aussi vrai qu’il n’est pas de poil sans chute, nous pouvons concevoir une vie sans gel à coiffer. Socrate s’en passait bien, Platon aussi. Laissons sa banane à Elvis, les gondoles à Venise et laissons nos chihuahuas en paix. Plutôt que du gel à coiffer, utilisons de la bière bio, qui n’abîme pas le cuir chevelu et n’appartient pas à l’Oréal.

    Mais elle est si bonne au goût que ça vaut le coup de l’essayer avant d’en shampouiner son chien.

    Ysiad


    12 commentaires

  • livres-et-libraires-images.jpg






    Auteur de poèmes, nouvelles et romans parmi lesquels une douzaine de titres édités, Calipso a publié courant 2007 une de mes courtes nouvelles, Camille. Depuis, le responsable du site, Patrick L'Ecolier, m'a proposé de tenter l'expérience de tenir une chronique dans laquelle j'aborderai divers sujets. Dans la continuité d'une sorte de… journal commencé voilà longtemps, j'ai décidé d'intituler ces chroniques A propos de…

     

    par Gilbert Marquès  

    Le sujet m'a été offert la semaine passée par un message Internet en provenance d’une librairie en ligne X.com appelant ses clients à la rescousse.

    - La raison ? Une plainte déposée par un syndicat de libraires au motif que cette enseigne offre les frais de port. Donc et si j'ai bien compris, les plaignants jouent sur la notion de concurrence déloyale puisque ce cadeau équivaudrait à baisser artificiellement le prix du livre qui comme chacun sait depuis la loi Lang, est réglementé et unique quels que soient les modes et les points de vente.

    - Résultat ? Condamnation assortie d'une forte amende payée par cette librairie en ligne pour pouvoir, disent ses responsables, continuer leur pratique.

    Outre l'information, ce courriel comporte deux liens. Le premier vers une pétition de soutien. Le second, vers un forum sur lequel les lecteurs sont invités à débattre sur ce thème.

    En client curieux, j'ai surfé sur le forum et sans lire la totalité de la masse des réactions ni vouloir polémiquer sur la fâcheuse tendance à la répression que nous subissons tous dans tous les domaines de notre vie quotidienne, j'ai retenu trois types de réponses à la question suivante :

    La plainte suivie d'une condamnation est-elle ou non équitable ?

    - Les affirmatifs : je schématise volontairement car, en vérité, ils ne se prononcent pas de façon aussi tranchée mais affirment être prêts à payer un livre quelques euros de plus dans le but louable de permettre la survie des libraires indépendants, ces derniers offrant des services différents de la grande distribution.

    - Les négatifs : le principal argument développé s'appuie sur Internet grâce auquel des librairies comme X.com existent et auraient permis le désenclavement de zones géographiques mal ou pas desservies par les librairies conventionnelles.

    A noter cependant qu'un service identique a été créé depuis longtemps par des clubs sous forme d'envois de catalogues par la Poste, ce qui ne les empêche pas de tenir également boutique et d'avoir des sites sur le Net. D'une façon peut-être un peu différente mais avec des résultats similaires, ces maisons pratiquent aussi remises et avantages pour leurs clients. Ne détournent-elles pas aussi la loi Lang ? Pourquoi alors ce syndicat des libraires, à ma connaissance, assigne-t-il seulement X.com et pas les autres ? Par extension enfin, pourquoi les syndicats de tous les petits commerces n'agissent-ils pas de même à l'encontre des toutes les entreprises de vente par correspondance ?

    - Les extrémistes : ces derniers demandent ni plus ni moins un retour à la libéralisation du prix du livre afin, affirment-ils, de rendre la culture accessible au plus grand nombre. En tant que lecteur, je n'y suis pas fondamentalement opposé sans voir les réels avantages qu'une telle mesure pourrait engendrer puisque la loi est détournée. En tant qu'auteur, je suis partagé. Outre le casse-tête comptable pour l'éditeur contraint de calculer le montant des droits d'auteur en fonction de chaque détaillant, le pourcentage perçu par l'auteur est tellement faible par rapport à celui des autres intervenants du circuit qu'il serait plus judicieux de baisser la TVA pour rendre la lecture sinon plus attractive du moins plus accessible à tout le monde.

    N'oublions pas non plus les bouquinistes et les livres d'occasion, pouvoir d'achat oblige…

    En conclusion, par expérience d'auteur et de client des différentes structures de la distribution du livre, je suis enclin à penser que chacune d'elle a sa place. Plus que concurrentielles, je les crois complémentaires. Je trouve ainsi cette plainte sinon abusive du moins hors de propos, le rôle d'un libraire indépendant n'étant pas le même qu'X.com ou ses pareils. La majorité l'a si bien compris qu'ils se sont adaptés en se spécialisant dans un secteur culturel spécifique, un peu comme en médecine qui compte des praticiens généralistes et des spécialistes.

    Toutes les initiatives tendant à rendre la culture moins chère et plus accessible sans la galvauder sont à soutenir. Quel que soit l'artifice employé, plus le prix du livre sera bas, plus il aura de chances de séduire des lecteurs potentiels. Les auteurs, malgré les apparences, devraient également y trouver leur compte puisque leurs ouvrages seront, a priori, plus largement distribués sinon mieux.

    Dès lors, cette plainte d'une certaine catégorie de libraires m'apparaît simplement corporatiste dans le sens où elle ne semble pas devoir défendre en même temps les lecteurs et/ou les auteurs mais uniquement des intérêts ciblés sans aller d'ailleurs jusqu'au bout de la démarche. Internet fait peur dans bien des domaines et les traditionalistes répugnent à se remettre en question tout en se sentant menacés. C'est là, à mon avis, que réside tout le nœud du problème dans cette affaire.

     




    4 commentaires

  • Blogcity-15-image.jpg

    Une chronique à la petite semaine bon an mal an de quelques judicieuses fabriques de littérature.

    A cliquer dans les Aiguillages :

     

    Sur Mot Compte Double

    Une petite vidéo caustique avec Leon puisée dans la légende des trois petits cochons… (19 décembre 07)

    Un débat très pertinent autour du pouvoir des mots et de la puissance de l’image à partir du livre de Solenn Colleter sur le bizutage. (30 septembre 07)

    Les premiers textes qui ont réussi à passer les " Frontières "

    Sur Bonnes nouvelles

    Bonnes Nouvelles est entièrement gratuit. Mais Bonnes Nouvelles a tout de même un coût. Même Leon le dit. Les animateurs vous invitent à les aider à participer aux frais d'hébergement qui ont grimpé en raison du nombre croissant de fichiers mp3 insérés, (dont les nouvellistes, illustres ou inconnus, sont les premiers bénéficiaires) tout comme les démarches postales pour recenser les concours. La méthode est simple : faire passer à Leon (qui transmettra) une fois par an un don même minime… 1 Euro. C’est peu dire qu’ils seront contents sur Bonnes Nouvelles…

    Chez Stéphane Laurent

    Stéphane attendait hier encore quelques textes pour la composition d'un recueil collectif de nouvelles sur le thème du poids du passé. Leon lui en aurait apporté une pleine brassée mais il n’est pas encore sûr que cela suffise à le rassasier…

    Sur Lenonsens, revue littéraire quinzomadaire

    Pas la peine d’attendre la visite annuelle de Leon, Hector Plasma se démène pour nous réveiller au moins tous les quinze jours.

    Sur Histoires d’écrire

    En ce début d’année n’oubliez pas de rendre visite à Corinne Jeanson, sa main caresse des émotions lointaines…(6 janvier 08)

    Sur Délit de poésie

    Cathy Garcia fait un vœu qui vaut la visite. (7 janvier 08)

    Sur La scribouillarde

    Tout le bonheur d’un petit repas en famille pour la fête à Leon… (27 décembre 07)

    Sur Pr’Ose

    Dans le sac à Leon, on s’en raconte de bien belles… jusqu’à la dernière minute. (24 décembre 07)

     

    La dépêche expéditive de chez Reuters

    Que feriez-vous s'il ne vous restait qu'une heure à vivre avant la fin du monde ?

    Interrogés sur cette délicieuse perspective 54% des Britanniques ont répondu qu'ils souhaiteraient passer ce moment en compagnie de ceux qu'ils aiment ou à défaut, avoir une conversation téléphonique avec elles. 13% se contenteraient de prendre le temps de savourer une flûte de champagne. 9% déclarent qu'elles auraient des relations sexuelles et 3% qu'elles prieraient et enfin 2% affirment qu'ils en profiteraient pour manger des aliments gras et autant pour souhaiter profiter de ces derniers instants pour se mettre à piller des magasins.

     

    Ces drôles de requêtes enregistrées sur la route Google / Calipso

    Il fo avoi qulle ag pour monte a la rier dune moto ?

    Est-ce que le gel à coiffer est bon pour le poil du Chihuahua ?


    3 commentaires
  • Ils n’étaient pas de mèche et pourtant ils se sont retrouvés avec ciseaux et peignes pour nous brosser le portrait. Après le barbier d’Ernest J. Brooms, c’est Danielle Akakpo qui officie du côté de la coiffeuse.

       

    coiffeur-image-copie-1.jpg  

    Je les ferais bien couper. Ils ricochent sur mes cols roulés, ce que c’est agaçant ! Ils sont trop longs sur le dessus de la tête, longs et mous et ça me fatigue de passer régulièrement une bonne demi-heure à manier la brosse à brushing. Pour quel résultat d’ailleurs ? À vrai dire, c’est plutôt pour me donner bonne conscience, parce que je suis si malhabile que le jeu n’en vaut pas la chandelle. Brosse à brushing ou pas, j’ai l’air d’un chien fou.

    J’ai ressorti ma vieille carte d’identité – je vais toujours chez le coiffeur avant de me faire photographier pour la postérité – qu’est-ce que je raconte, pour dix ans ! –J’étais drôlement chouette avec les cheveux coupés très court, la nuque dégagée, quelques petites mèches balayant négligemment mon grand front. Ben oui, j’ai un grand front, d’intellectuelle m’a-t-on toujours répété ! Je ne vais pas en avoir honte, quand même ! J’avais l’air d’une adolescente, enfin, n’exagérons pas, disons que je faisais bien dix ans de moins. Quoi ? Ma carte d’identité aura bientôt dix ans ? Comme le temps passe ! Franchement, l’ovale de mon visage – j’étais sur le point d’écrire le pur ovale – mes oreilles finement ourlées – on me l’a murmuré aussi qu’elles étaient mignonnes mes oreilles – seraient beaucoup mieux mis en valeur si j’optais à nouveau pour une coiffure très courte. Je vais de ce pas téléphoner à mon Figaro.

    D’un autre côté, il fait un froid de canard. Je me souviens que ma mère, ou ma grand-mère peut-être, disait toujours : " Attends donc qu’il fasse beau pour te faire couper les cheveux. " Manquerait plus que j’attrape la crève ! D’autant que pour le moment, je n’ai pas trop à me plaindre : mon arthrose du coude – eh oui, à force de jouer avec la souris ! – me laisse en paix, mon estomac a bien voulu digérer les chocolats de Noël, et ma tension a cessé de faire le yoyo. Pourvou qué ça doure, comme le claironnait la maman de Napoléon !

    Et puis, tout bien réfléchi, pourquoi capitulerais-je alors que je suis si près de mon but ? Mon but ? Une lubie qui m’est revenue, comme ça, un soir, en regardant de vieilles photos : j’aimerais tellement pouvoir le refaire ce sacré chignon bouclé de mes vingt-cinq ans ! Encore une petite quinzaine et je devrais y être. Quel souvenir ! Une fois bien fixé à grands renforts d’épingles, de laque, il restait impeccable pendant une semaine. Je me levais le matin aussi bien chignonnée que la veille, comme si j’avais dormi assise. C’est complètement passé de mode ? C’est vrai. Et vu que je n’ai pas de cérémonie habillée en vue, que je ne sors plus le soir pour aller danser – sage grand-mère lisant au coin du feu, enfin près du radiateur ou somnolant devant la télé –, je vois d’ici mon look avec mon jean, ma parka, mon panier de marché… et mon chignon bouclé ! Les voisins, ma petite marchande de journaux en tomberaient sur le cul ! En fait c’est aussi de la queue de cheval de la même époque que j’ai la nostalgie : tellement facile, rapide à serrer dans son élastique, quel gain de temps tous les matins ! Et les couettes à la Sheila, les nattes ! Non mais, franchement, Danielle, tu dérailles, tu oublies ta date de naissance !

    Bon, je tire un trait sur ces petites fantaisies. Par contre, j’aperçois un fil blanc là, en plein sur le sommet de la tête. C’est fou ce qu’il brille à la lumière. Ça va rarement seul, cette engeance-là, c’est comme les poux, toujours en colonie. Je suis bonne pour une petite couleur. Oui mais laquelle ? Ton sur ton, châtain clair sur châtain clair ? Moi je m’adore en brune mais mon homme va encore me dire que ça me donne un teint de lavabo. J’aime bien les faire moi-même mes couleurs, ça m’amuse. Sauf que la dernière fois, je ne sais pas ce qui s’est passé mais le blond doré a méchamment viré… à la catastrophe. J’avais tout d’un tournesol, et je te garantis, Broomse, que dans ces cas-là, il n’y a pas que la nuit que les tournesols s’affolent ! Bref, que c’est compliqué une vie de femme, la mienne en tout cas, surtout à cause des cheveux ! Voila, à force de me regarder dans ce miroir, de réfléchir à coupera coupera pas, couleur ou pas couleur, je me suis mis le moral à zéro, je frise la déprime. Tiens, j’avais oublié l’époque bénie où la mode permettait, pour ne pas dire exigeait que la femme fût frisée comme un mouton : quelques années de bonheur pour mes crins très réceptifs à ce genre de traitement. !

    " Qu’est-ce que tu dis, chéri ? Il neige, ça alors ! Et Évelyne Dhéliat annonce que ça va durer une quinzaine de jours, peut-être plus ? " Quelle chance, plus d’états d’âme, je file me coucher l’esprit serein. À partir de demain, j’enfonce le casque, enfin le bonnet de laine jusqu’aux yeux : neige oblige !

    Danielle Akakpo



    5 commentaires

  • Non, ce n’est pas de la barbe à papa, c’est du vrai poil dont sont parés les êtres humains. Ernest J. Brooms nous en propose quelques savoureuses tresses. Le texte est publié conjointement sur le site " Pour le plaisir d ‘écrire " et Calipso.
     
      

    barbe-image.jpg  

    Aujourd’hui, c’est décidé, je me laisse pousser la barbe. Pour gagner du temps. Quelques minutes par jour accumulées forment une masse temporelle appréciable. Je n’ai pourtant pas le sens de l’économie. A quoi me servirait de disposer de plus de temps si rien ne le remplit ? L’ivresse de la vitesse compte beaucoup plus. L’essentiel n’est pas la quantité, ni la qualité mais le rythme. Alors, j’hésite pour cette barbe.

    C’est physique ! Je veux changer de visage, du moins son apparence. Elle suffit à tromper les autres. Je me gommerai le menton. Effacerai les joues, cernerai le lèvres. Et je me poserai le regard au milieu. Ils me fixeront. Ce sera désagréable !

    Puis, il y aura les tics. Je me lisserai la barbe donnant l’impression que je pense à quelque chose d’important. Que je suis ailleurs. Ca me donnera une contenance dans les moments difficiles. J’arracherai les poils plus longs. De petites taches claires se formeront comme une pelade. Ils diront que ça fait sale et que ça pique tant qu’elle n’est pas longue et douce. Les enfants en feront une corde à danser. Mais il faudra du temps. Et je n’en ai guère.

    Non, ce n’est pas physique ! Mon visage ne sera ni plus beau, ni plus laid. Tel quel. Alors ?

    Il faut se protéger de l’hiver et des intempéries. Un chapeau à larges bords, une barbe et le tour est joué. A moi la chaleur et la protection. Mais l’été reviendra et ce sera le hammam. Non !

    Pour paraître plus jeune. Après ! Je me laisse pousser la barbe, je semble plus âgé, plus mûr, plus sage, plus viril, plus austère… je gagnerai en crédibilité et quand je me raserai, on dira : " Tu fais plus jeune, tu as retrouvé ta candeur, t’as l’air moins sérieux ".

    Ou bien, la barbe ne sera qu’un signe extérieur de nouvelle richesse interne. Je ne serai plus tout à fait moi. Un autre moi-même. En mieux. Métamorphosé. Méconnaissable. Je referai tout. Me mettrai le compteur à zéro. Je me reconstruirai. Et la douceur des choses. Et la dureté de la vie. Tout. J’abattrai tout ce qui tremble, ce qui oscille. Ne garderai que le ferme. Je rebâtirai mes heures. Mes moments de haine, de peur, d’angoisse, je les effacerai une fois pour toutes. Je serai neuf. Frais. Prêt à une nouvelle consommation. Nouvel emballage. Nouveau produit. Célébration du moi ! Et ils diront : " Comme tu as changé ! ".

    Je pourrais aussi choisir une barbe comme on porte un signe de noblesse et de puissance, une barbe guerrière. Ou un signe de consécration à quelque dieu : sa densité égalant ma ferveur de croyant, elle risque de rester très courte ! Mais n’oublions pas qu’il devient difficile de passer le portique de certains aéroports aujourd’hui si on a le teint hâlé et une longue barbe !

    Reste la mode. Je choisirai une barbe hippie, refusant la société de consommation, bravant les interdits et prônant le retour à la nature. Ou je m’inspirerai d’écrivains, de créateurs de mode, de sportifs, de rappeurs… adoptant le beigne qui fait le tour du menton et cache les gros cous, la moustache qui me permettra d’entrer dans la police, la barbichette ramasse-miettes, le collier millimétrique en trait de crayon ou encore le pinch, la petite touffe sous la lèvre inférieure en guise d’échantillon… Ca fera propre dans les cafétéria, élégant dans les bars branchés, distingué dans les soirées mondaines, sportif dans les clubs de foot., sexy pour les blondes... Mais quel entretien, quel savoir-faire pour l’entretenir, moi qui peine déjà à tondre correctement ma pelouse ! La symétrie des colliers ou des boucs : pas simple ! Un coup de rasoir et c’est foutu ! Je devrai acheter des accessoires dignes des professionnels pour sculpter cette pilosité : tondeuse à sabot flexible, ciseaux à lame micro-dentée, rasoirs et stylos de précision. Une finesse de taille optimale. Faudra finalement retourner chez le barbier. Si j’en trouve encore un.

    Je vais dormir et réfléchir. Demain matin, c’est décidé, devant ma glace au réveil, je verrai naître l’image d’un autre moi.

    Alors, je choisirai un nouveau rasoir aux quatre lames synchronisées et sans hésiter, d’un geste large, je me raserai.

    Ernest J. Brooms


    7 commentaires



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires